Après les injustices subies et les humiliations endurées, le M5-RFP est désormais associé à l’exercice du pouvoir de transition ouvert depuis la mise à l’écart de IBK le 18 août 2020. Les militants et sympathisants de cette vaste mobilisation entamée le 05 juin 2020 s’en sont tous naturellement réjouis ainsi que tous les Maliens non engagés dans le M5-RFP mais qui pensent que la politique ne saurait se résumer au manque de scrupule, à l’usurpation, même à l’imposture comme ont pu le montrer le CNSP en son temps, et plus tard, le duo Bah N’Daw-Moctar Ouane, sortis de nulle part pour se délecter des fruits d’une lutte qu’ils ont royalement ignorée. Mais le retour en grâce du M5-RFP, plus dicté par le retournement de conjoncture politique que la bienveillance de la junte, oblige doublement le premier ministre Choguel Maïga. D’abord à l’action efficace pour les huit mois qui nous séparent de la présidentielle pour faire davantage regretter les neuf mois perdus avec Moctar Ouane. Ensuite à comprendre que la Transition actuelle ne réglera pas les problèmes du Mali, mais elle peut et doit mobiliser le pays, dans une démarche inclusive, autour d’une feuille de route de réformes que la Nation exigera des futurs élus (président de la République et députés) pour les 5 ans à venir (2022-2025). Ne nous trompons ni d’horizon ni d’objectif.
La vraie transition commencera avec un président de la République et une Assemblée nationale aussi honnêtement élus que possible. Voilà la mission principale des prochains mois et non des usines à gaz qui ne produisent que des idées fumeuses. Et la première des urgences est que le premier ministre se mette de façon résolue et visible à la tâche. La tournée chez les anciens PM est bien sympathique mais absolument inutile.
Le M5-RFP serait bien ridicule de se prévaloir, demain, dans son bilan, d’avoir eu le seul Chef du Gouvernement qui a rendu visite à ses prédécesseurs. Les jours, les semaines et les mois sont diablement comptés pour s’égarer dans les détails. Le M5-RFP à beaucoup pâti des coups de Jarnac de la junte et des trahisons internes. Il avait la force et le souffle d’emmener le Mali loin si le Mouvement avait bénéficié de la confiance des militaires en août 2020. Aujourd’hui le M5-RFP mobilise sans doute plus que les partis et associations qui ont suivi IBK aveuglement dans sa gestion désastreuse mais force aussi est de reconnaître que le M5-RFP n’a plus sa superbe d’il y a un an.
Le temps ne joue, donc, pas en faveur du Gouvernement de Choguel Maïga mais lui-même comme son équipe gagneront des galons en faisant proprement deux à trois choses pour réussir le passage de témoin. Il est important déjà de redimensionner le calendrier électoral. D’où vient cette prétention pour le Mali qui organise laborieusement une élection de programmer 4 scrutins en trois mois ? C’est loufoque et irréaliste ! Une présidentielle et des législatives suffiront pour passer un cap. Le référendum et les locales (régionales et municipales) pourront attendre le temps de la maturation de l’organe unique des élections, car ce serait un authentique miracle d’avoir un outil crédible en si peu de mois.
Or, une mauvaise organisation des élections pourrait plonger le pays dans l’abîme. Des élections acceptables passent par un fichier électoral au plus près de la taille réelle des votants Maliens. Des pays plus peuplés que le Mali ont un électorat moins important que le nôtre. Burkina Faso : 6,4 millions d’électeurs pour une population de 20 millions d’habitants ; Niger : 7,4 millions d’électeurs pour une population de 23 millions d’habitants. Mali : 7,6 millions d’électeurs pour une population estimée à 19 millions d’habitants.
Le profil démographique de nos pays étant identique, le Mali a le fichier le moins fiable avec ses doublons, ses morts électeurs et autres anomalies. La Transition doit mettre de l’ordre dans le fichier électoral avant février. Le deuxième gage de crédibilité, c’est l’interdiction absolue du vote par procuration, faute de pouvoir en contrôler les abus. Le 3e critère de crédibilité, c’est l’instauration de peines de prisons pour la corruption électorale qui vicie tous nos processus électoraux au petit soir.
Les corrupteurs et les corrompus doivent être confondus dans les mêmes peines. Si à côté de cette tâche déjà énorme, la transition lance des poursuites contre les prédateurs des derniers publics, notamment ceux qui ont bouffé les sous de la Loi d’orientation et de programmation militaire, si elle réussit enfin à faire la lumière sur les victimes de la répression de juillet 2020, la mission sera remplie, même bien remplie. Nous voulons du concret, du sérieux et des résultats !
Bakary Diarra in Refondation du Mali