Très actif sur les réseaux sociaux, le collectif Bi-ton est un regroupement des jeunes qui lutte implacablement contre le chômage des jeunes diplômés. Dans un entretien à bâtons rompus, son fondateur Salif Diarrah nous a expliqué les raisons d’être du collectif et ses objectifs. La mission principale du collectif Bi-Ton, selon lui, est de défendre par tous les voies et moyens les intérêts intellectuels et moraux des jeunes pour leur assurer un meilleur avenir. Et cela d’autant plus que l’avenir du Mali repose sur les épaules de la jeunesse.
Le Matin : Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de porter sur les fonts baptismaux un collectif dénommé Biton ?
Salif Diarrah : Bi-Ton (Association d’aujourd’hui) est un mouvement de jeunes constitué de plusieurs associations qui ont décidé de se mettre en commun afin de revendiquer les droits des jeunes. Le nom Bi-ton pour dire que nous sommes nouveaux et que nous allons jusqu’au bout de nos objectifs.
Le collectif regroupe combien d’associations ou de regroupements. Et quel est l’objectif visé avec la création d’un tel collectif ?
Bi-ton est un collectif regroupant une centaine d’associations. Mais, nous avons les papiers d’une quarantaine et nous avons 30.000 personnes enregistrées sur notre site web. Notre objectif est d’aider la jeunesse à préparer les chocs à venir en s’organisant à faire l’unité avec les travailleurs. Il s’agit pour nous d’établir un véritable «réseau» qui relierait partout, via les militants, les batailles, les combats menés par la jeunesse pour sauver son avenir.
Nous luttons pour que dans chaque classe, dans chaque champ, dans chaque amphithéâtre, dans chaque université, dans chaque marché, dans chaque famille… partout où la jeunesse subit les coups portés contre elle, qu’il y ait un ou plusieurs jeunes, organisés capables d’aider leurs camarades autour d’eux, à s’emparer de ces combats. Nous défendons les conditions d’étude des jeunes pour un vrai diplôme, un vrai travail et un vrai salaire. Nous cherchons partout à établir les revendications avec les jeunes et à se battre à leur côté pour leur satisfaction.
Sur la base de ces combats menés et à travers la discussion, nous cherchons à tisser un lien de confiance entre les jeunes et leur organisation afin que, lorsque les plus grands chocs surgiront, ils ne soient pas désorientés, désorganisés, sans nulle part vers où se tourner pour comprendre et se saisir de ces combats.
A travers des réseaux sociaux et des conférences, votre collectif ne cesse de réclamer et de rappeler au président Ibrahim Boubacar Kéita sa promesse de créer 200.000 emplois pendant son mandat de cinq ans. Pensez-vous que votre appel sera entendu ? A-t-il fait effet ?
Grâce à nos moyens de communication nous pouvons atteindre nos objectifs, car toutes ces associations et les personnes qui se sont enregistrées sur notre site nous ont connu grâce aux réseaux sociaux. Nous avons aussi été contactés par deux ministres (celui de la Jeunesse et celui de l’Emploi et de la Formation professionnelle) dans le cadre de l’organisation du grand rassemblement des jeunes chômeurs qui était prévu le 23 juillet 2016, dont toute l’organisation a été faite via les réseaux sociaux. Donc nous sommes convaincus que nous pouvons faire bouger les choses grâce aux réseaux sociaux.
Vous reprochez au Chef de l’Etat de ne pas avoir tenu ses promesses, pourtant le Ministère en charge de l’Emploi dit qu’il y a eu plus de 100.000 emplois créés en trois ans. Croyez-vous en cela ?
Les chiffres avancés par le gouvernement sont irréalistes, car les conditions ne le permettent pas tout simplement. Au dernier recensement des fonctionnaires maliens, c’était en 2009, le nombre total des fonctionnaires était de 60.000 personnes. Je me demande pour eux c’est quoi l’emploi ? Car selon la définition universelle, les stages de l’APEJ ne peuvent pas être comptabilisés comme des emplois. Même si les 200.000 emplois ont été créés, il faut reconnaitre que ce n’est pas du tout suffisant car environ 200.000 nouveaux chômeurs arrivent sur le marché de l’emploi chaque année.
A votre avis, y a-t-il une différence entre un emploi et un emploi de jeune ?
Oui, bien sûr ! Un emploi jeune est un emploi qui ne nécessite pas forcement beaucoup d’expérience, parce qu’on a remarqué que souvent la première difficulté pour les jeunes diplômés c’est qu’on leur demande des années d’expérience pour accéder à un emploi. Or ces jeunes n’ont jamais eu l’occasion de travailler pour justifier ces années d’expérience. Il faut donc qu’on leur donne la chance d’accéder à un premier emploi dès leur sortie de l’université.
Que pense le collectif Biton de la situation actuelle de chômage des jeunes au Mali ?
Dramatique ! Raison pour laquelle le collectif Bi-ton veut qu’elle soit traitée au même titre que la crise du nord. Le nombre de chômeurs n’est même pas connu au Mali. Une chose est cependant certaine, il ne cesse d’accroitre chaque année car nul n’ignore que des nouveaux diplômés continuent d’affluer sur le marché de l’emploi alors qu’aucune politique n’est mise en place pour permettre à ces milliers de jeunes de trouver du boulot. Le nombre pharaonique de demandeurs de stage pour le compte de l’APEJ suffit pour mesurer l’ampleur du drame.
Quelles solutions préconise le collectif Biton pour sortir de cette dramatique situation de chômage des jeunes ?
Pour commencer l’Etat doit d’abord recenser tous les chômeurs afin d’avoir un nombre exact afin de pouvoir trouver des solutions. Actuellement, nous travaillons sur les propositions que nous allons soumettre aux autorités compétentes. Nos propositions seront de type SMART (Spécifique, Mesurable, Atteignable et Réalisable dans le temps). Un temps qui soit raisonnable, c’est à dire avant les prochaines élections.
Quel appel lancez-vous aux autorités actuelles pour éradiquer le phénomène de chômage des jeunes ?
Le Message que nous avons à lancer aux autorités c’est de leur dire que la jeunesse est là et veille sur tout ce qu’ils font !
Propos recueillis par Aliou Touré