Les surnoms sont des noms affectifs, des codes, des qualificatifs que certains attribuent aux autres, le plus souvent à des proches ou amis. D’autres perdent leurs prénoms officiels au profit de leurs surnoms.
Groribinai, San finan, le Gendarme, inspecteur Derrick, Lieutenant, État-major, Ben Laden, Kadhafi, Gordon, L’As de Papa, etc. Tels sont quelques surnoms des chefs de famille ou maman craints, admirés, respectés ou secrètement aimés.
Selon le sociologue Mohamed Abdellahi El Khalid, les gens étaient surnommés pour garder l’image de certaines valeurs dans nos sociétés comme les fleuves ou les troncs d’arbres pour conserver l’esprit de cette chose et parfois certains noms font référence à la bravoure ou l’estime pour la personne. Mais, dit-il, de nos jours avec l’évolution du monde certains surnoms sont bannis. “Tu ne peux plus te permettre de surmonter ton enfant Barakolo, Djitoumou, etc. avec l’effet des réseaux sociaux voire l’évolution, tout a changé. Maintenant, les surnoms sont choisis à travers les feuilletons”, précise-t-il.
Ba Coulou, Ba Adama, Bourama fa, Kôkê sont entre autres des surnoms utilisés par la vieille école qui, au fil du temps, ont cédé la place à la nouvelle génération 2.0.
Alimatou Bagayogo, assise dans sa cour avec ses belles filles, le pied noirci de henné chapelet en main, constate : « nous avons l’habitude d’appeler nos époux par des noms significatifs qui faisait qu’ils se sentaient chefs, comme Baba, Kôkê, Ba Coulou, Sotigui ça peut paraître banale. Pourtant, cela leur rappelait leur devoir et également leur statut. Les jeunes aujourd’hui utilisent des surnoms qui ne sont pas de notre époque. Malheureusement certaines épouses ne surnomment leur mari que si elles ont des services à demander à ce dernier ce qui est désolant».
Selon le sociologue, les surnoms ont des avantages mais aussi des inconvénients. « Les surnoms étaient avantageux. Ils éduquent et poussent la personne à dépasser l’esprit du surnom », dit-il.
Sirani Djilla raconte sa mésaventure. « J’ai eu tous les surnoms bizarres à l’école tel que œil de grenouille, Lapinou parce que j’ai de gros yeux et des oreilles de Lapin. J’ai pu me retenir. Depuis, je suis allergique aux surnoms », regrette Mlle Djilla.
Cependant si surnommer son partenaire par des noms affectueux est plus courant, les jeunes ne cherchent pas loin la plupart du temps. Ils s’inspirent des séries Novelas, pour trouver un nom cajoleur. « J’ai choisi Abdie pour mon mari, qui est un nom arabe signifiant le royaume. Mais, ce n’est pas le seul pour flatter son ego. Je l’appelle aussi Aldjana, un nom qui m’a plu car il me rappelle toujours que mon paradis se trouve à ses pieds et je l’ai tiré d’une série. Quand on est en famille, je ne l’appelle pas ainsi au risque d’être la cible des mauvais yeux », explique Oumou Traoré, entrepreneuse.
Porter des surnoms est chose banale. Chacun en porte et les chefs de famille sont les plus surnommés, cela en fonction de leur tempérament. Certains ont des surnoms, mais ne le savent pas car, le plus souvent, c’est un code pour les membres de la famille.
Quand les enfants s’invitent dans la danse
Avec la complicité des épouses, chaque chef de famille a un surnom lié à son tempérament, ses habitudes ou encore son physique. Lala Thiero a surnommé son père. « Pour avertir les uns et des autres de la présence de papa, j’ai choisi Kadhafi car ce dernier était autoritaire et sa présence se remarquait tel un dictateur. Mais, notre maman l’appelait inspecteur Derrick. Il aimait poser des questions, attentif à nos faits et gestes et gare à celui qui était convoqué pour indiscipline », explique Mlle Thiero.
El Khalid explique l’importance des surnoms dans les relations. « Dans certaines communautés, les femmes donnent des surnoms pas le contraire. Cela dépend de leurs cultures et des contrées historiques ».
Oumou Fofana