Spoliés de leurs espaces agricoles après l’arrestation du patriarche de la famille Sidibé de Sansanding : Les héritiers de feu Massa Sidibé, l’une des grandes victimes du CMLN, réclament justice

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Ce grand médaillé de l’Indépendance, agriculteur modèle, dont les mérites furent salués par le Général De Gaulle et le président de la Côte d’Ivoire, Félix Houphouët-Boigny (mérite agricole) a tout perdu lors des sinistres événements du 19 novembre 1968.

Arrêté la même année et déporté à Kidal, il recouvra la liberté le 6 mars 1971. Il mourra  une semaine après sa libération. Au moment où est célébré le centenaire du président Modibo Kéïta, ses héritiers saisissent l’occasion pour révéler à la face du monde l’injustice qu’ils ont subie et réclamer aux plus hautes autorités justice.

En effet, en septembre 2012, les descendants de Massa Sidibé ont sollicité l’intervention du Médiateur de la République auprès de la Direction générale de l’Office Riz de Ségou pour la restitution intégrale des parcelles exploitées par l’illustre personne. La réclamation de l’un de ses enfants, Mamadou Massa Sidibé, entrepreneur BTP, mandataire des héritiers de feu Massa Sidibé, a porté sur quelque 50 hectares correspondant aux lots U 14 et U 15 dans la zone de Nakry Sossé. Il a soutenu que leur père Massa Sidibé, décédé le 15 mars 1971, a aménagé toute la zone Nakry Sossé entre 1959 et 1964 à ses propres frais en une vaste étendue  de champ rizicole. Il a assuré qu’après son décès, ses héritiers n’ont bénéficié que de 15 hectares lors d’un  recensement organisé à cet effet. Ajoutant que sur ces 15 hectares que la famille exploite présentement, l’administration cherche à reprendre 4 hectares. Les héritiers de Massa Sidibé sollicitent les plus hautes autorités du pays afin d’être rétablis dans leur droit.

Un indigène qui jeta les premières bases du développement économique et agricole du Soudan français et du Mali indépendant

Il est difficile de parler de l’histoire de Sansanding sans mettre l’accent sur le rôle majeur joué par Massa Sidibé. Cet homme immense, du haut de ses deux mètres, est né en 1892, d’un ancien guerrier d’El Hadj Omar Tall, érudit et grand résistant à la pénétration coloniale.

Après un séjour en Côte d’Ivoire où il amassa une immenses fortune, Massa Sidibé rentre au pays. Il a été l’un des grands fournisseurs des  compagnies commerciales notamment la CFAO et d’autres sociétés de l’époque à travers la vente des peaux, des céréales, de la cire, etc. Il est devenu par la suite le plus grand commerçant indigène de la région de Ségou et sa réputation a gagné les confins du Sahel (Sokolo).

En 1932, le service temporaire d’irrigation du Niger (STIN) le prit comme fournisseur dans plusieurs domaines. Il exerça à la carrière de M’Pêbougou avec plus de 800 manœuvres. Massa Sidibé était présent sur tous les chantiers. Il a aidé entre 1930 et 1937 les cantons de Sana, du Kala, de Mpêba Bambougou, de Sagala et les habitants de Sansanding à payer leurs impôts.

Très attaché à la terre, il a été à l’origine de l’installation de cinq villages colons à Tamani dans le secteur de Baguineda et a fourni 100 tonnes de mil et de viande à l’Office. Il fonda en 1935 un village de culture appelé ” Bêla ” qui se situe aujourd’hui dans le centre de la plaine de Nakry-Sossé (actuelle Opération Riz de Ségou).

En 1940, lorsque Gao fut frappée par la disette, il fournit 50 tonnes de mil à l’administration coloniale pour les populations. En sa qualité d’homme très apprécié de la région de Ségou, il a été très vite démarché par les pères fondateurs de l’US-RDA, dont feu Mamadou Konaté en 1946, afin de contribuer à l’implantation du parti. Son choix politique lui causa des ennuis de la part de l’administration coloniale qui roulait pour le PSP de feu Fily Dabo Sissoko.

Les services publics non seulement lui refusèrent des livraisons, mais lui faisaient payer de très lourdes pénalités. Conséquence : il perdit 20 000 stères de bois, 800m3 de gravier, 400 tonnes de chaux du pays au quai de Ségou. Mamadou Konaté a entrepris des démarches auprès de l’administration coloniale. Sans succès. Le colon lui retira 100 têtes de bœuf, un mandat d’arrêt a même été délivré contre lui pour le dissuader et aucun de ses enfants n’a pu poursuivre des études. Malgré tout, il resta fidèle à l’Union soudanaise RDA.

Lorsque ce dernier a triomphé en 1956, Modibo Kéïta marcha sur les traces de son prédécesseur Mamadou Konaté et aida Massa Sidibé à réaliser deux de ses rêves : l’aménagement total de la plaine Nakry-Sossé devenue une zone de l’Office Riz Ségou et l’aménagement partiel de la plaine de Bêla.

Il a été médaillé de l’indépendance du Mali. Il a assisté à une festivité du 14 juillet à Paris aux côtés du Général de Gaulle qui l’a décoré de la médaille du mérite agricole. Il a reçu également une médaille du président Félix Houphouët-Boigny pour ses nombreux succès dans le domaine agricole. Arrêté et déporté à Kidal dans le nord du Mali, ce vieillard en revient très malade, voire mourant. Car une semaine après son retour de la capitale de l’Adrar des Ifoghas, il rendit l’âme à l’hôpital de Kati. D’aucuns disent même qu’il a été empoisonné pendant sa pénible détention.

Abdoulaye DIARRA

 

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