Avant les grandes sécheresses des années 70, la prostitution passait presque inaperçue au Mali. Les filles de joie vivaient en cachette et venaient pour la plupart des pays voisins et surtout anglophones. On a tendance aujourd ‘hui à coller l’étiquette de prostituée sur le visage de beaucoup de femmes. Car c’est le métier qui nourrit, semble-t-il, le plus grand nombre de bouches dans notre pays. D’ailleurs, il a sérieusement entamé la population masculine et juvénile.
Ces incidences touchent tous les aspects de la vie sociale. Le tourisme de masse, l’exode rural et l’appel à la consommation de luxe sont passés par là. Entre 1970 et 2008, des milliers de personnes ont abandonné la campagne pour se fixer dans les villes qui semblaient leur promettre un avenir radieux. Cette migration résulte de la stagnation du prix d’achat au producteur des cultures d’exportation et l’augmentation des prix de vente des denrées alimentaires de première nécessité que le paysan ne produit presque plus et qu’il doit acheter à tout prix. Il faut ajouter à cela le poids des impacts, la parcellisation des terres et les aléas climatiques. Voilà autant de causes qui ont poussé les jeunes à tenter l’aventure. Hélas !
Les villes du Mali ne garantissent pas à tous un emploi, un habitat décent, des services sociaux, etc. les villes ne sont non plus ni le produit, ni l’instrument de la croissance diversifiée des économies locales. Les activités y tournent principalement autour de l’administration, les services commerciaux et les industries légères concentrées dans la capitale. Ces secteurs sont loin de créer des débouchées pour tout le monde. D’autant que les emplois sont essentiellement orientés vers les hommes. Ainsi, les femmes ont été les premières victimes de la ville, or à la campagne elles jouaient pleinement leur rôle.
Mais en ville, elles ne peuvent être que mères épouses. Car, elles sont en majorité analphabètes et sans qualification professionnelle. Pour s’en sortir, elles se bousculent aux portillons des rares usines si elles ne sont pas domestiques ou vendeuses à la sauvette, alors elles basculent dans prostitution. Cette dernière alternative s’est imposée à la majorité des femmes parmi lesquelles on compte de nombreuses mariées. Donc sans revenus, elles se prostituent pour survivre.
D’autres, tombées sous le charme de la publicité, vendent leur corps pour être à la page. Ici au Mali la consommation de luxe est très déterminante. Ce phénomène de la prostitution a eu pour conséquence la prolifération des maladies et autres infections sexuellement transmissibles dont la plus grave est aujourd’hui le SIDA, le mal du siècle. Et qui se féminise de plus en plus, malgré les efforts des plus hautes autorités du pays.
Oumou Sangho