L”un des temps forts de la rencontre nationale des griots qui s”est déroulé vendredi et samedi aura été la table ronde sur le thème : "la problématique de l”éducation traditionnelle au Mali". La rencontre a eu lieu au Centre international des conférences, en présence du ministre de la Culture, Cheick Oumar Sissoko, des chefs de griots, et de représentants de la coordination des chefs de quartiers et des familles fondatrices de Bamako.
Le principal conférencier, Mamadou Fanta Simaga a expliqué que, dans notre société, les connaissances étaient transmises de génération en génération et de père en fils. "Notre éducation ne se trouve pas dans les écoles ni dans les bibliothèques", a-t-il fait observer, avant d”insister sur la valeur de l”éducation traditionnelle qui, selon lui, s”effectuait dans une école particulière, celle de la rue et de la famille.
Dans notre société, a-t-il rappelé, "horon" (noble) comme "djéli" (homme de caste) passent par la même école, celle de la maman. Il a insisté sur l”importance de la maman dans les premiers pas de l”individu. Après cette première école, a-t-il expliqué, l”individu passe successivement par différentes écoles qui l”initient à la vie en société. Dans certaines sociétés, il s”agit de l”école dite du "Ndomo" qu”il intégrait après l”âge de 7 ans et où il apprenait des valeurs comme la résistance et l”endurance. Par la suite, il est reçu dans le monde du "Komo", du "Nama" et de celui du "Ciwara" où, après la phase de la circoncision, il apprend les règles de bonne conduite et aussi certains secrets acquis notamment dans certaines écoles de magies et de sciences occultes.
Toutes ces étapes, a expliqué le conférencier, étaient très déterminantes dans l”éducation des jeunes à qui on inculquait dès le bas âge trois principes : se connaître soi-même, avoir confiance en soi et avoir l”estime de soi. Autant de valeurs qui manquent de nos jours à beaucoup de jeunes obnubilés par la culture occidentale jugée faussement comme la meilleure, a-t-il conclu.
Le constat de Mamadou Fanta Simaga est partagé par le représentant des familles fondatrices de Bamako. Le vieux Niaré qui, tout en félicitant les griots pour cette initiative, a regretté qu”elle ne soit intervenue plutôt. Vue la tendance actuelle de nos jeunes, plus attirés par le mode de vie occidentale, des initiatives de la sorte doivent se poursuivre, a ajouté le sage qui aura aussi beaucoup insisté sur l”important rôle que continuent de jouer les "djéli" dans le raffermissement de nos liens sociaux.
Après le conférencier et le représentant des familles fondatrices de Bamako, Barou Dembélé, maître de la parole, a choisi de mettre un accent tout particulier sur l”éducation des jeunes en milieu mandingue. Dans ce milieu, a-t-il expliqué, les "djéli" ont un rôle jamais contesté qui se manifeste à l”occasion des événements sociaux comme les baptêmes, les cérémonies de circoncision et de mariage. Dans le cas du mariage, a précisé Barou Dembélé, c”est le "djéli" qui demande la main des jeunes filles en se chargeant de remettre la cola à la belle famille.
Les intervenants étaient tous unanimes pour dire que notre méthode d”éducation traditionnelle vaut son pesant d”or. Elle a donc sa place aux côtés du système éducatif français imposé par la colonisation.
Un autre temps fort de cette grande manifestation culturelle des "niamakala" fut la grande symphonie musicale organisée samedi dernier au stade Mamadou Konaté. De nombreux artistes dont les vedettes les plus en vue comme Ami Koïta, Babani Koné, Mah Kouyaté n°1, Adja Soumano, Saramba Kouyaté…, ont fait des prestations au grand bonheur d”une foule nombreuse qui avait pris d”assaut les gradins du stade Mamadou Konaté.
Les griots ont souhaité l”institutionnalisation de cette manifestation par les pouvoirs publics. Autre décision importante prise à l”issue de la rencontre : les griots par la voix de notre confrère Ben Chérif Diabaté ont annoncé qu”ils soutiendront une éventuelle candidature de Amadou Toumani Touré à la prochaine élection présidentielle.
Oumar DIAMOYE
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