Au Mali, la polémique enfle autour de l’état de santé du président Ibrahim Boubacar Keita dit IBK.
En effet, dans une déclaration sur les réseaux sociaux, des maliens regroupés en association, demandent au président IBK de se mettre en congé du pouvoir, assurant que ses problèmes de santé ne lui permettaient pas de diriger le pays. Ils prient instamment le président de « suivre les indications de ses médecins et de se reposer sans plus rien attendre ». Peu avant ces organisations de la société civile, c’est l’opposition démocratique, qui s’interrogeait sur l’état de santé du président avec un ton empreint de colère en ces termes : « Pourquoi le président nous cache-t-il son état de santé ? » « Il devrait comprendre qu’il appartient au domaine public », avait-elle ajouté.
En tout cas, les absences répétées d’IBK au sommet de l’État, notamment à des Conseils des ministres, ont nourri la spéculation et la rumeur, si fait que de nombreux hommes politiques, du pouvoir comme de l’opposition, ne cachent pas leurs inquiétudes quant à la situation de blocage que cela pourrait engendrer. C’est pourquoi tous lui demandent de se conformer à l’article 36 de la Constitution. Reste maintenant à savoir si ces appels du pied seront entendus. Car, sous nos tropiques, on a vu et voit toujours des présidents grabataires s’accrocher à leur fauteuil, refusant ainsi de s’imaginer une autre vie en dehors du pouvoir. Le cas le plus emblématique est celui du président algérien, Abdel Aziz Bouteflika, pour ne pas le nommer, qui, depuis plus de deux ans, dirige son pays sur civière. Évitant au maximum les apparitions publiques, les déplacements du numéro un des Algériens se résument désormais entre la résidence présidentielle et l’hôpital militaire Val de Grâce en France, où il se rend pour des contrôles de routine.
Très peu de présidents africains acceptent de rendre public leur bilan médical
Osons espérer que le président IBK, lui, entendra le cri de cœur de ses compatriotes, en reconnaissant qu’il est juridiquement “empêché”. Il y va non seulement de son intérêt mais aussi de l’avenir du Mali qui, depuis l’arrivée d’IBK, connaît jusque-là la pire situation de son existence. C’est le lieu même de reparler plus globalement de la santé de nos chefs d’État sur le continent. Très peu d’entre eux acceptent de rendre public leur bilan médical. Si fait que même quand ils souffrent dans leur chair, ils tentent de le cacher. C’est le cas, par exemple, de l’ex-président nigérian Umaru Yar-Adua, décédé en 2010, de problèmes rénaux longtemps cachés au grand public. On oublie volontiers les cas des grands timoniers comme Omar Bongo Ondimba du Gabon, Gnassingbé Eyadema du Togo qui, jusqu’aux dernières heures de leur vie, s’efforçaient de nier l’évidence. Peut-être oubliaient-ils que la nature, très jalouse, ravit, au fil des ans, par petites doses, les forces qu’elle nous a prêtées.
Cyrille Coulibaly