Depuis la mort de l’infirmier de la clinique Pasteur de Bamako, le 11 novembre courant, la fièvre à virus Ebola n’a cessé d’occuper le devant de l’actualité dans notre pays, contraignant les autorités à faire de la lutte contre ce virus une priorité, voire la priorité des priorités. Le président Ibrahim Boubacar Kéita s’est engagé personnellement dans la campagne de lutte contre le virus Ebola. Il a effectué des déplacements en Guinée et en Sierra Léone pour signifier son soutien et celui du peuple malien tout entier à ces pays durement touchés par l’épidémie. Il s’est rendu à la frontière Mali-Guinée, précisément à Kourémalé (coté malien), pour s’enquérir de l’état du dispositif sanitaire en ces lieux là.
Le Premier ministre Moussa Mara, lui, a visité les unités sanitaires hébergeant des personnes suspectées ou reconnues d’être porteuses du virus. Quant au Ministre de la Santé et de l’Hygiène Publique, Ousmane Koné, il a multiplié les rencontres et autres conférences de presse pour sensibiliser les populations maliennes dans le cadre de la lutte contre le virus Ebola.
Des informations sont véhiculées à longueur de journée par les médias d’État et privés pour vulgariser auprès des populations les dispositions à prendre pour se prémunir contre le mal. Tout cela est de bonne guerre dans la mesure où c’est le monde entier qui se mobilise pour vaincre l’épidémie dans les pays touchés. Désormais le Mali aussi compte parmi les pays touchés.
Il est vrai et indéniable que la fièvre hémorragique à virus Ebola est un mal qui répand la terreur en ce moment dans le société malienne et que les autorités doivent tout mettre en oeuvre pour juguler ce mal. Mais cela ne doit pas occulter les autres problèmes auxquels les pays fait face. Au nombre de ces problèmes de l’heure, on peut retenir essentiellement : 1) les surfacturations sur les marchés de l’avion présidentiel et des équipements militaires ; 2) les pourparlers d’Alger dont le document de synthèse est en train d’être rejeté par les partis politiques et la société civile ; 3) la corruption endémique qui sévit dans les sphères de l’État.
LA SURFACTURATION
Concernant les surfacturations, le Conseil d’Administration du Fonds Monétaire International (Fmi) doit se tenir dans quelques jours et c’est au cours de cette session que le Mali sera fixé sur son sort dans le cadre de la reprise totale de sa coopération avec cette institution de Bretton Woods. Il est vrai que le Mali a pu obtenir certains allègements pour la reprise de cette coopération, compte tenu du fait que les autorités du pays ont accepté de faire les audits des marchés controversés et ont publié les rapports desdits audits, qui ont été menés séparément par le Bureau du Vérificateur Général (Bvg) et par la Section des Comptes de la Cour Suprême.
S’ajoute à cela, la modification de l’article 8 du code des marchés publics au Mali. Ce fameux article dont se prévalaient certains responsables pour contourner les procédures de passation de marché sous le prétexte de “secret défense”. Même avec ces efforts fournis par les autorités maliennes, le Fonds Monétaire International reste insatisfait. Il exige plutôt que soient sanctionnés les fautifs dans les malversations qui ont entouré ces marchés controversés.
Le samedi 08 novembre courant, au cours d’une conférence-débat organisée à la Maison de la presse à Bamako, Anton Op Beké, le représentant du Fmi au Mali, a dit sans ambigüité que “le Fmi attend d’ici le 1er décembre le rapport des sanctions contre les coupables dans les dossiers de l’avion présidentiel et des équipements militaires… Nous attendons le rapport des sanctions d’ici le 1er décembre, c’est la condition sine qua non après la publication des rapports”.
On peut dire que le Fmi s’est prononcé clairement et qu’à présent, la balle est dans le camp du pouvoir malien. Même si, après la publication des rapports d’audits, certaines voix se sont élevées dans le sérail du pouvoir pour fustiger le rapport produit par le Bureau du Vérificateur Général. Ces voix veulent faire croire qu’il n’y a pas eu de surfacturation dans les deux marchés incriminés. Mais cela est loin de convaincre les Maliens.
D’ailleurs il n’y a pas que le Fmi qui demande des sanctions. Il y a aussi une grande majorité de maliens, en témoigne la grande marche organisée la semaine dernière par une coalition d’associations de jeunes pour demander la démission des Ministres impliqués dans les dossiers de surfacturation et du virus Ebola.
LE DOCUMENT PROPOSÉ PAR LA MÉDIATION
En ce qui concerne les pourparlers d’Alger, le document de synthèse proposé par la médiation algérienne est loin de rencontrer l’assentiment des partis politiques et de la société civile. Pourtant le Gouvernement malien s’est félicité de la teneur de ce document, tout simplement parce qu’il ne mettrait pas en cause les “lignes rouges” définies par le président de la République. A savoir l’intégrité territoriale, la laïcité et la forme républicaine de l’État.
Les Maliens, après avoir pris connaissance dudit document, l’ont rejeté pour plusieurs insuffisances et lacunes. Il faut dire que le Gouvernement, après avoir reçu le document, s’est muré dans un silence, avant de se décider à le publier, suite aux réclamations faites par certains leaders de la classe politiques et de la société civile.
Pour la présentation de ce document de synthèse, les Ministres ont sillonné tout le pays à l’exception de la région de Kidal, en un temps record, puisque la reprise des négociations était programmée pour le 20 novembre. Là encore, il y a lieu de se demander si le Gouvernement malien a disposé d’assez de temps pour faire une analyse objective des différentes préoccupations émises par les populations lors des tournées des Ministres dans les régions et lors des rencontres de restitution du document de synthèse à Bamako.
Le quatrième “round” des négociations d’Alger a commencé le 20 novembre courant et les différentes parties sont censées y présenter les amendements portés par leurs mandants au document de synthèse. En tout cas les populations maliennes, par l’entremise des partis politiques et des organisations de la société civile, se sont prononcées en rejetant en très grande partie les dispositions contenues dans le document de synthèse. Reste maintenant au Gouvernement et à ses délégués aux négociations d’Alger d’être en droit de défendre valablement la position des Maliens, dans ce dossier des négociations d’Alger.
LA CORRUPTION
S’agissant de la corruption et du népotisme qui sévissent dans les sphères de l’État, le président Ibrahim Boubacar Kéita avait promis aux Maliens de faire de 2014 une année de lutte contre la corruption et la délinquance financière. Hélas, les Maliens sont restés sur leur faim, car depuis l’accession du président IBK à la magistrature suprême de notre pays, aucune action tangible, dans le cadre de la lutte contre la corruption et le népotisme, n’a été posée à la satisfaction des maliens. Or en toute objectivité, on est en droit de dire que le président IBK doit bien cela à ceux qui l’ont plébiscité. Le capital “confiance” que les maliens lui ont accordé s’est beaucoup amenuisé.
Compte tenu de tous ces problèmes également importants, il ne sied pas au pouvoir d’État de focaliser tous ses efforts dans la seule lutte contre le virus Ebola, en reléguant au second plan les autres pans de la vie sociale et économique du pays. D’ailleurs ce mal (virus Ébola) n’aurait jamais pu atteindre le Mali si les autorités avaient été vigilantes au moment où il le fallait. Surtout depuis le premier cas importé de la Guinée voisine et auquel a succombé la petite fille de 2 ans à Kayes.
Mamadou GABA
Ibk Traitre
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