La Coalition pour l’Observation Citoyenne des Élections au Mali ( COCEM) à travers son communiqué de presse N°003/2023/COCEM publié le vendredi 17 mars 2023 relatif au projet de nouvelle Constitution de la république du Mali. Elle salue la validation du projet de la nouvelle Constitution par le Président de la Transition. Elle s’inquiète du renforcement des pouvoirs du Président de la république et invite le Gouvernement à un large consensus national en vue de l’adoption du texte au referendum dans un délai raisonnable.
La Coalition pour l’Observation Citoyenne des Élections au Mali (COCEM) a suivi avec une attention particulière les travaux de la commission de finalisation du projet de nouvelle Constitution de la république du Mali ainsi que la validation du texte par le Président de la Transition. Conformément à sa mission d’observation citoyenne de toutes les phases du processus électoral et des reformes, la COCEM a analysé́ ledit projet de Constitution et fait les constats ci-après :
La COCEM note la prise en compte de plusieurs de ses recommandations formulées dans ses différents rapports d’observation et des documents de contributions à la réforme constitutionnelle. Il s’agit notamment de : l’instauration du bicaméralisme (Article 95) ; la création de la Cour des Comptes (Titre V, Chapitre IV) ; la suppression de la Haute Cour de Justice et du Haut Conseil des Collectivités ; l’introduction de la possibilité́ du mode de scrutin mixte pour l’élection des Députes à l’Assemblée Nationale (Article 96 alinéa 2) ; la Représentation des Maliens établis à l’extérieur à l’Assemblée Nationale (Article 96 alinéa 3) ; la modification du mandat et du mode de désignation des Conseillers de la Cour constitutionnelle (Article 145) ; le durcissement des critères d’éligibilité́ du Président de la république (Article 46) ; l’institution des procédures de destitution du Président de la république par le Parlement pour minimiser les risques de changements anticonstitutionnels (Article 73) ; la consécration des autorités administratives indépendantes, y compris en matière de l’organisation et de la gestion des élections (Article 88) ; le renforcement des prérogatives du Haut Conseil Économique, Social et Culturel avec l’intégration de la question environnementale (Titre VI) ; la lutte contre la transhumance politique (Article 106) ; la reconnaissance du rôle de veille citoyenne de la Société́ civile (Article 40) ; la prise en compte de l’inclusion (Préambule) ; l’élargissement de la saisine de la Cour constitutionnelle aux citoyens (article 153) ; l’augmentation du délai de campagne présidentielle entre les deux (02) tours (article 48 al 2). En plus des aspects énumérés ci-dessus, le projet de Constitution comporte d’autres dispositions susceptibles de renforcer la démocratie, il s’agit entre autres de : la préservation du caractère laïc de la république (Préambule, articles 30 et 32, 185) ; la réaffirmation du caractère irréversible du multipartisme (Article 185 alinéa 2) ; l’officialisation des langues nationales tenant en compte la diversité́ culturelle et linguistique du Mali (Article 31) ; la prise en compte de la lutte contre la corruption (Préambule, Article 3) ; la protection de l’environnement (Préambule, Articles 25, 42, 89, 115) ; la mobilisation des citoyens pour la défense de la patrie dès l’âge de 18 ans (Article 24 aliéna 2) ; la protection des données à caractère personnel (Article 12) ; la protection des droits de l’enfant (Article 3).
Toutefois, en dépit des points forts énumérés ci-dessus, la COCEM souligne quelques inquiétudes en termes de consolidation de la démocratie malienne.
En effet, il ressort de l’analyse de la COCEM que les pouvoirs du Président de la république ont été́ renforcés, constituant, à certains égards une entorse au respect du principe de la séparation des pouvoirs, notamment entre l’exécutif et le judiciaire. En effet, le Président de la république préside toujours le Conseil supérieur de la Magistrature, ce qui sous-entend une immixtion de l’exécutif dans le judiciaire.
Le Président garde également une influence significative dans la désignation des neuf (09) sages de la Cour constitutionnelle. Pour preuve, en sa qualité́ de Président de la république, il désigne deux (02) membres de la Cour constitutionnelle et aussi, en tant que Président du Conseil supérieur de la Magistrature, il désigne deux (02) autres Conseillers. De même, en cas de majorité́ présidentielle à l’Assemblée Nationale et au Senat, dont les Présidents nommeront chacun un (01) Conseiller à la Cour constitutionnelle, le Président de la république se trouvera ainsi de facto à la base de la désignation de six (06) des neuf (09) sages de la Cour constitutionnelle. Ce qui pourrait affecter l’indépendance de l’Institution largement décriée en 2020 après la proclamation des résultats définitifs des élections législatives.
Le projet prévoit également le maintien de la proclamation des résultats définitifs de l’élection du Président de la république et des opérations de référendum par la Cour constitutionnelle, alors que la possibilité́ de conférer cette attribution à l’Autorité́ Indépendante de Gestion des Élections (AIGE) devait être étudiée.
La COCEM relève également que le pouvoir de contrôle du Parlement a été réduit à travers l’impossibilité́ pour l’Institution de démettre le Gouvernement à travers une motion de censure, or le Président de la république garde son pouvoir de dissolution de l’Assemblée Nationale.
Pour rappel, la COCEM a produit un document d’analyse de l’avant-projet de Constitution dans lequel elle avait formulé́ des propositions d’amélioration.
La COCEM invite le Gouvernement à créer un large consensus national en vue de l’adoption du projet de Constitution au référendum qui devra être organisé dans un délai raisonnable en vue de faciliter le respect du chronogramme préétabli.
Ne doutant point de la volonté́ des différentes parties prenantes à trouver des solutions consensuelles en vue de la bonne tenue du référendum et des élections générales, la COCEM reste mobiliser pour observer avec une attention particulière la mise en œuvre des réformes en cours.
Bokoum Abdoul Momini/maliweb.net
Bonsoirs
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