Les femmes du mouvement Appel citoyen pour la Réussite de la Transition (ACRT) ont célébré la journée internationale de la femme, le samedi dernier, au CICB. Du haut de cette tribune, l’économiste Soya Djigué a brossé la situation socio économique du pays où les femmes souffrent le plus.
C’est en sa qualité de représentant des jeunes de l’ACRT d’Issa Kaou Djim que l’économiste Soya Djigué a pris la parole aux festivités anticipées du 8 mars avec comme marraine Mme Djim Fatoumata Dicko.
L’économiste Djigué ne pouvait trouver meilleur thème que celui de la situation économique de notre pays. Dire que l’économie de notre pays est loin d’être reluisante est une lapalissade dans l’explication de M. Djigué. « En 2020, plus de 800 000 personnes supplémentaires ont fait leur entrée dans la pauvreté au Mali. Fort malheureusement, ce sont en majorité des femmes qui sont frappées par cette catastrophe », a lancé Soya Djigué, dès l’entame de ses propos. Une situation qu’il qualifie « d’injuste » en ce sens que les femmes sont les piliers de notre société. Il cite à juste titre l’écrivaine guadeloupéenne, Marise Condé, qui a passé une partie de sa vie au Mali et qui écrivait dans un de ses livres, « s’il n’y avait pas de femme, il n’y aurait pas de Mali ».
- Djigué pense qu’il faut corriger cette grosse injustice pour que les femmes, surtout en milieu rural, puissent vivre des fruits de leurs efforts. Pour avoir visité certaines mines d’or à Kéniéba et Sadiola, l’économiste Djigué estime ce sont les femmes qui souffrent le plus dans ces zones minières, exposées à des maladies et la promiscuité. « Je ne comprends pas comment les populations de Kéniéba peuvent endurer la pauvreté avec la présence de 5 mines d’or dans cette localité ? », juge-t-il.
Comme solution à la souffrance des femmes pour un avenir meilleur, Soya Djigué renvoie les femmes du Mali, en l’occurrence les femmes leaders à leurs responsabilités, de se battre pour leurs sœurs afin qu’elles recouvrent leur liberté et tous leurs droits. Ces femmes leaders doivent selon lui, être des porte-étendards pour leurs sœurs et leurs filles dans la longue et difficile lutte pour l’émancipation des femmes et leur accès à tous leurs droits. Toujours à en croire M. Djigué, une part importe revient aussi aux autorités, à travers la bonne gouvernance et une distribution saine de la justice, un meilleur accès à une meilleure école pour les filles et un investissement massif dans les infrastructures sanitaires.
Parlant de bonne gouvernance, Soya Djigué la place dans le cadre de la lutte contre la corruption. « Tout le monde le sait, au Mali c’est 1000 milliards de F CFA qui disparaissent dans la nature chaque année, sans que l’on ne sache ni par qui, ni pour quoi. Imaginez un instant les problèmes qu’on pourrait résoudre avec 1000 milliards de F CFA », et d’ajouter, « il faut sans délai poursuivre les coupables de la corruption. La Loi de Programmation militaire (Lopmi) qui a englouti plus de 1200 milliards de F CFA ne peut pas tomber dans les oubliettes. Un tel crime ne peut être sans conséquence. Ainsi, il faudra lancer sans délai un audit massif des entreprises publiques. Tous les contrevenants doivent passer dans la nasse du droit et de la justice. Nous le devons à nos martyres qui ont laissé leur vie pour qu’émerge un Mali nouveau et aussi à nos blessés dont certains sont handicapés à vie », tranche-t-il.
Pour une distribution saine de la justice, l’économiste conseille l’égalité de tous devant la loi au risque de créer deux classes citoyennes avec des conséquences très dramatiques.
Rationaliser nos dépenses publiques pour gagner 1000 milliards de F CFA de plus
La scolarisation des filles et l’alphabétisation des femmes constituent, aux yeux de M Djigué, les meilleurs moyens d’améliorer la santé, la nutrition et l’éducation de la famille et surtout de réduire la pauvreté donc l’instabilité politique. Le quatrième et dernier axé développé par M. Djigué est la santé. Il préconise un investissement massif dans la santé. Selon ses constats, les femmes maliennes rencontrent de nombreux obstacles au quotidien pour recouvrer la santé. « Chaque jour, il y a des femmes qui décèdent à cause des complications liées à la grossesse, à l’accouchement. C’est malheureux qu’on en soit là encore en 2020 », plaide-t-il.
La solution qu’il donne à cet effet est la construction et l’équipement des centres de santé. Notamment dans les zones rurales où vivent 75 % de femmes et sensibiliser la communauté de soigner les femmes aussi bien que les hommes.
Soya Djigué préconise comme remède à tous ces fléaux, de rationnaliser nos dépenses publiques, de faire face au gaspillage des deniers publics, ce qui, selon lui, nous permettra de gagner chaque année 1000 milliards de F CFA de plus pour construire des infrastructures sociales de base dans tout le Mali. « 1000 milliards de F CFA c’est 1000 fois l’aide au développement », indique-il.
Abdrahamane Dicko