Il y a bien des années que le Mali est confronté à un phénomène qui remet en cause notre éducation, qui piétine nos valeurs sociétales et nous guide vers de mœurs légères : la consommation d’excitant et plus particulièrement les boissons alcoolisées. Le plus inquiétant est que la majeure partie des consommateurs sont les jeunes et les adolescents (garçons et filles) qui ne prennent même plus la peine de se cacher.
Bamako, ville des Trois (3) Caïmans, est un carrefour commercial ou se bousculent toute les ethnies et religions du Mali. Eduquer son enfant dans ces conditions devient problématique, vu qu’il est au contact de personne de divers horizons (bonnes ou mauvaises). Si cette fréquentation est mauvaise elle influencera votre enfant et le détournera du droit chemin.
De nos jours, dans la capitale malienne, il devient de plus en plus difficile de rencontrer un adolescent non-consommateur de l’alcool, surtout en boite de nuit. Certains pensent que consommer uniquement en boite de nuit ne suffit pas. C’est ainsi que les débits débordent progressivement des espaces récréatifs pour être consommé partout et mettre en péril l’avenir des jeunes et le devenir de la nation.
Moussa Diabaté, un jeune commerçant raconte : «un homme qui ne boit pas est considéré comme un ‘Yeux clairs’ (une personne qui ne consomme aucun existant, NDLR). On boit souvent pour oublier nos peines et nos douleurs. En plus, l’alcool est bon pour la santé ». La dépravation atteint ainsi son paroxysme. La morale, la dignité et l’intégrité sont bafouées par cette jeunesse friande d’alcool, de drogue et d’autres pratiques non catholiques. La pauvreté, le chômage et le désespoir sont essentiellement les maux qui poussent les jeunes vers ces extrêmes. Barda a commencé à prendre l’alcool à l’âge de 20 ans. Il a intégré le milieu, dit-il, par le biais d’une mauvaise fréquentation. «Quand tu fréquentes des gens qui consomment, il y a de fortes chances qu’ils t’entraînent. C’est ce qui m’est arrivé en goûtant à l’alcool. Aujourd’hui, je suis devenu accroc, puisque je ne peux pas rester toute une journée sans boire. C’est pourquoi nous disons aux jeunes, qui n’ont pas encore découvert le milieu de s’en éloigner parce qu’il n’y rien de bon», conseille-t-il.
Il n’est pas rare de voir des jeunes s’adonner à des compétitions éthyliques, confie Salimata Diarra, étudiante, en expliquant que les garçons jouent à la concurrence en boite de nuit et comparent leurs prouesses à la boisson. «Cette concurrence les pousse à dépasser les limites. Or, l’alcool nuit gravement à la santé», déplore-t-elle. Pour d’autres, c’est la quête du plaisir et du sentiment de dépendance qui les poussent à emprunter ce chemin. Selon Allaye Guirou, les jeunes ont surtout perdu le sens de la distraction au point de confondre distraction et suicide par excès de consommation de l’alcool.
Or, se procurer de l’alcool est un jeu d’enfant puisqu’il se vend partout à Bamako : dans les bars, les restos, les maquis, les points de vente, les hôtels et les stations-services, etc. Les débits éthyliques sont ainsi accessibles à tous, au su et au vu de tout le monde et à des prix dérisoires allant de 100 FCFA à 500 FCFA. En outre, toutes les occasions sont propices pour en profiter : sorties entre amis, soirées de mariage, fêtes d’anniversaire, passage dans une station-service, etc. Alain Coulibaly, un étudiant, confie que sa provision de gin ou de canettes de bière provient soit des bars soit dans les boutiques d’alimentation.
Il se pose dès lors la question du rapport à l’alcool qui varie selon les religions et les sociétés. Certaines l’acceptent et d’autre interdisent catégoriquement leur fidèle de s’y approcher. Le bouddhisme et l’islam la condamnent l’alcool parce qu’il fait perdre la maîtrise de soi. En effet le Prophète Mohammed (paix sur lui), dans son Hadith Sounan Ibn-Majah Livre des Intoxicants a dit: ‘’Tout ce qui peut intoxiquer en grande quantité est interdit en petite quantité». Il n’y a donc aucune excuse pour un “petit verre”.
Non seulement ceux qui boivent de l’alcool sont maudits, ceux qui traitent avec de façon directe ou indirecte sont également maudits par Allah.
Aussi le Prophète Mohammed (paix sur lui) a dit « Allah a maudit dix personnes qui traitent avec l’alcool. Celui qui le distille, celui pour qui il est distillé, celui qui le boit, celui qui le transporte, celui chez qui il est transporté, celui qui le sert, celui qui le vent, celui qui profite de l’argent obtenu par sa vente, celui qui l’achète pour lui-même et celui qui l’achète pour quelqu’un d’autre”. Cela montre à quel point boire de l’alcool est interdit.
Par-delà son interdiction par a religion musulmane, l’abus d’alcool est très nocif pour la santé de l’homme et peut engendrer de graves maladies. Le Pr Mamady Mory Keîta soutient par exemple qu’ «Avec un verre, on est déjà en danger”. L’alcoolisme chronique peut être longtemps sous-estimé car celui qui boit trop et souvent donne l’impression de bien le supporter. Pour la personne alcoolique, l’alcool devient l’un des piliers de sa vie et il lui est difficile d’envisager de vivre sans.
De même, l’usage nocif de l’alcool entraîne dans le monde 3,3 millions de décès chaque année, soit 5,9% des décès, selon l’Organisation Mondiale de la Santé et est responsable de plus de 200 maladies dont les troubles mentaux et comportementaux, des maladies non transmissibles majeures telles que la cirrhose du foie, certains cancers et des maladies cardiovasculaires ainsi que des traumatismes résultant d’actes de violence et d’accidents de la circulation.
Nonobstant, l’alcool est devenu le vecteur de retrouvailles entre jeunes gens, qui justifient leur dépendance par des problèmes d’ordre psychologies et la pauvreté. Il convient d’agir sur les consciences des jeunes pour qu’ils sachent qu’ils sont les chefs de famille et les hauts cadres de demain.
Ali Poudiougou