Jeudi, 8 août dernier, plusieurs otages aux mains des djihadistes ont été libérés. Parmi eux, le chef de file de l’opposition malienne et président du parti de l’Union pour la République et démocratie (URD), Soumaïla Cissé, qui avait été enlevé en mars 2020, dans le nord du pays, alors qu’il était en campagne pour les élections législatives.
« Physiquement, je n’ai pas de problème. Je me sens bien. Mais c’est surtout que je suis très heureux. Être privé de liberté pendant de longs mois, c’est quelque chose à ne pas vivre. Et je crois qu’aujourd’hui, l’une des valeurs qu’il faut le plus défendre, c’est la liberté. Et aujourd’hui, il faut être sûr d’une chose, c’est qu’être libre est un vrai privilège. Je crois qu’en réalité, personne n’a le droit de l’oublier. Ceci dit, je suis heureux d’être Malien, parce que, pendant ces mois, j’ai eu énormément de solidarité. C’est un peuple de culture, un vieux pays qui met souvent l’aspect humanitaire par devant », tels ont été les premiers mots du chef de file de l’opposition, après son arrivée à Bamako.
Bien vrai que des zones d’ombre entourent leur libération, mais cela a été un ouf de soulagement pour les familles des ex-otages et proches, notamment le chef de file l’opposition, Soumaïla Cissé, Sophie Pétronin et deux autres Italiens.
Selon le spécialiste des mouvements djihadistes sur France 24, Wassim Nasr, on dispose tout de même de nombreux éléments de réponse : « On sait que la libération de Soumaïla Cissé a été décidée dès le mois d’avril. La présidence malienne a d’abord désigné un intermédiaire pour établir un contact avec les ravisseurs afin de trouver une solution à la libération de l’opposant malien. L’accord a été dès le mois d’août mais des détails restaient à régler”. Et d’ajouter que, dès lors, le sort des autres otages a pu être évoqué : “Sophie Pétronin a ainsi profité de l’accord établi pour Soumaïla Cissé. Le sort de ces deux otages s’est lié dans la dernière phase de négociation. Sa libération arrangeait tout le monde”, les autorités françaises, soucieuses de classer ce dossier, mais aussi les djihadistes. “Ils voulaient la libérer depuis un moment tout en espérant en tirer profit, non pas contre une rançon, mais contre la libération de djihadistes.” Les deux otages italiens ont également bénéficié de cette tractation.
Pour rappel : à la tête d’une forte délégation, Soumaïla Cissé se rendait à Koumaira, dans le cercle de Niafunké (région de Tombouctou) lors de la campagne pour les élections législatives de 2020 quand les hommes armés se sont emparés de lui. Les autres membres de la délégation sont libérés quelques jours après, mais lui était encore entre les mains de ses ravisseurs jusqu’à ce jour. Son garde du corps a été tué lors de la prise d’otages. Amadou Kolossi, le maire de Koumaira, la ville où M. Cissé devait présider un meeting a, lui aussi, été kidnappé après Soumaïla Cissé. Mais il avait été libéré le 10 mai 2020.
Une cellule de crise avait été mise en place par le régime d’IBK. Il était présidé par Ousmane Issoufi Maïga, ancien Premier ministre. Ce comité avait pour mission, selon le gouvernement, “d’assurer la coordination de l’ensemble des actions en vue de la libération du chef de file de l’opposition politique”.
Le jour des législatives, quatre jours après le rapt, le président Ibrahim Boubacar Kéita assurait : “Nous souhaitons de tout cœur que Soumaïla Cissé retrouve très vite la liberté. Nous ne ménagerons aucun effort pour obtenir sa libération”.
Le premier vice-président de l’URD était parmi aussi les membres de cette cellule, selon le secrétaire à la communication de l’URD.
“Soumaïla Cissé est en vie”. C’est l’annonce qui avait été faite par le président Ibrahim Boubacar Keïta, le 16 juin 2020, alors que M. Cissé entrait dans son troisième mois de détention.
IBK avait révélé aussi que les autorités détenaient des “preuves de vie”. “Nous connaissons ses ravisseurs. Et s’il plaît à Dieu, il reviendra bientôt”, a dit le chef de l’Etat devant des responsables et des membres de la société civile. Mais jusqu’à sa chute, le président Keita n’a pas réussi à faire libérer son adversaire politique.
Les réactions après la libération
L’Ambassade des États-Unis à Bamako adresse, le mardi 6 octobre dernier, ses meilleurs vœux à la famille de Soumaïla Cissé, maintenant qu’ils sont réunis. La nation malienne a longtemps attendu ce jour et le peuple malien a gardé M. Cissé et sa famille dans leur cœur et dans leurs prières.
Son enlèvement pendant la campagne électorale a mis en évidence les sacrifices parfois endurés par ceux qui soutiennent la démocratie. Les États-Unis condamnent les groupes terroristes qui cherchent à empêcher les Maliens d’exercer leurs libertés.
L’Union pour la République et la démocratie (URD), le parti politique de Soumaïla Cissé, a remercié vivement, à travers un communiqué, toutes celles et tous ceux qui se sont investis pour obtenir la libération de leur président. « Militants, sympathisants, amis, classe politique et société civile, autorités politiques du Mali, autorités coutumières et religieuses, leaders d’opinion, activistes, artistes et communicateurs traditionnels, artisans, sportifs, journalistes et hommes de médias, femmes, jeunes et vieux, Maliens de l’intérieur comme de l’extérieur, partenaires du Mali, organisations sous régionales, africaines et internationales, personnalités étrangères, parlementaires et toutes les bonnes, votre détermination, sans faille, votre mobilisation exceptionnelle et vos prières ont été couronnées de succès », a déclaré la formation politique de M. Cissé suite à sa libération.
Quant au représentant de l’Union africaine (UA) au Mali, Pierre Buyoya, il s’est dit très heureux d’apprendre que l’honorable Soumaïla Cissé est libre. « C’était au cours du Conseil de paix et de sécurité sur le Mali. Le président de la commission de l’Union africaine a tenu à saluer cette libération ». « Félicitations à tous ceux qui se sont investis dans cette action salutaire », a-t-il déclaré.
Mohamed Sylla