Paris presse Bamako de réviser la constitution dans le sens des Accords d’Alger rejetés des Maliens dans sa forme actuelle, faisant augmentant les risques de nouvelles contestations.
L’analyse de l’orientation des autorités de la transition semble dans ses grandes lignes la suivante : en matière de sécurité, le Mali subit une double dépendance. Il est virtuellement dépendant vis-à-vis des groupes terroristes, dans la mesure où il n’a pas la capacité de se protéger seul contre une offensive majeure ou même limitée. Actuellement une flopée de forces œuvre à restaurer la sécurité du pays : Barkhane, Minusma, Groupe des cinq pays du Sahel, Takuba, Armée malienne. Si l’engagement de la force française Barkhane venait à s’arrêter, diminuer ou à paraître moins crédible, le risque de prise de contrôle du Mali par Al Qaïda ou l’Etat islamique au grand Sahel s’accroitrait sensiblement.
La deuxième dépendance actuelle et permanence elle, résulte de la capacité de chantage implicite et explicite qu’a la France sur le Mali, puisqu’à tout moment elle peut brandir la menace de réduire ses unités combattantes ou de ne plus nous offrir son parapluie militaire contre les menaces djihadistes, voire conditionner son aide au développement aux avancées notables enregistrées dans la mise en œuvre des Accords d’Alger signés avec les groupes armés. Bien évidemment, cela serait contraire à ses intérêts. Néanmoins, la tendance toujours existe chez les dirigeants de la transition de faire des concessions politiques et économiques, en révisant la constitution dans le sens des Accords.
L’opinion publique a atteint cette conclusion. Et nombreux hommes politiques et de grandes voix de la société civile l’ont clairement fait savoir. Les citoyens sont favorables à une révision constitutionnelle, mais pas inspirée des Accords d’Alger suspectés de refermer les germes d’une partition du Mali.
Derrière, elle voit la main de Paris qui mise sur une régionalisation plus poussée pour extorquer à Kidal d’énormes concessions minières, gazières et pétrolières considérées comme sa part de gâteau à ses efforts diplomatiques couronnés par la conclusion de ces accords. La France joue sur un second tableau : paraître aux yeux du gouvernement malien sous les traits de principal artisan de la paix avec les groupes armés et qui a laissé des plumes dans la lutte anti-djihadistes. Le sang versé nécessiterait bien une compensation, en termes de gros contrats.
Il n’est pas exclu que les Maliens, réfractaires aux Accords d’Alger dans sa forme actuelle, ne tentent de faire barrage à la révision constitutionnelle.
Georges François Traoré