Referendum du 18 juin : Joutes entre le Oui et le Non sur Africable TV

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Depuis l’ouverture de la campagne dans le cadre du référendum constitutionnel du 18 juin 2023, Africable télévision est au cœur de l’événement. Chaine de grands débats politiques et riche de son expérience, la chaine du continent donne la parole aux différents protagonistes. Depuis 5 jours, les partisans du Oui et du Non défendent leurs idées sur le plateau de Robert Dissa.

 « La nouvelle Constitution, gage de stabilité institutionnelle ? Oui ou Non, pour la nouvelle Constitution, quelle est la pertinence de l’élaboration du projet de Constitution ? », sont entre autres grands thèmes débattus dans la nuit de mardi à mercredi dernier sur Africable TV. Robert Dissa a réuni sur son plateau, un aéropage d’hommes politiques pour disséquer le projet de Constitution soumis à référendum le 18 juin prochain. Des débats d’idées qui se situent dans le cadre de la 5e journée sur les deux semaines de campagne référendaire organisée chez notre consœur  de Sogoniko, siège d’Africable TV.

Les invités du mardi soir avaient pour noms, Dr. Mohamed Kassoum Djiré président du Mouvement Sentinelle Mali Koura, Bakary Dagnoko Secrétaire chargé des Maliens établis à l’extérieur du bureau national, mandataire de la CMAS en France, Daouda Moussa Koné, 7e vice-président de l’URD et Alassane Abba, secrétaire général de la Codem.

Les deux tendances, chacune représentée par deux personnes, ont échangé de prime abord sur la pertinence de la révision constitutionnelle en cette période de transition et de crise. Sur ce sujet, Dr. Djiré qui défend la thèse du Oui, a déclaré que toutes les Constitutions du monde ont été élaborées en période de crise. A ses dires, cette idée a été défendue par un grand écrivain malien dans notre pays, qui fut ministre de la Justice.

« Aucun régime ne va changer la Constitution sans problème. Apha Oumar Konaré, premier président démocratiquement élu l’a tenté sans succès. ATT et IBK le dernier cité qui était le plus populaire ont tous deux échoué à le faire. Nous savons comment les élections se jouent au Mali. Généralement, l’élection présidentielle c’est du suivisme. Chacun vient et c’est le partage du gâteau. Le deuxième principe selon lui, est que la transition par principe, est neutre. Le peuple malien, depuis des années, s’est levé pour un changement de système, un nouveau Mali. Les Maliens ont toujours chanté qu’il faut changer cette Constitution qui a fait son chemin », a-t-il fait savoir. Son constat en la matière est que, seule une transition peut et doit élaborer une nouvelle Constitution, « surtout une transition aimée par 80 % de Maliens. On avait un problème de leadership, de vision, de pragmatisme et non de démocratie ».

Dr. Djiré a en outre fait remarquer que ce sont les Assises nationales de la Refondation (ANR), tenues avec la majorité des Maliens, qui ont recommandé d’aller à une nouvelle Constitution au lieu d’une simple révision constitutionnelle. Sur le plan politique, il a ajouté que l’ensemble des partis politiques du Mali est d’accord pour changer 90 articles sur les 122 articles de notre Constitution. Ce qui, selon lui, signifie d’aller directement à une nouvelle Constitution.

Bakary Dagnoko a battu en brèche la notion de crise évoquée par son prédécesseur pour soutenir l’adoption d’une nouvelle Constitution. « Je ne sais pas si on parle du même Mali en écoutant Dr. Djiré. Sinon quand la Constitution du 22 septembre 1960 a été adoptée, le Mali n’était pas en crise. Celles du 2 juin1974 et du 25 février 1992 non plus ». Il ne partage pas l’idée selon laquelle, les ANR ont proposé le changement constitutionnel. « Je suis tombé de nuit, comment les ANR peuvent être aussi importantes que la Constitution elle-même en vigueur ? Elle n’a pas été remise en cause par un coup de force, un coup d’Etat. A cet effet, elle demeure la loi suprême. Elle ne peut donc pas être remise en cause par une assise quelle que soit sa portée. Encore que les ANR ont été participatives mais non exclusives ».

Pour M. Dagnoko, tout ce que nous entreprenons doit avoir comme  base un enjeu, une finalité, une priorité. « La Constitution n’appartient pas aux partisans du Oui ou du Non ni au gouvernement ou à la transition. C’est un pacte social, un contrat social entre les 25 millions de Maliens. Ces Maliens doivent se retrouver dans cette Constitution. On n’a pas dit qu’elle doit forcément être uniforme, mais elle doit avoir une certaine harmonie, inclusivité à 100 % ». M. Dagnoko d’ajouter que toutes les Constitutions qui ont été révisées, ont été adoptées par 99 % de suffrages sous le régime de Moussa Traoré. « Il y a une franche importante de la population qui ne se reconnait pas dans cette nouvelle Constitution », dit-il avant d’ajouter, que tout ce qui nous est arrivé ces dernières années n’est pas un problème de Constitution, mais plutôt de mal gouvernance, de crise politique, de faillite des acteurs politiques.

Daouda Moussa Koné, 7e vice-président de l’URD, partisan du Oui, abonde dans le même sens que son camarade politique Dr. Djiré du Mouvement Mali Kura. Il répond par Oui s’agissant de l’opportunité de changer ou de réviser la Constitution. « La Constitution de 1992 âgée de 31 ans a beau être bien faite, elle ne résiste pas à l’épreuve du temps,  aux problèmes géopolitiques, etc. Il y a des tares dans cette Constitution qu’il faut corriger. Une bonne source des causes des crises politico-sociales que nous avons vécues résident dans cette Constitution. Si les anciens présidents Alpha, ATT et IBK ont été soupçonnés de tenter un 3e mandat dans leur démarche de révision constitutionnelle. C’est parce que, il y avait des articles qui n’étaient pas très clairs ». A l’en croire, il est clairement dit dans la nouvelle Constitution, « qu’aucun président de la République ne peut dépasser deux mandants. D’où mon adhésion ». Un article non révisable, ce qui est une avancée par rapport à la Constitution de 1992. A ses dires, la nouvelle Constitution a autant d’autres nouvelles améliorations comme le régime semi-présidentiel remplacé par le régime présidentiel. En somme, son point de vue est que cette Constitution corrige les tares de l’ancienne.

Le second représentant de la Codem, ou du camp du Non, Alassane Abba ne croit pas aux arguments selon lesquels, les anciens présidents ne sont pas parvenus à réviser la Constitution qu’il faut adopter une nouvelle. « Ces arguments ne tiennent pas », tranche-t-il. A l’entendre, ce n’est pas parce que Alpha, ATT et IBK ont échoué qu’ils ont abandonné leur projet de révision constitutionnelle, mais c’est parce qu’ils ont écouté la voix de leur peuple.

« Lorsque des jeunes, des vieux se mettent dans la rue pour dire qu’on ne veut pas, tout président sage doit arrêter. Ce n’est pas un échec. C’est ça un grand homme d’Etat, écouter les pulsions de son peuple et non forcer », plaide M. Abba. Il ajoute, « les initiateurs de ce projet n’ont même pas mandat de le faire. Ils ont défaut de qualité parce que l’article 118 de notre Constitution est sans équivoque. Seul un président de la République et les députés peuvent initier une nouvelle Constitution. Pas quelqu’un qui est venu par un coup d’Etat. Le coup d’Etat dans notre Constitution est un crime imprescriptible ».

Abba pense que c’est eux-mêmes de l’opposition qui ont mal fait en donnant l’occasion aux militaires d’achever leur lutte. Pour lui, ceux-ci avaient dit avant la prestation de serment qu’ils sont là juste pour un temps, pour redresser la situation, organiser les élections le plus rapidement possible et partir. « Cette nouvelle Constitution est illégale dans la mesure où le président de la transition a juré sur l’ancienne Constitution en prêtant serment. Comment tu peux jurer sur une Constitution et la tuer par une nouvelle Constitution alors que même dans la charte de la transition, ils ont dit de tout respecter ? Il n’y a jamais été question de révision ou de nouvelle Constitution».

Le Secrétaire général de la Codem refuse en outre d’accepter que rien n’a été fait en plus de 60 ans d’indépendance. « Je ne pense pas qu’on peut en arriver à quoi que ce soit avec celui qui n’arrive pas à fédérer les Maliens. Pour bâtir, il faut qu’on soit ensemble, qu’on regarde dans la même direction », a fait constater l’un des défenseurs du vote négatif. Il n’entend pas non plus que les militaires se substituent aux politiques, « ce n’est pas leur rôle », conclut-il.

Un débat houleux de 1h36mn entre les quatre débateurs du plateau avec des positions tantôt souples, tant tranchées. Néanmoins avec respect et courtoisie les uns envers les autres.

Très ravi de participer à un tel débat sur Africable télévision, Bakary Dagnoko de la CMAS France a émis le souhait de voir l’ORTM, la chaine nationale, organiser un tel échange d’idées entre les acteurs politiques du pays  surtout en pareille occasion.

 

Abdrahamane Dicko

 

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