Le tribunal pour enfants de Bamako a fait peau neuve. Raison pour laquelle nous avons décidé d’y faire un tour afin de comprendre cette juridiction spécialisée. Sur place, la réalité est toute autre.
Ce tribunal traite des questions mettant en causes les enfants (enfants en conflit avec la loi, enfants abandonnés, trouvés ou recueillis). C’est la seule juridiction habilitée au Mali à appliquer les droits de l’enfant ou à traiter des questions de mineurs. Mais force est de reconnaitre que rien ne va dans cette juridiction qui pourtant devrait être l’une des plus enviées du pays.
Tout le Mali a cependant suivi avec beaucoup d’intérêts la visite guidée du complexe Adiara retransmise par l’ORTM à travers l’émission «Nous les enfants » des dimanches 28 février et mercredi 02 mars 2016, qui a vu le président de cette juridiction à la personne de Modibo Tièoulé Diarra répondre brillamment aux questions des enfants dudit complexe. Qui n’a pas été édifié et émerveillé par les explications du président Modibo Tièoulé Diarra ?
C’est au regard de cette intervention, que nous nous sommes rendus sur place. L’on ignorait encore que l’arbre cachait la forêt.
En parcourant les textes relatifs à cette juridiction notamment la loi portant sur la minorité pénale et institution de juridictions pour mineurs : loi N° 01 -081 du 24 aout 2001, modifié par la loi N ° 07 -016 du 16 février 2007 et l’ordonnance N° 99 -007/P-RM du 31 mars 1999 portant création du centre spécialisé de détention, de rééducation et de réinsertion pour mineurs de Bollé , ainsi que d’autres textes , l’on se rend aisément compte que cette juridiction n’est soutenue ni par les pouvoirs publics , ni les partenaires intervenant en matière de droit de l’enfant, du moins depuis la crise multidimensionnelle qu’ a connu notre pays.
Il nous a été donné aussi de constater que malgré l’existence de cette juridiction, les procédures d’adoption continuent à être gênées par d’autres juridictions notamment le tribunal de grande instance de la commune V du district de Bamako. Toute chose qui fait couler beaucoup d’encre et de salives. En clair, cette procédure d’adoption doit être dévolue exclusivement aux tribunaux pour enfants, car après tout ne s’agit –il pas de l’intérêt supérieur de l’enfant ? Dans le cas échéant, seuls les tribunaux pour enfants appliquant les droits de l’enfant doivent être compétents.
Aussi, il ressort de notre constat, que même le casier judiciaire des enfants mineurs nés à Bamako n’est pas délivré par cette juridiction qui, pourtant, s’avère le seul habilité à condamner les enfants en conflit avec la loi. C’est dire que cette juridiction ne joue pas ou du moins, on ne lui fait pas jouer ses véritables attributions. A se demander alors à quoi sert-il?
Nos investigations nous ont en outre permis d’apprendre ce sont encore d’autres magistrats ayant servi cette juridiction qui continuent à siéger ou à travailler avec certaines structures évoluant dans le domaine de l’enfant au grand dam de leurs collègues aujourd’hui en service dans cette juridiction. Toute chose qui démontre à suffisance la mauvaise foi de ceux ou celles qui s’adonnent à ces pratiques.
En tout état de cause, les magistrats en charge de ces juridictions sont en droit d’attendre une réaction de la part de leur pays et des partenaires avec à leur tête, l’UNICEF.
B.S. Diarra