Amadou Camara est né en 1953. Il habite Fana -120 km au nord-est de Bamako- sur l’axe Bamako-Ségou dit la RN 6. Cette voie, sans doute la plus importante au Mali, vient de bénéficier de travaux qui l’ont considérablement élargie. Mais pour ce faire, il a fallu beaucoup dégager, casser et démolir. Afin que les travaux puissent se dérouler dans la paix sociale sur l’étendue du chantier, des concertations ont eu lieu avec tous les riverains concernés et les notabilités locales des villages, hameaux et villes traversés. Un scenario de fin de chantier se dégage pour l’ensemble des populations en cause. Pour mieux expliciter le problème, suivons le cas d’une victime, Amadou Camara, qui vit depuis un an dans l’attente, dans la difficulté et dans l’ignorance de ce qui adviendra demain.
Amadou avait de quoi amasser environ 40000 F Cfa par mois. Ce qui lui permettait de vivre bien (tout est relatif, n’est-ce pas ?) et de mettre sa famille à l’abri du besoin. Et puis, vint la catastrophe sans crier gare.
Les choses se sont déroulées en trois temps et avec trois missions différentes. La première équipe, les locaux l’ont baptisée : « celle de la croix ». La Croix est venue marquer d’une…croix blanche tous les édifices à démolir. La 2è est celle de la mauvaise nouvelle. Elle a réuni tout le monde au Stade municipal et a émis les recommandations et les menaces suivantes : « Ceux qui sont concernés n’ont qu’à démolir eux-mêmes leurs édifices et immobiliers se trouvant sur la zone du chantier. Dans ce cas vous pourrez récupérer vos tôles, vos poutres et autres biens. Sinon si le chantier casse vous perdrez tout ». Elle a convaincu tout le monde et les gens ont détruit eux-mêmes leurs bâtiments et édifices. Les revenus liés se sont taris aussitôt, plongeant les uns et les autres dans l’angoisse et la pénurie.
La 3è et dernière mission aura été celle de l’espoir déçu. En effet, elle a réuni tout le monde dans la cour de la Mairie pour parler de sous. Joie ! – elle sera de courte durée. Elle a annoncé que l’on allait faire les évaluations et dire à chacun combien on allait lui donner à titre de dédommagement. Mais il fallait s’enregistrer avec une carte d’identité en cours de validité. Amadou, comme beaucoup d’autres, n’en a pas trouvé à Fana. Ils se sont rués vers Konobougou le plus proche coin : rien. Ils ont prolongé sur Baroueli pour rien. Et finalement, ils ont pu renouveler leur Carte d’identité à Doïla. «La tournée m’a couté 10 000 F Cfa », confliera Amadou Camara. C’était en juin 2014. «On a enregistré nos noms. On croyait qu’ils allaient nous donner la somme promise. Mais, ils ne nous ont rien donné. On attend depuis toujours».
Amadou Tall