Pour une résolution rapide de la crise sécuritaire dans le sahel, plusieurs organisations de la société civile africaine ont lancé une Coalition dénommée « Coalition citoyenne pour le sahel ». Le lancement officiel a eu lieu ce jeudi 16 juillet 2020 par visioconférence sur la page Facebook de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH).
La situation des populations se dégrade de plus en plus dans le sahel. Ce qui amène à s’interroger sur les approches socio-sécuritaire, selon Drissa Traoré, coordinateur du programme conjoint AMDH et FIDH, lors du lancement de la Coalition citoyenne pour le sahel ce jeudi 16 juillet 2020. Selon M.Traoré, des exactions commises soit par des milices ou des groupes armés, etc., ont conduit à « de graves violations des droits humains, à des atrocités et à des besoins humanitaires criants ». Une situation qui entraîne une méfiance et favorise le recrutement dans les groupes armés.
Face à cette situation, « il faut nécessairement changer d’approche », selon Drissa Traoré, afin que les populations puissent se sentir plus en sécurité. Pour ce faire, une approche plus holistique prenant en compte les besoins de la population doit voir le jour.
Voilà les raisons qui ont prévalu la création de la Coalition citoyenne pour le sahel. Une Coalition composée de 22 organisations du sahel. Cette Coalition, aux dires de M. Traoré, ne sera nullement un contrepoids pour les actions gouvernementales, mais plutôt un appui. Elle sera la porte-parole des populations civiles.
Cette coalition a pour but la promotion des priorités susceptibles, selon les initiateurs de ce regroupement, de servir de repère pour les réponses à apporter à la crise sécuritaire dans la région du sahel. Ils appellent ces priorités les « Piliers citoyens ». Selon Drissa Traoré, ces Piliers constituent un ensemble d’« aspects qui permettent de prendre en charge le besoin de protection des populations civiles dans les différents pays du sahel ». À l’en croire, la sécurité est au-delà des armes et des munitions, il faut la collaboration et la confiance des populations.
Cette position est défendue par Niagalé Bagayoko, présidente de l’African sécurity secteur Network (ASSN), experte sécurité en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Celle-ci estime que la sécurité humaine va au-delà de l’approche militaire. Elle est fondée sur l’idée de protéger les individus, les communautés de la peur et de la faim.
L’intégration de cette approche semble nécessaire à ses yeux dans la mesure où les populations civiles payent la lourde tribu de l’insécurité dans le sahel. Elles sont la cible non seulement « d’hommes armés non identifiés », mais aussi des forces armées elles-mêmes. « Les populations civiles sont les premières victimes des actes perpétrés par ces différents acteurs », indique-t-elle.
La Coalition citoyenne pour le sahel entend procéder à des dialogues constructifs et exigeants avec les dirigeants politiques, les décideurs politiques ainsi qu’avec d’autres acteurs pour la gestion de la crise dans cette région. Il s’agit bien de créer un cadre collectif et inclusif. « Nous voulons faire entendre la voix et l’expertise de la société civile, parce que nous sommes convaincus que cela peut permettre de relever de manière plus efficace les défis de sécurité humaine auxquels font face les populations du Sahel, de faire respecter leurs droits fondamentaux et de s’attaquer aux injustices sous-jacentes qui alimentent la crise », lit-on dans le communiqué de presse publié à l’occasion de ce lancement.
Cette coalition s’articulera autour de quatre « Piliers citoyens ». Les acteurs de la société civile à la base de cette Coalition invitent les autorités politiques à inscrire leurs interventions dans ces différents Piliers.
Dans le Pilier citoyen 1, cette Coalition invite à mettre la « protection des civils et la sécurité humaine au cœur de la réponse au sahel ». Toutes les interventions militaires, humanitaires, de développement ou encore pour le renforcement de l’État, doivent assurer aux civils affectés par les conflits plus de protection. Dans le Pilier citoyen 2, les initiateurs invitent à « créer une stratégie politique globale qui s’attaque aux causes profondes de l’insécurité ». Pour ce faire, ils invitent à investir davantage dans la résolution des conflits, à s’attaquer aux inégalités et aux doléances locales à travers un dialogue politique. Quant au Pilier Citoyen 3, il vise à « répondre aux urgences humanitaires et veiller à ce que l’aide soit adaptée au développement ». En dernier ressort, il s’agit de « Lutter contre l’impunité et garantir l’accès de tous à la justice ».
Alioune Tine, expert indépendant de l’ONU pour les droits de l’homme au Mali, apprécie la création de cette Coalition. « C’est le véritable chaînon manquant » qui vient à son heure, indique-t-il avant de préciser qu’elle vient compléter les actions des États, des forces armées. En un mot, la Coalition citoyenne pour le sahel vient combler un grand vide.
Fousseni Togola