Réduction de la pauvreté et des inégalités au Mali : Contribution du secteur informel à l’économie nationale

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«Contribution du secteur informel à l’économie nationale et à la réduction de la pauvreté et des inégalités au Mali », c’est le rapport réalisé en 2020 que vient de publier l’Observatoire du Développement Humain Durable et de la Lutte Contre la Pauvreté (ODHD/LCP), avec l’accompagnement du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Il ressort de l’étude que le secteur informel contribue largement à la lutte contre la pauvreté et à la réduction des inégalités par sa contribution à la formation de la richesse nationale, d’une part, et par son rôle de plus en plus grand de pourvoyeur d’emplois permettant au plus grand nombre d’accéder à des revenus, d’autre part.

Le rapport regrette qu’au Mali, le secteur informel occupe  une place considérable dans la vie économique et sociale ; il constitue un grand pourvoyeur d’emplois dans l’économie malienne, une prédilection pour les activités commerciales . Aussi, le rapport souligne qu’au niveau du secteur informel, la tenue de la comptabilité n’est pas une pratique courante. L’on constate ainsi, l’ignorance répandue des réglementations administratives et des conditions d’exercices précaires. Selon l’étude, entre  2004 et 2015, le poids de l’économie informelle dans la formation du Produit intérieur brut (PIB) diffère d’un secteur à un autre : secteur primaire (environ 98%), secteur secondaire et tertiaire (respectivement 36% et 34%).

S’agissant de la pression fiscale, indique le rapport d’étude, elle est beaucoup plus faible dans les pays où le secteur informel est important que dans ceux où il est peu significatif. Au Mali, révèle le rapport, le taux de pression fiscale s’est situé à 14,2% en moyenne entre 2014 et 2018 pour une norme communautaire de 20%. Calculé sur la base des résultats de l’enquête régionale intégrée sur l’emploi et le secteur informel (ERI-ESI), réalisée par l’INSTAT en 2017, il se situe à un niveau très faible (environ 0,11%). La comparaison avec le taux de pression fiscale globale de l’économie, ajoute le résultat de l’étude, qui est 15,2% en 2017, montre une estimation du manque à gagner  fiscal dû à la sous imposition du secteur estimé à 2 938 810 FCFA. Concernant l’impôt sur les bénéfices industriels  et commerciaux, indique l’étude,  (30%) serait donc de 881 643 millions de FCFA, d’où un manque à gagner de 878 079 millions de FCFA en 2017, soit 9,8% du PIB. Ce manque à gagner fiscal, selon le rapport, est supérieur à l’aide publique au développement (725 305 millions de FCFA).

S’agissant du secteur rural, l’étude indique qu’il demeure très peu fiscalisé. «Durant ces dernières années, ce secteur a subi une évolution avec l’apparition des femmes aux alentours de grandes agglomérations. De ce fait, nous distinguons, d’une part, le secteur agricole traditionnel basé sur une technologie archaïque à très faible productivité, héritée de plusieurs générations et d’autre part, le secteur agricole moderne constitué essentiellement des fermes agricoles modernes qui, par essence et par objectif, est lié à l’économie du marché», a déclaré le rapport.

Concernant l’emploi, l’étude note qu’il devient de plus en plus informel. « L’emploi informel est passé de 91,2% de l’ensemble des emplois en 2000 à 93, 5% en 2013 et 97,5% en 2017. Et il se caractérise par une grande précarité des conditions d’activités, un niveau d’auto emploi très élevé et un taux de salarisation très faible, une prépondérance  des proches du chef de l’UPI avec plus de 90% des travailleurs qui lui sont apparentes, une précarité qui s’exprime aussi dans les conditions des employés qui ne bénéficient ni de contrat écrit, ni de prime de fin d’année, ni de sécurité sociale, ni de congés annuels payés, ni de congés de maladie payés, ni de participation aux bénéfices ou d’autres avantages  en nature», indique l’étude.

Concernant la distribution de revenu, l’étude a fait ressortir que, l’ERI-ESI 2017 révèle que le revenu mensuel de la production en emploi dans le secteur informel est de 40 515 Fcfa, presqu’égal au SMIG 40000 Fcfa par mois), mais largement inférieur au revenu mensuel des maliens estimé à 79 400 Fcfa. Ce qui signifie que le revenu mensuel moyen dans le secteur informel est encore plus largement inférieur à celui du secteur formel. Ainsi, ajoute le rapport, la masse salariale annuelle versée par les partons des UPI aux employés est d’environ 265 milliards Fcfa.

Dans le domaine de protection sociale, l’expertise déclare que les travailleurs du secteur informel sont très peu protégés malgré les conditions d’activité caractérisées par la précarité avec des risques pour la sécurité, la santé et l’environnement. Pour remédier à cette situation et dans le cadre de la mise en œuvre de la politique nationale de sécurité sociale, l’étude souligne que l’INPS procède à l’extension de son système de protection sociale au secteur informel par la mise en place du régime de l’assurance volontaire. « Le nombre d’assurés au 30 septembre 2019 était de 18 447, ce qui ne fait que 0,30% des six millions de personnes éligibles », montre l’étude.

Pour conclure, l’étude dit que le secteur informel contribue largement à la lutte contre la pauvreté et à la réduction des inégalités par sa contribution à la formation de la richesse nationale, d’une part, et par son rôle de plus en plus grand de pourvoyeur d’emplois permettant au plus grand nombre  d’accéder à des revenus, d’autre part. Le secteur informel, poursuit le rapport, joue ainsi un rôle de soupape de sécurité pour la société, car fournissant à une importante frange de la population, des moyens de subsistance. Cependant, ajoute le récit, ce secteur se caractérise par la précarité des conditions d’emplois  et par des revenus plus faibles par rapport à ceux du secteur formel. Par ailleurs, sa contribution aux recettes fiscales est extrêmement faible et il constitue un refuge pour certains gros opérateurs qui y organisent eux-mêmes leur informalité.

Hadama B. Fofana

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