Nous sommes les sentinelles de la République : Lettre AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE

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IBKMonsieur le Président de la République et Cher Aîné,

Vous êtes dès maintenant l’espoir d’un Mali meurtri. Rien que votre engagement pour le Mali me suffit d’argumentaire pour vous adresser cette lettre qui ne peut contenir que le centième de ce que je sens et ressens. Vous correspondez à une image ; celle d’un héros mythologique appelé par des enfants en naufrage dont la pirogue a chaviré en plein fleuve, leurs yeux rivés sur le sauveur à la rescousse. Vous imaginiez l’intensité et l’immensité de l’espérance du fond du désespoir. Du coup, et j’en aurai fini avec l’image, vous êtes l’homme sur qui depuis peu le peuple du Mali a le regard pointé.

 

 

 

Vous êtes aujourd’hui non seulement le Président mais le père de toute une nation tourmentée ; orpheline pour avoir perdu ses références et ses valeurs de dignité ancestrale à qui a été imposée pendant deux décennies l’indignité comme un viol collectif. Le Mali a été réduit à une formule unique et inédite : une grande Nation qui a perdu son Etat. La catastrophe est là ! Volontairement vous vous êtes porté candidat au redressement en tant qu’enfant titulaire et tutélaire. Aussi la mission et le programme qui vous attendent, pèsent lourd pour le seuil de résistance de vos seules épaules, fussent-elles des plus solides parmi celles des vaillants enfants de votre pays. C’est là que votre peuple et votre nation vous attendent pour porter ensemble le fardeau.

 

 

 

Des individus que l’histoire a jugé sans tribunal (pour l’instant) ont réduit le Mali à ruine politique, pays sans Etat construit sur le mensonge, les prébendes, le clanisme politicien, la drogue en tant qu’économie souterraine au sommet de l’Etat, la désarticulation de l’armée et de l’école – premières garanties d’un Etat digne de ce nom- l’impunité, le vol autorisé, les passe-droits, le consensualisme, etc…

 

 

Célébration du mensonge donc. Vingt ans ont suffi pour faire du Mali le symbole du ridicule politique et le modèle d’une démocratie de façade, devenue en guenilles au premier choc.

 

 

Lorsque les yeux du monde, auparavant éblouis par un système de communication et de propagande rodé au mensonge se sont ouverts qu’ a-t-on vu ? Alpha Omar Konaré et Amadou Toumani Touré ; Deux individus que vous avez servi du fond  de votre sens élevé l’Etat. Mais vous étiez  en décalage avec eux ; deux manipulateurs qui ont en commun le manque de vision historique donc nécessairement médiocre dans l’action. Vous avez eu l’honneur de vous être décalé d’eux, ainsi vous aviez pris date  avec votre personnelle identité, votre personnalité de base à l’opposé de ceux à qui vous avez rendu service du fond de vos fonctions régaliennes : ministre des Affaires Etrangères, Premier ministre, Président de l’Assemblée Nationale, simple Député, et aujourd’hui Président de la République ! Vous êtes d’ores et déjà un homme de faction, sentinelle de la République. Vous êtes aussi un malinké de souche et de branche. Je veux dire un homme qui ignore – mieux – qui n’a aucun sens du simulacre, la spécialité de vos deux prédécesseurs successifs, des gens de peu pour me répéter ! Je  l’assume devant l’histoire de ce Mali qui, depuis le 11 août 2013 vous regarde avec espoir, ce sont les résultats de votre élection à la Présidence de la République qui l’attestent davantage. Me voilà versé dans l’hagiographie : Mali des temps anciens glorieux, matrice de démarches originales. Votre concurrent Soumaïla Cissé, votre petit frère, avant la proclamation desdits résultats s’est transporté chez vous pour vous dire « félicitations ». Ainsi je reconnais ma Nation paisible, souveraine et reconnaissante son sens élevé de la civilité et de l’élégance. Oui ce Mali titulaire de tant de bréviaires de la « démocratie tropicale » : Conférences nationales, CENI, Décentralisation, etc. sans réclamation de brevets … Voilà Monsieur le Président quelques signes de la grandeur du Mali !

 

 

Cher aîné, je suis et vous le savez, auteur de trois lettres ouvertes au sujet du Mali en danger de 1994 à 2012. « J’accuse Alpha » en 1994 m’avait valu une sorte de bannissement au Mali suivi un an après « J’accuse acte 2 » et enfin une dernière, elle a été c

 

elle-ci décisive pour débarrasser le Mali de ATT et un système devenu poison.

 

 

Vous êtes aujourd’hui nolens volens un gardien de sanctuaire. Vous êtes ipso facto une sentinelle en rondes sans arrêt. Vous êtes illico un veilleur aux nuits courtes. Cette dernière catégorie ne vous perturberait point tant vous vous y connaissez lorsque, privé de bourse d’étude, vous l’avez été en Sorbonne à Paris, alors que vous prépariez une agrégation d’histoire et votre parchemin au célèbre Institut de Sciences Politiques de Paris. Quelques lignes plus haut je me suis adressé à l’helléniste et au latiniste. Parce que, autant que je sache à la tête des Etats francophones d’Afrique après le Père Senghor du Sénégal c’est vous qui disposez de ces classiques combien compliqués, nécessaires, et nécessaires pour Le Discours. Senghor avait compris toutes les dimensions de la question fondamentale qui était celle de la construction de l’Etat et de la nation sénégalaise au seuil d’un nouveau monde. Il reçut le paradoxe d’ancrer cette construction dans notre civilisation négro-africaine la plus ancienne articulée aux moyens et méthodes les plus avancés des sciences politiques modernes…

 

 

En partage vous avez des catégories simples : patriotisme, ouverture au Monde, civilité, connaissance et maitrise des classiques, mépris souverain pour les intrusions idéologiques et propagandistes. Voilà des éléments catégoriels qui correspondent à vous, Monsieur le Président. Ailleurs, connaissances et intégration de la culture malinké dont vous êtes pétri, maîtrise des cultures voisines d’un Mali pluriel, voilà aussi vos acquis.

 

 

Méconnaissance de la complaisance et du laissez-faire, fermeté et solide foi en organisation et méthode relèvent de ce que j’ai découvert chez vous lorsque février 2007 vous m’avez fait l’honneur de contribuer à la communication pour le congrès de vote parti le RPM à Bamako. Oui, congrès de bonne facture qui annonçait encore une fois votre victoire volée.

 

Aujourd’hui vous avez en ligne l’intégrité du Mali comme sujet. Kidal reste un caillou dans la « chaussure Mali »… Aussi l’Algérie face à votre réorientation de la politique sous-régionale du Mali se révèle être non seulement le pompier-pyromane mais le frère ennemi : vous l’avez compris, et dès lors je vous soupçonne d’une grande lucidité : l’arrimage au Maroc … L’histoire l’explique et les faits de celle-ci peuvent le justifier.

 

 

Là où Senghor a su bâtir le socle d’un Etat nation moderne, solide, c’est là que s’appuie aujourd’hui le leadership sénégalais pour émerger comme une société, une économie au 21ème siècle. Je sais que l’enseignement ne vous échappera pas et vous saurez en faire une utilisation judicieuse et réparatrice pour sortir votre pays du chaos.

Je vous remercie.

Mahmoud Alpha MAIGA (Fraternité africaine)

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