Le Mali a célébré le 6 février dernier dans la sobriété la 9ème Journée internationale de lutte contre les mutilations génitales féminines (MGF), au premier plan desquelles figure l’excision. Un point de presse a été animé pour l’occasion par la ministre de la Famille et de la Promotion de la Femme et de l’Enfant, Mme Alwata Ichata Sahi et la Directrice du PNLE (Programme national de lutte contre l’excision, Dr Joséphine Kéita.
Les deux conférencières ont ainsi pu partager avec les journalistes, les membres du Cabinet du département, les responsables du PNLE et les partenaires les résultats engrangés par les acteurs de la lutte contre la pratique de l’excision, une question des plus sensibles.
Dr Joséphine Kéita a révélé que, malgré la crise actuelle, les partenaires techniques et financiers du Mali continuent à financer les activités de lutte contre l’excision, surtout celles de sensibilisation des populations programmées pendant les mois de février et mars 2013.
La politique adoptée par notre pays jusqu’à aujourd’hui a été d’amener à un changement de comportement relativement aux pratiques néfastes pour la santé de la femme et de l’enfant, plutôt que de recourir à un dispositif répressif pur. C’est pourquoi Mme La ministre dira «vouloir combattre une pratique vieille de plusieurs milliers d’années n’est pas chose aisée. Cela demande beaucoup de patience, de sacrifices, de professionnalisme et d’esprit d’initiative, car il s’agit d’impulser le changement de comportement au sein des communautés».
Mais, même s’il existe de nombreux obstacles au vote d’une loi portant répression et interdiction de la pratique de l’excision au Mali, le département de la Famille et de la Promotion de la Femme et de l’Enfant souhaite qu’il y ait adoption d’une loi d’ici fin 2014.
Selon Dr Joséphine Keïta, les séances de plaidoyer et de sensibilisation des groupes cibles, religieux, leaders communautaires, communicateurs traditionnels et modernes, élèves, ont produit des résultats encourageants. Avec l’adoption d’une politique nationale assortie d’un plan d’action national 2010-2014, des modules sur l’excision sont proposés dans les écoles et de nombreuses conventions locales d’abandon de cette pratique ont été signées, soit à la date du 6 février 2013, 543 exciseuses.
«Les mutilations génitales féminines / excision (MGF/E) désignent toutes les interventions aboutissant à une ablation partielle ou totale des organes externes de la femme ou toute autre mutilation des organes féminins pour des raisons culturelles ou autres et non à des fins thérapeutiques», selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Au Mali, elles touchent 85% des femmes de 15 à 49 ans, selon l’EDSM-IV de 2006 et 84% chez les femmes de 0 à 14 ans selon l’Enquête nationale sur l’excision réalisée par le PNLE en 2009.
C’est dire que la lutte porte fruits, même si c’est à petits pas, car le taux de prévalence était de plus de 94% en matière d’excision au Mali il y a quinze ans. Tout le monde participe au combat, dont les partenaires multilatéraux privilégiés du département que sont l’ONU, l’UNFPA et l’UNICEF. Conséquence, comme le montre bien l’étude du PNLE, la pratique de la MGF/E recule et la jeune génération est moins exposée à la subir.
Selon l’ONU, dans un récent rapport, dans les 29 pays d’Afrique et du Moyen-Orient où la pratique perdure, 36 % des filles âgées de 15 à 19 ans en moyenne l’ont subie, contre environ 53 % des femmes de 45 à 49 ans. «Le recul est particulièrement marqué dans certains pays. Au Kenya, par exemple, les femmes âgées de 45 à 49 ans sont trois fois plus nombreuses à l’avoir subie que les filles âgées de 15 à 19 ans». C’est pourquoi, pour répliquer dans un délai très proche cet exemple, notre pays a choisi comme thème pour l’année 2013 «Tolérance zéro aux MGF/Excision: les communautés s’engagent dans la lutte contre la pratique de l’excision».
Concluons avec ces mots de Mme Ichata Alwata Sahi, en abandonnant les MGF/E, «il ne s’agit pas pour nous de rejeter notre culture, mais d’en extirper les aspects négatifs, qui portent atteinte à la santé et aux droits humains fondamentaux de la fille et de la femme. La bataille pour un Mali sans excision ne pourra être gagnée qu’avec l’engagement de tous les acteurs de la société».
Ramata Diaouré