Scandale autour de la révision de la Constitution : Une loi qui modifie un texte juridiquement inexistant !

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C’est du jamais vu à l’échelle de la planète entière en matière de modification constitutionnelle. Quel déshonneur pour notre pays que cette mouture indigeste de la loi n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 portant révision de la Constitution du 25 février 1992 telle que publiée dans le Journal Officiel du 7 juin 2017 !

La loi constitutionnelle censée uniquement modifier la Constitution du 25 février 1992, modifie également un texte constitutionnel tombé du ciel, à savoir le projet de loi portant révision de la constitution qui ne peut aucunement lui servir de texte de référence, car n’ayant aucune valeur juridique, c’est-à-dire inexistant dans l’ordonnancement juridique du pays.

A la lecture de la loi n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 publiée au Journal Officiel, on saisit toute la portée de l’Avis n°2017-01/CCM/REF du 06 juin 2017 de la Cour constitutionnelle qui déclare en substance : « La présente loi portant révision de la Constitution devrait renvoyer plutôt aux articles révisés de la Constitution du 25 février 1992 qu’aux amendements portés au projet de loi par la Commission des lois constitutionnelles, de la Législation, de la Justice, des Droits de l’Homme et des Institutions de la République de l’Assemblée nationale ». A travers cette affirmation apparemment anodine, la Cour a soulevé en réalité la grave question de la constitutionnalité même de la version de la loi constitutionnelle soumise à son examen.

En la forme, la loi n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 portant révision de la Constitution du 25 février 1992 est totalement inconstitutionnelle et défie toutes les règles de la légistique.

Du point de vue formelle en effet, une loi modificative doit se référer aux articles de la loi originale objet de cette modification et non pas aux amendements portés au projet de loi par une Commission parlementaire. Pourtant, la loi n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 modifie non seulement la Constitution du 25 février 2017, mais aussi le projet de loi de révision constitutionnelle du gouvernement. C’est tout simplement pathétique et en dit long sur le niveau de culture juridique des instances officielles de ce pays.

Nous invitons le lecteur à cette excursion au cœur de cette loi de révision constitutionnelle n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 de la honte

A l’article 1er, on peut y lire : « Le Préambule de la Constitution du 25 février 1992 est modifié comme suit… ».

Il résulte clairement de cet article 1er que le texte constitutionnel qui est l’objet de la modification est bien la Constitution du 25 février 1992. Rien de surprenant en fait à ce niveau, puisqu’on sait que la révision concerne effectivement la Constitution du 25 février 1992.

A juste titre, cette même référence aux modifications de la Constitution du 25 février 1992 est maintenue aux articles 3, 4, 5, 6,9, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18.

Mais là où le bât blesse et où ne se retrouve plus dans la logique juridique du texte officiel de la loi constitutionnelle, c’est lorsque le législateur constitutionnel contre toute attente et dans l’incohérence absolue, renvoie au projet de loi de révision constitutionnel, un texte constitutionnel juridiquement inexistant dont les modifications sont quand même annoncées !

Ces énormités juridiques de la loi de révision constitutionnelle n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 constituent véritablement un déshonneur pour la République qui se permet une telle légère dans sa Loi fondamentale.

A l’article 2, on annonce : « Les articles 99 à 122 du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 deviennent respectivement articles 1 à 24 ».

A l’article 3-TITRE II DE L’ETAT ET DE LA SOUVERAINETE, il est écrit : « Les articles 1,2,3,4, 5 du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 deviennent respectivement les articles 25, 26, 27, 28 et 29 ».

Article 4-TITRE III DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE : « Les articles 6 à 29 du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 deviennent respectivement les articles 30 à 53 ».

Article 5-TITRE IV DU GOUVERNEMENT : « Les articles 30, 31, 32 et 33 du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 deviennent respectivement les articles 54, 55, 56 et 57 ».

Article 7TITRE VI DES RAPPORTS ENTRE LE PARLEMENT ET LE GOUVERNEMENT : « Les articles 47 à 74 du projet de loi portant révision de la Constitution du 25 février 1992 deviennent respectivement les articles71 à 97 ».

Au-delà de son contenu également bourré d’incohérences et d’anachronismes juridiques insoutenables, ces graves irrégularités d’ordre formel condamnent définitivement cette loi de révision constitutionnelle n°2017-31/AN-RM du 2 juin 2017 qui propulsent notre pays dans les abîmes de la véritable République bananière dans tous ses états déshonorants qui n’est même pas capable de présenter sa Loi fondamentale dans la forme digne de l’Etat de droit.

Dr Brahima FOMBA

Chargé de Cours à l’USJP de Bamako

 

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8 COMMENTAIRES

  1. Ce texte n’est pas bon du tout je l’ai senti sans même l’avoir lu, il pue le bricolage, le ramassi, la précipitation et le forcing. Ils trouveront en tout cas le peuple debout et déterminé aussi a défendre son bien si chèrement acquis en mars 1991. AN TEE AN BANAN Touche pas a MA CONSTITUTION et surtout lis bien l’article 118 car tu as une interprétation pas exacte de cet article monsieur le prési.

  2. C’est le peuple qui t’a choissi et non le contraire.Qui aime son peuple l’ecoute.Dieu ne dort pas sale traite……..

  3. Vivement ce genre de contribution du Dr Fomba pour éclairer la lanterne des électeurs. L’ORTM doit inviter sur son plateau pour 1 débat contradictoire Dr Fomba et d’autres juristes (par exemple le président de la commission loi à l’Assemblée) qui defendent le oui. Le peuple s’aura se decider après.

  4. Nous invitons les soldats maliens,patriotes, à barrer la route à l’imposture.
    Vive le Mali!
    Vive la République

  5. C’est vrai!
    Moi-même, je n’ai pas compris ces multiples renvois à la constitution de février 1992.
    Par ailleurs un même article est répété deux fois : 80 et 90.
    Bref c’est un texte mal présenté dans sa forme, il n’a pas bon goût…

  6. Dr FOMBA, ne croyez pas que ces gens de la révision constitutionnelle veulent quelque chose de cohérent, non, non, ils veulent seulement faire plaisir à IBK coûte que coûte et c’est tout. Il faut retenir que IBK ira jusqu’au bout en bravant ce camp du non, même au prix de la vie de certains maliens. Nous sommes dans l’œil du cyclone et la situations semble irréversible même si cela doit coût la destruction du régime d’IBK. La bataille est rude et très rude et le camp IBK va sur la base de l’irrationnel et personne ne peut les empêcher de réaliser cette aventure périlleuse. Il faut sans nul doute s’attendre à l’amorce d’un processus de mise en route de la quatrième République, cela est sans équivoque.

  7. Fomba où va le mali ? Où sont nos juristes ? Cette observation équivaut à un suicide pour notre pays.
    J’ai honte et pendant ce temps IBK inconscient ,insouciant et irresponsable se gargarise de fierté en disant qu’il va faire voter cette maudite constitution

  8. Dr Fomba merci pour votre contribution de qualite. Vraiment le peuple a bien compris. Les ouvriers mis à la tâche sont aveuglés par l’argent. Ils vomiront cette fois ci et l’argent et du sang. IBK dit ” Si j’ai retiré le projet de révision constitutionnelle , cela veut dire que j’ai trahi mon pays”. Le ridicule ne tue plus au Mali. De sa prestation de serment à nos jours, IBK a toujours trahi le Mali. Il n’a jamais honoré a une seule promesse de campagne. Comment peut-il parler de trahison du Mali. C’est vrai qu’il est sourd et aveugle, mais il sait au moins qu’il est isolé . Alors IBK, c’est la fin de votre règne qui s’est annoncee. Et pourtant le peuple t’a averti ! Chacun de nous est désormais entre les mains de sa maman.

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