Seydou Badian face à l’imminence d’’une nouvelle crise institutionnelle : La voix d’un faux-repère

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Docteur Seydou Badian Kouyaté

Devant l’imminence d’un vide constitutionnelle longtemps ignoré, des voix commencent à rompre le silence pour en reconnaitre l’évidence et même s’illustrer par des propositions pour conjurer le mal. Sur la question, Seydou B Kouyaté aurait pu être une référence s’il ne s’était jadis pas disqualifié par  les postures complaisantes qui tranchent avec la sagesse.

Seydou Badian dispose-t-il encore de la notoriété nécessaire pour servir de référence aux Maliens ? Cette question se justifie depuis que le célèbre romancier et ex-ministre de la 1ère République, du haut de ses 89 ans, a choisi de rompre le silence sur la situation socio-politique et sécuritaire du Mali. Se fondant sur l’insécurité plus contagieuse que résiduelle – et marquée par des tueries incessantes au centre et au nord -, il a suggéré de surseoir à la présidentielle de 2018 et de recourir à un gouvernement d’union nationale. C’était à la faveur d’une conférence de presse restreinte, mercredi dernier, dans un cadre restreint  à son domicile et d’une vue tout aussi restreinte.En appui à sa suggestion, qui ne manque ni  de fondement ni de motivation sous-jacente, il soutient que le cumul des fonds nécessaires à l’organisation de l’élection présidentielle pourrait donner nouvelle vie à l’éducation, à la santé, à l’armée et à la sécurité. Et de proposer une union sacrée du pays toutes tendances politiques confondues. Aucune indication cependant sur les modalités de gestion de cette période transitoire ni sur la personne habilitée à la conduire encore moins sur ceux qui sont censés désigner ces dirigeants de circonstance. Comme qui dirait : Seydou Badian appelle les concitoyens à reprendre le chemin de la rue, à battre le pavé comme naguère du temps des protestations de masse contre le projet de le révision constitutionnelle. Puisqu’en définitive, surseoir à l’élection présidentielle équivaudrait bel et bien à l’avènement d’une crise institutionnelle, qui requiert une transition pour gérer les affaires courantes avant de solutionner le vide. Puisqu’en définitive les textes sont clairs au Mali : une transition n’est envisageable, sauf catastrophe institutionnelle comparable à l’insurrection militaire de 2013, qu’en cas de vide constitutionnel occasionné par l’incapacité du président en exercice. Lequel des deux scenarii le doyen préconise-t-il pour le pays qu’il prétend aimer et sachant à quoi a ressemblé la dernière intervention militaire au Mali ?  Quoi qu’il en soit, il Il y a lieu, d’ores et déjà, de s’interroger sur les échéances de cette transition tacitement proposée par le vieux socialiste, qui n’en pipe mot du reste.

Autre questionnement : un gouvernement avec une légitimité populaire limitée est-il suffisamment qualifié pour ramener la paix pour laquelle le régime régulier et légitime d’IBK aura tout tenté sans réussir à faire bouger les pions vers un retour à la République ? Des agitations de menace à l’expérimentation non concluante de l’option militaire, des supplications de séparatistes et même des terroriste  au financement de rencontres et fora, en passant par les plaidoyers en tous genres, etc.

Reste une autre voie inexplorée que semble préconiser – sans le dire ouvertement –  le «Sage», lors de sa sortie comparable à une bouée de sauvetage au profit du soldat IBK. Il s’agit d’un salut public découlant  de la conscience partagée que seule une entente nationale peut permettre de sortir de l’engrenage ou le pays est plongé depuis plus d’une demi-décennie. L’option est envisageable sauf qu’il a l’inconvénient d’émaner d’une voix désormais disqualifiée pour indiquer aux concitoyens le chemin à suivre. Et pour cause, il s’agit de la même option qui nous aurait épargné tant de gâchis et de galvaudage si des voix comme celle de Seydou Badian avaient retenti en son temps pour arrêter l’escalade de dérives ayant entrainé la nation vers les précipices. Au premier rang desquelles figure le putsch insensé du Cndre auquel l’ancien ministre de Modibo Keïta avait tacitement accordé sa caution par un silence de Ponce Pilate, sans doute pour les dividendes personnels ou intérêts partisans qu’il tirerait de l’alternance politique qui se dessinait. Or, en son temps comme de nos jours, la sagesse et la raison voudraient qu’un pays en guerre et menacé d’invasion fasse exceptionnellement l’économie de calculs politiciens irrationnels – dont  aucune force politique ne peut tirer profit – pour faire face à l’essentiel. Au lieu de quoi, le Père de l’Hymne national du Mali ne s’était point distingué de la mêlée qui a entretenu les querelles politiciennes sur fond de règlements de compte, les déchirures et adversités inconscientes qui rendaient la patrie méconnaissable d’hérésie collective aux yeux de tous ceux qui surestimaient le génie malien. Conséquence : la transition, obtenue et conduite à coups de laborieux arrangements, d’interprétations polémiques et de vives contestations autour de l’Accord-cadre de sortie de crise, ne pouvait déboucher que sur l’installation d’un pouvoir sans assises solides. Le tir aurait pu se redresser si les tenants de ce pouvoir avaient une nette perception du contexte et de la teneur de leur mission. Mais là encore les pulsions partisanes et pouvoiristes devaient l’emporter sur le devoir de rassemblement au nom de l’essentiel, sans qu’aucune voix autorisée ne s’élève pour indiquer l’option la mieux adaptée à la situation du pays. Il n’était pourtant nul besoin de verser dans les arts divinatoires pour savoir que le contexte, plus que jadis avec le consensus sous ATT, nécessitait plus une fédération des compétences pour arrêter le processus de disparition d’un pays qu’une gouvernance basée sur la dichotomie classique opposition – majorité.

Autant dire que ceux qui prétendent au rôle de repère en avait raté l’occasion, si bien qu’ils ne peuvent être aujourd’hui que des faux-repères. Or il est plus préférable de manquer de repère que d’en avoir de faux.

Amidou Keita

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