Dans le Bèlèdougou comme dans bien de communautés maliennes, la toute première démarche à entreprendre pour la recherche d’une jeune fille en mariage est aussi rituelle que significative et riche en symboles. Cette démarche obéit à une certaine investigation ou enquête afin de dépister et décrypter ce qu’on appelé « les bons et mauvais augures » de la fille en question : en fait, à travers son physique, son mental, ses faits et gestes (entre autres), il s’agit d’étudier et de « lire » les « Téré » et « Nélé » de la fille à marier, autrement dit ses « bons et mauvais augures ».
Dans le Bèlèdougou (un milieu qui regroupe plus d’ethnies bamanan que d’autres ethnies), on entretient des coutumes et traditions dont l’usage diffère de celles d’autres milieux. Ainsi, les pratiques coutumières et traditionnelles des bamanan du Bèlèdougou leur tiennent lieu d’éducation et de morale pour la formation des futurs adultes : ce constat est tout autant valable pour bien d’autres communautés maliennes. C’est ainsi que pour un mariage, on procède a des rituels bien distints et significatifs. En effet, avant d’entamer toute démarche dans ce sens, c’est la tante, l’oncle ou même la sœur du demandeur en mariage (le futur marié) qui fera la proposition de mariage aux membres de la future belle famille (dont les parents de la future mariée) pour « obtenir la main » de la fille, soit dès sa naissance, soit à son très bas. Souvent (cela dépend des usages des différentes communautés), on donne ladite fille à un garçon de la famille, le plus souvent un cousin : ne dit-on pas en plaisantant que « les cousins sont faits pour les cousines, et vice-versa ? ». Notons par ailleurs qu’il y a des mariages entre clans, tribus ou communautés apparentés par des liens de sang ou de classe sociale.
Apres tous ces préliminaires, le futur époux lui-même ira faire le « premier pas » chez ses futurs beaux parents (mais précisons que cela dépend toujours des usages afférents aux différentes communautés). Le futur mari en profitera ainsi pour observer et étudier (sans pourtant en avoir l’air) les « Téré » et « Nélé » (bons et mauvais augures) de sa future épouse. Mais il fera ce premier « test » avec un de ses amis, surtout s’il n’est pas du même village que sa future épouse. Pour effectuer cette visite « éclair » (à l’improviste) dans sa future belle-famille, le futur mari et son ami le font à pied, à cheval, à vélo, à moto ou en voiture : c’est selon. Une fois qu’ils mettent dans la famille de sa future épouse ; lui et son ami doivent tout observer aussi méthodiquement que scrupuleusement : si la fille en question est à marier ou non, si elle sera une bonne ou mauvaise épouse. Possède-t-elle des signes et symboles d’une fille à marier ? Quels seront ses faits et gestes durant cette brève visite ? L’ont-ils « trouvée à la maison » (au sens propre comme au figuré) ? Que faisait-elle dehors ? Où était-elle allée ? Prendre de l’eau ou chercher du fagot ? Lavait-elle des ustensiles ou du linge ? On étudie alors ses regards, sa démarche, la forme de ses pieds et de sa tête : comme si on ressent déjà les signes d’une jalousie morbide avant même le futur mariage !… Bref, tout en elle est examiné à la loupe, peut-on dire, et tout cela pour connaître ses « Téré » et « Néré » afin de pouvoir les décrypter et les interpréter par la suite conformément aux usages, coutumes et traditions.
Sitôt arrivé dans sa future belle-famille, le futur conjoint, après avoir minutieusement observé et analysé ce que sa future dulcinée était en train de faire, se fait le devoir de l’appeler en lui demandant…de lui donner de l’eau à boire ». Après que la dulcinée se soit exécuté, son futur homme, tout en buvant l’eau, l’observe subrepticement et sans qu’elle s’en aperçoive, histoire de savoir si elle se gratte la tête (les poux, on ne sait jamais) le corps (la santé avant tout) ou si elle se livre à des gestes incongrus. Toute cette étude sur la future conjointe peut aider à connaître ses « Téré » et « Nélé ». C’est après avoir tout observé que le futur mari et son ami iront faire un compte rendu fidèle de tout ce qu’ils ont vu, entendu et senti sur chez la future promise la future mariée, sur sa mère surtout, sur ce qu’elle faisait, sur ce qu’elle présente comme signe particulier, sur son physique…Ce compte rendu sera fait à qui de droit : cela peut être l’oncle ou le père de la future mariée. Mais les résultats de ce compte rendu seront également portés à la connaissance des parents et des membres de la famille du futur époux. C’est après toutes ces péripéties et autres préambules que la décision sera prise pour la continuation des démarches en vue de procéder pour procéder au mariage de la fille en question.
Abdoulaye Faman Coulibaly
Parlant de guigne (téré) chez la femme et l’homme, n’a-t-il pas lui aussi des guignes ?
Je pense que l’expression « trouvée à la maison » est plutôt utilisée pour dire que la femme est vierge. 😉
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