Depuis un certain temps, on entend ici et là : le Bazin, une richesse du Mali ; le Bazin, le cadeau le plus importé du Mali… Tout se passe sous l’ère de celui dont le parti a pour emblème le Tisserand. Or, un tisserand n’a que faire du Bazin ; il fait quand même de la bonne cotonnade, avec des couleurs multiples et variées.
IBK, président du RPM, parti du Tisserand, ne porte que des Bazins ; il ne fait jamais la promotion des tisserands, et pourtant, le tissage peut être une véritable industrie au Mali, pays producteur du coton. Au lieu d’aider ces milliers de femmes et hommes qui se battent pour la promotion du coton malien, on assiste à des festivals et soirées dédiés au Bazin. Nous mettons au défi de nous montrer une seule unité de fabrication du Bazin au Mali (nous ne disons pas usine mais une unité), ceux qui soutiennent que le Bazin est une richesse du Mali.
Bien sûr, le travail du Bazin occupe des Maliens et Maliennes, au nombre desquels il y a des teinturières, des «batteurs», ou encore des boutiquiers. Mais cela ne fait pas du Mali un producteur mais consommateur du Bazin. La richesse, c’est la production. Notre coton doit être valorisé chez nous, lorsque le gouvernement ne le fait pas, il manque à sa mission. Aider des gens à faire des rencontres autour du Bazin, c’est ignorer sinon mépriser l’existence des femmes et hommes qui sont dans le textile. Gaoussou Goïta, Awa Meïté, Sitan Traoré, des femmes de Ségou, des transformatrices de coton de Koutiala, Kita, Ségou et Sikasso, ont besoin d’aide. Pendant que le gouvernement est en train de soutenir les activités de promotion du Bazin, à coût de millions de Fcfa, certains ministres se battent pour être marraine ou parrain de ces cérémonies, qui n’apportent rien au Mali. Au lieu de faire face à la demande de transformation du coton malien, les ministres se soucient de la promotion du Bazin, des couturiers des autres pays, des stylistes venus d’ailleurs avec des agences de communication créées uniquement pour la circonstance. Le président malien IBK ne devrait pas accepter cela, lui qui est le patron des tisserands.
L’Exemple de la BAD
Le lundi 16 juin 2014, la BAD, lors des festivités de son cinquantenaire à Bamako, a fait une part belle aux transformatrices du coton et d’autres objets artisanaux. La ministre de l’Artisanat et du Tourisme a brillé par son absence, mais elle fera tout pour être aux côtés des grandes boutiques qui sont annoncées pour le festival du bazin. La BAD est le plus gros contributeur extérieur dans le secteur du développement rural. La grande partie de ses contributions, à travers le Projet d’Appui à la Filière Coton Textile du Mali (PAFICOT-Mali), est accordée à la gente féminine. C’est pourquoi, elle a organisé l’exposition-vente de produits artisanaux qui rentre dans le cadre des festivités du cinquantenaire de la BAD, et qui a pour objectif de donner une visibilité au PAFICOT-Mali et d’augmenter les revenus des femmes rurales. Cela est d’autant vrai que l’économie malienne repose en partie sur le commerce du Coton.
La valorisation de cette richesse culturelle (les produits textiles) permettra sans nul doute de booster l’économie. Les autres nous montrent le chemin, mais nos ministres n’en tirent aucune leçon. En parlant de «donko ani seko», comment le Bazin peut être notre «donko» ou notre «seko», même si c’est notre coton transformé par les machines ailleurs et vendu chèrement aux maliens ?
La direction de l’artisanat est interpellée, elle qui se bat pour la bonne exécution du projet PAFICOT, à travers l’appui technique de la BAD pour la promotion de la transformation artisanale de la fibre coton en zone CMDT et OHVM. Cet appui a permis de convaincre nombre de jeunes et femmes que la transformation artisanale du coton est un créneau porteur. En tout cas, le Tisserand premier, IBK, devrait plus valoriser ses collègues, au lieu de soutenir des festivals dédiés à la promotion du Bazin. C’est combattre proprement le travail des transformatrices du coton au Mali !
Kassim TRAORE