Dans le cadre de son plan stratégique 2016-2019, la CSI-Afrique en partenariat avec l’Institut Belleville/CFDT et avec le soutien financier de l’Agence Française de Développement (AFD), s’est engagée dans le cadre d’une seconde phase du projet «Soutenir l’action syndicale en matière économique et sociale pour faire du travail décent une réalité en Afrique», pour une période de trois ans, de juillet 2016 à juin 2019. Cette seconde phase se situe dans la continuité du projet, qui depuis 2012, a permis la mise en place des Comité d’Analyse et de Recherche Syndicale (CARES) dans 8 pays de l’Afrique de l’ouest : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal et Togo. Les CARES sont des structures intersyndicales techniques, composées de 2 à 4 représentants des organisations syndicales affiliées à la CSI-Afrique dans ces 8 pays.
L’objectif visé par cette nouvelle phase est de poursuivre les actions de renforcement des capacités des 28 organisations syndicales parties prenantes dans les 8 pays. Pour y parvenir, les CARES pays ont défini sur la base des priorités et des préoccupations des organisations syndicales parties prenantes, trois axes thématiques i) Protection sociale dans l’économie informelle ; ii) Analyse et plaidoyer budgétaire ; iii) Les accords-cadres internationaux, la responsabilité sociale des entreprises en Afrique de l’ouest ; ainsi que des activités s’y référant notamment des séminaires de formation, des recherches, des campagnes de sensibilisation, des plaidoyers.
Aussi , dans le cadre de la mise en œuvre de son plan d’action national , le CARES Mali à l’instar des autres CARES vient de procéder à la validation de deux rapports d’études portant, le premier sur l’Extension de la protection sociale aux travailleurs de l’économie informelle et le second sur les Accords-Cadres Mondiaux et la Responsabilité sociale des entreprises multinationales au Mali : Etat des lieux.
Au plan national, le CARES Mali, structure ouvrière des centrales syndicales parties prenantes du Projet (UNTM et CSTM) a bénéficié de l’appui technique de son partenaire traditionnel, la Friedrich Ebert Stiftung (FES), par notamment la mise à disposition de deux consultants dont Messieurs MoulayeHassane TALL et Moussa Ben Deka DIABATE sous la conduite d’un comité de pilotage de CARES Mali présidé par sa coordinatrice Binta BAH.
L’atelier de validation de ces deux importants a lieu le samedi 03 Février 2018 à la Bourse du Travail en présence de Mme Ba Binta Bah, coordinatrice du CARES Mali, des représentants de ‘UNTM et de la CSTM, de l’ICP Mali, de la FES.
De façon générale les deux études visent à mettre à la disposition des centrales (UNTM et CSTM) des outils de plaidoyer et de mobilisation pour la promotion des droits des travailleurs.
Plus spécifiquement , l’étude sur la PS visait à faire l’Etat des lieux des mécanismes de protection sociale dans le secteur informel au Mali ; identifier les défis liés à l’extension de la protection sociale et la promotion de l’emploi décent dans l’économie informelle au Mali ; dégager des pistes de financement possibles pour soutenir le processus d’extension de la protection sociale dans l’économie informelle au Mali ;identifier des stratégies syndicales pour l’extension de la protection sociale aux acteurs l’économie informelle au Mali.
Celle relative aux Accords-Cadres Mondiaux visait à faire un répertoire des entreprises multinationales au Mali ; faire un état des lieux des Accords –Cadres signés par ces entreprises/ Multinationales ; faire l’état des lieux des atouts et des violations des droits humains et syndicaux dans ces entreprises multinationales ; élaborer des recommandations au regard des constats faits et les notifier aux acteurs du mouvement syndical malien en général et aux centrales UNTM et CSTM en particulier.
Défis liés à l’extension de la Protection sociale …
Concernant le rapport sur la PS, la recherche a touché 540 travailleurs de l’économie informelle, dont 50ù de femmes jeunes sans emploi (y compris des travailleurs déplacés du Nord du Mali) dans les communes du District de Bamako et la région de Sikasso. La population enquêtée est composée de jeunes âgés de 15 à 40 ans dont 65,8% de sexe masculin et 34,2% de sexe féminin.
Un peu plus de la moitié de cette population est célibataire (54,4%) et 43,9% des enquêtés sont mariés. Sur le plan du niveau d’instruction, 63% de la population enquêtée a franchi au moins le cap de l’enseignement fondamental contre 19,6% pour le niveau de l’enseignement secondaire. Tandis que moins de 1% est alphabétisé contre 6,9% considéré comme analphabète. L’enseignement coranique occupe 8,8% de cette population enquêtée. Comme indiqué un peu plus haut 39,4% de la population enquêtée connaissent l’importance de la protection sociale contre 60, 6%.
La majorité de la population enquêtée est sans protection sociale (60%). Dans ce rapport, il ressort que le sous-emploi touche plus de femmes (65% environ) que les hommes (35%). En effet selon l’enquête, une forte proportion des travailleurs de l’économie informelle pense user de leur relation personnelle pour se soigner quand ils tombent malades et se font leur propre économie pour « jours à venir » ; 70,9% n’ont d’autres stratégies que de se prendre en charge en termes de couverture sociale, tandis que 17,4% tirent leur stratégie 17,4% dans l’exploitation des petites annonces sanitaires entre eux. Ils ne connaissent pas le fonctionnement de l’AMO ni du RAMED. Ils ont peur qu’on leur parle de l’INPS car synonyme de paiement d’impôts.
Concernant les difficultés auxquelles est confrontée cette catégorie de travailleurs, la recherche révèle que plusieurs difficultés émaillent le parcours des travailleurs de l’économie informelle dans leur processus de recherche d’un mécanisme de PS. Il s’agit notamment du manque de financement (76,7%), du manque d’opportunité (13,7%), de la discrimination, de l’inadéquation entre profil et avantages de la PS et bien d’autres entraves.
Dans le même rapport des propositions ou stratégies syndicales ont été définies dans plusieurs domaines pour étendre la protection sociale aux travailleurs de l’économie informelle.
Il s’agit de la mise en œuvre de réformes institutionnelles, du renforcement des structures en charge de la PS au Mali ; du développement des programmes de l’emploi et de l’employabilité des travailleurs de l’économie informelle ; de l’amélioration du climat des affaires et Facilitation des mesures de création des entreprises formelles ayant accès à la PS ; des pistes de financement possibles pour soutenir le processus d’extension de la protection sociale dans l’économie informelle au Mali.
Quant au rapport sur les Accords-Cadres Mondiaux (ACM) et la Responsabilité Sociale des Entreprises multinationales, l’étude a concerné une vingtaine (20) d’entreprises multinationales au Mali.
Il ressort de ce rapport que l’environnement juridique au Mali n’est pas contraignant en matière d’ACM et de RSE (les textes sont muets sur la question).
Dans l’ensemble le concept de Responsabilité Sociale (RSE) est connu des entreprises mais sa mise en œuvre encore moins l’opérationnalisation des outils de la RSE n’est pas appliquée.
Aussi la quasi-totalité des entreprises rencontrées ignore non seulement l’existence d’un ACM encore moins son application.
A l’analyse de ses résultats, lespropositionsde stratégies syndicales suivantes ont été faites à savoir , élaborer une stratégie sectorielle de la RSE pour les centrales syndicales à travers le CARES et ses partenaires financiers ; vulgariser le concept et un guide de mise en œuvre des principes de la RSE ; introduire la RSE dans les mentalités dans une grande campagne d’information, d’Education, de sensibilisation et de communication ; satisfaire les besoins d’accompagnement et d’assistance technique de l’expertise spécialisée ; exprimer une forte volonté politique en faveur de la RSE afin que la RSE soit une priorité pour les entreprises tant multinationales installées au Mali que nationales pour le bénéfice des employés et surtout les comités syndicaux .
Au plan des ACM, adopter une stratégie pour la mise en conformité de leur contenu, d’une part, et d’autre part leur mise en œuvre au niveau des filiales sur la base d’une information, communication, sensibilisation, plaidoyer.
Des recommandations pertinentes ont été faites par les participants, sous réserve desquelles les deux rapports d’étude ont été validés.
La rédaction