Nous, les jeunes : La jeunesse malienne : une bombe à retardement

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Pendant des décennies, voire depuis l’avènement démocratique dans notre pays, les leaders politiques maliens se sont comportés en véritables « chefs de village », c’est-à-dire des personnes qui se croient « immuables », « éternels », « inusables » et « inépuisables » sur le plan politique. Or la politique est loin d’être une dynastie ou une chefferie traditionnelle où le pouvoir change après la mort du chef ou se transmet de père en fils.

Dans tous les cas, les vétérans, anciens et aînés politiques ont beau tenté mordicus de préserver jalousement leurs postes et acquis politiques, les jeunes les remplaceront un jour, qu’ils le veuillent ou non. D’ailleurs, la vie est comme une roue qui tourne inlassablement et où  les hommes passent et sont remplacés par d’autres : ainsi est conçue cette roue de l’histoire.

Dans le temps, il y a eu des gouvernements, des institutions et des organes d’Etat créés à l’image du pays et pour l’intérêt supérieur de la Nation. Mais beaucoup de représentants de nos autorités n’avaient pas été sérieux dans l’exercice de leurs fonctions, leurs droits et devoirs et pour cause (entre autres) : certains d’entre eux étaient prisonniers de leur ethnicité,  autrement dit de leur appartenance à une race donnée. Comme s’il existe  des gens appartenant à une race ou une ethnie et d’autres, non. Du reste, cette question de race ou d’ethnie sape encore les fondements du développement de notre pays, et les autres pays africains n’échappent pas à ce phénomène. C’est qu’il suffit qu’un cadre malien monte en grade ou gravisse quelques échelons dans la hiérarchie pour  que ses parents, amis, connaissances  de la même race ou ethnie obtiennent tous des strapontins ou des aides de toutes natures venant de leur « parent d’en haut ».

Par ailleurs, nos dirigeants successifs ne sont toujours pas parvenus à conscientiser suffisamment les jeunes ou à trouver les voies et moyens adéquats pour les intéresser davantage à la gestion des affaires du pays. Pourtant, si cela avait été fait depuis l’indépendance, la jeunesse malienne aurait pu s’impliquer plus activement dans la création d’une Nation prospère après la colonisation. En fait, quelles perspectives offre-t-on aujourd’hui aux jeunes, ou leur a-t-on offert hier ? Après que les pouvoirs politiques et administratifs (entre autres) aient pour la plupart confisqué ou pris en otage leurs rêves, espoirs et ambitions, la majorité des  jeunes  s’est retrouvée en proie à tous les doutes et incertitudes, par conséquent à tous les excès.

Face à l’échec d’une bonne frange de l’élite politique malienne et à l’impossibilité, pour bien de jeunes, de participer à la construction nationale, même s’ils le désirent, beaucoup d’entre eux ont été tentés et sont encore tentés  de « s’évader » ou d’aller « noyer leurs soucis et chagrins » dans les pays dits développés,  bien qu’ils soient conscients qu’ils n’y trouveraient pas forcement le bonheur qu’ils cherchent. Malgré tout, ceux qui sont déjà dans ces pays « développés » et qui ont terminé leurs études et formations ne veulent plus rentrer au bercail, et pour cause (entre autres) : en rentrant au pays, ils risquent de se buter à un certain égoïsme ou une « fin de non recevoir » au niveau des rouages de l’Etat et de l’Administration.

Au fil des années, la plupart des jeunes continuent toujours de végéter dans le désespoir où le monde de la drogue, du banditisme et de la délinquance les guette à tout moment, prêt à profiter de leur innocence pour les dépraver, voire les détruire. Longtemps bernés ou marginalisés par les gouvernants successifs et marqués par les injustices sociales, ils attendent que des solutions soient trouvées pour soigner les maux qui les minent. Mais si nos autorités continuent à se comporter comme des « chefs coutumiers », la « bombe à retardement » que constitue la jeunesse risque d’éclater un jour. A moins que les pouvoirs de décision aient l’idée lumineuse de la désamorcer à temps.

Cheick Oumar Keïta

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