Le manque de transparence et de communication sur l’utilisation des ressources municipales, ne facilite pas la perception d’une taxe vitale pour les communes.
La taxe de développement régional et local (TDRL) a été instaurée en 1960 par le Code général des impôts et a coexisté avec l’impôt per capita. Ce dernier, institué sous la colonisation, a longtemps survécu (sans base légale) pour n’être finalement aboli qu’en 1992. Les recettes qu’il générait servaient à alimenter directement les caisses de l’Etat. La TDRL, comme son nom l’indique, est destinée au développement régional et local. Toutefois, elle ne joue pas son rôle actuellement puisqu’elle sert intégralement à financer le fonctionnement de la commune et non les investissements, ce qui explique d’ailleurs en partie les problèmes de recouvrement que connaît la commune avec cette taxe. En effet, la population n’en voit pas la pertinence puisqu’elle n’en perçoit pas la destination d’où un manque de confiance qui se solde par un refus de paiement.
Aux termes de l’article 289 du Code général des impôts : « La taxe de développement régional et local est due pour l’année entière par toutes les personnes âgées de plus de 14 ans, résidant au Mali au 1er janvier de l’année d’imposition ou y fixant leur résidence dans le courant de l’année d’imposition. » Certaines personnes comme les hommes de troupe, les indigents, les élèves et étudiants, etc., en sont exemptés. Bien que la somme soit modique (3000 Fcfa par assujetti), les communes dans leur ensemble éprouvent depuis toujours d’énormes difficultés pour mobiliser cet argent nécessaire au développement local. Ainsi, en Commune II, Mme Haïdara Sirantou Traoré, le chef de bureau comptabilité et gestion, note que durant les trois dernières années, le taux de recouvrement de la TDRL n’a jamais atteint 50%. En 2009, première année de l’exercice budgétaire de l’équipe dirigée par le maire Youssouf Coulibaly, l’état de recouvrement des TDRL affiche 20 millions de Fcfa sur une prévision de 89 millions.
En 2010, 3 millions entrent sur une prévision d’environ 21 millions. Au titre de l’exercice budgétaire en cours, l’évaluation à mi-parcours à la date du 30 juin, donne un état d’exécution de 613 816 Fcfa pour une prévision de 34,8 millions soit un taux d’exécution d’environ 2 %. C’est pourquoi, annonce Mme Haïdara Sirantou Traoré, la mairie II a initié un projet d’enrôlement des ménages. Les résultats de ce recensement devraient déterminer le nombre exact de personnes assujetties au payement de la Tdrl et la stratégie appropriée pour convaincre les citoyens de s’acquitter de cette obligation. En Commune V, Moussa Keïta, le receveur principal des recettes, relève que la Tdrl représenterait une formidable source de développement, même payée à 50%. Mais depuis des années, cette taxe n’est pas perçue. Au cours de ces deux dernières années, la commune a péniblement atteint un taux cumulé de 15 %. Elle a donc entrepris dernièrement une campagne d’information et de sensibilisation pour corriger cette anomalie. La situation n’est guère meilleure en Commune VI malgré son étendue et son peuplement très dense.
Selon Ténémakan Koné, le premier adjoint du maire, l’état des recouvrements de la TDRL serait même nettement moins bon dans cette commune. « Nous recouvrons dans l’année à peine 3% des Tdrl. Cependant, notre commune compte plus de 500 000 habitants. La collecte de la TDRL aurait dû nous apporter environ un milliard de Fcfa par an. Or, dans l’année on recouvre à peine aujourd’hui 10 millions Fcfa. Si les gens payaient normalement la Tdrl, notre commune aurait besoin de peu de chose pour s’épanouir Puisque les gens ne viennent pas payer d’eux mêmes leur taxes, nous l’imposons sur certains services de la mairie demandés par les usagers comme la célébration des mariages, les demandes d’autorisation de construire ou la création d’ouvrage de service de base comme les bornes fontaine », indique Ténémakan Koné. Ici aussi, des mesures sont à l’étude pour accroitre le taux de recouvrement. « Nous avons en projection l’enrôlement des personnes, les démarches ont déjà commencé, et l’idée a été validée lors des deux dernières sessions de la mairie.
D’ici à 2013, nous espérons que les choses vont commencer pour que même après notre mandat, ceux qui viendront, pourront continuer aisément avec la procédure », explique Ténémakan Koné. Selon certains observateurs le faible recouvrement de cette taxe résulterait de la mauvaise situation financière du pays, caractérisée par la pauvreté de la population et le peu de motivation des citoyens pour leur commune du fait du manque de dialogue franc et constructif entre les mandants et leurs administrés, du manque de transparence dans la gestion des ressources de la commune. A cela il faut ajouter l’insuffisance voire l’inexistence de mesures législatives susceptibles de contraindre les contribuables au payement de la taxe. Boubacar Traoré, un résident de la Commune IV, explique le peu d’enthousiasme des citoyens pour la TDRL par le manque de communication sur le sujet. « Je constate la mention TDRL sur les quittances de la mairie mais je ne sais pas de quoi il s’agit. Ils l’imposent sans nous en informer. Il va falloir qu’à la fin du mandat que les autorités communales dressent un bilan des réalisations de la commune pour que les gens voient comment est utilisé leur argent », suggère-t-il. Comme lui, nombre de citoyens ont de sérieuses appréhensions sur la destination de ces fonds. Nous avons tenté de remonter leurs craintes auprès des autorités de tutelle mais nos tentatives pour rencontrer les responsables communaux sur la question, sont restées vaines.