«Les jeunes maliennes célibataires demandent de moins en moins l’avortement. Par contre, ce sont les femmes mariées qui s’adonnent désormais à la pratique. Paradoxalement, les jeunes filles se soumettent de moins en moins à la contraception malgré l’accroissement considérable des centres de planning familial dans le pays».
La sensibilité contraignante du sujet nous oblige à utiliser des euphémismes et à taire délibérément certaines sources. Reste que les faits ici évoqués émanent de spécialistes du domaine et même des acteurs concernés.
De source médicale, le constat est patent: la plupart des candidates à l’avortement clandestin ou provoqué, en l’occurrence, sont des femmes mariées. «Elles mettent les moyens qu’il faut pour parvenir à leurs fins», précise un médecin.
Il nous revient que la plupart des solliciteuses sont des femmes mariées certes, mais vivant seules. Il s’agit, en général d’épouses d’immigrés, éloignées de leurs époux pendant plusieurs mois et/ou années. Un phénomène lié à certains cas de mariages forcés ou arrangés entre familles. L’on comprend alors aisément les motivations sexuelles de ces épouses «abandonnées».
Puisque recevant régulièrement des biens matériels et financiers de leurs époux depuis le pays d’accueil, elles disposent dès lors de ressources adéquates pour réussir leur coup. Ce ne sont pas tous les médecins qui se remémorent le serment d’Hippocrate face à des espèces sonnantes et trébuchantes.
Plus troublant encore, révèle un vieux médecin : contrairement aux années 80 et jusqu’à la fin de la décennie 90, les jeunes filles maliennes ne sont désormais plus nombreuses à solliciter le service des avorteurs. Si aucune étude n’est, à ce jour, disponible pour expliquer le phénomène, les spécialistes de la contraception et du planning familial, soulignent que les «jeunes citadines, en l’occurrence, sont soumises à au moins une méthode de contraception». Et d’ajouter cependant que les statistiques sont de plus en plus faibles. En clair, au moins une jeune fille sur trois abandonne la contraception après au moins deux années de pratique. Les préjugés défavorables seraient à l’origine de ce recul. On attribue, à tort ou à raison, la stérilité féminine à certaines méthode de contraception. A cela, s’ajoutent les malaises et autres désagréments liés à chacun des préceptes.
Mais ceci justifierait-il le taux de plus en plus faible de jeunes filles candidates à l’avortement ? Nullement, expliquent nos sources. « Les jeunes filles n’utilisant pas de contraception désirent le plus souvent une maternité ou tout simplement, n’ont pas les moyens financiers pour avorter ». L’opération, dans les meilleures conditions cliniques, coûterait 200.000 F CFA voire plus. Le manque de ressources et/ou les risques liés à la pratique dans des conditions précaires découragent nombre d’entre elles.
Il importe, en tout état de cause, aux autorités d’observer attentivement le phénomène et ses corollaires et d’en tirer leçons. Il y va de la stabilité sociale puisqu’impliquant à la fois mères d’aujourd’hui et de demain.
B.S. Diarra