Mopti : L’activité culturelle frappée de plein fouet par la crise

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Avec l’annulation de trois grandes manifestations d’envergure nationale, sans oublier la baisse drastique du taux de fréquentation des touristes, la région de Mopti subit de plein fouet les dures conséquences de la crise politico-sécuritaire.

 

Aly Kampo, le directeur régional des arts et de la culture de Mopti.
Aly Kampo, le directeur régional des arts et de la culture de Mopti.

Mopti est une région cosmopolite, riche, très riche de son patrimoine artistique et touristique, avec ses falaises et ses masques dogons, qui faisaient d’elle l’une des destinations les plus prisées par les touristes et les chercheurs.

Seulement voilà : depuis le déclenchement de la crise sécuritaire, le secteur a subi un coup d’arrêt et le ciel s’écroule sur la tête des acteurs. La chute des trois cercles de Mopti (Ténenkou, Youwarou et Douentza) aux mains des groupes armés a plongé la région entière dans une situation d’instabilité.

C’est le cœur meurtri que le directeur régional des arts et de la culture en parle. Pour Aly Kampo, la culture s’est effondrée à Mopti dans tous ses compartiments. Tous les grands rendez-vous, qui faisaient la fierté de la région, ont été annulés. C’est le cas par exemple du  Yaral Dégal ou la fête de la traversée des animaux.

Inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco, cette manifestation est l’un des rendez-vous culturels les plus importants de la région. ”Cette traversée du bétail revêt une symbolique culturelle. Elle consacre le choix du meilleur berger, du meilleur troupeau, etc. Les rites et cérémonies inscrits au programme, faisaient tout le charme de la manifestation”, explique le directeur régional des arts de Mopti, qui regrette qu’en 2012 l’événement soit résumé à un simple parcours.

Vide culturel

C’est à cause de l’importance de sa dimension culturelle et touristique que l’Etat malien s’impliquait dans l’organisation de l’événement. Et les touristes l’inscrivaient dans leur agenda. ”L’année dernière, la traversée des animaux s’est faite de manière anonyme. C’est un manque culturel dont nous souffrons beaucoup…”, souligne Aly Kampo.

L’autre conséquence de la crise sur la culture de la région, c’est aussi l’annulation de la zihara, en hommage au fondateur de la cité d’Hamdallaye, Sékou Amadou. La zihara est un grand moment de regroupement, de recueillement en hommage aux érudits de la localité et de tous ceux qui ont contribué au rayonnement culturel, diplomatique et de la civilisation de la d’Hamdallaye au XIXe siècle. Détruit en 1864 suite aux combats entre les troupes omariennes (d’El hadj Omar Tall) et celles du royaume peul de Macina, Hamdallaye était le carrefour des civilisations.

La zihara a été donc créée par devoir de mémoire. Le directeur régional des arts de Mopti la décrit comme un moment de souvenance, d’hommage à un homme qui est entré dans l’Histoire : Sékou Amadou. Au cours de la zihara, des milliers d’invités convergent vers Mopti. On imagine en effet l’impact d’un tel événement sur le rayonnement culturel de la région et le coup de fouet à l’activité économique.

La manifestation qui n’a pas eu lieu en 2012, subit de sérieux doutes quant à l’organisation de l’édition 2013. Pour Aly Kampo, il s’agira d’un vide culturel, difficile à combler.

 

Mopti, c’est aussi la région choisie en décembre 2010 à Sikasso pour abriter la Biennale artistique et culturelle du Mali. Activité majeure du ministère de la Culture, elle constitue le cadre de rencontre de la jeunesse malienne (de Kayes à Kidal) autour des vertus d’unité et de cohésion nationales. Bref, du sentiment d’appartenance à la même nation.

Prévue en décembre 2012, l’événement a été ajourné du fait de la guerre au Nord, et rien n’indique qu’elle aura lieu bientôt. Le chantier de construction de la mascotte est bouclée et la grande salle de spectacles (devant abriter les compétitions officielles) est fin prête. Mais la sécurité n’est pas de retour pour permettre le regroupement national.

La Biennale, c’est aussi sa dimension économique, à travers plusieurs secteurs d’activités, tels l’hôtellerie, le transport, la restauration, etc. avec la présence des délégations des 8 régions du pays et des professionnels des arts et de la culture. Avec la crise, Mopti doit donc attendre avant de recevoir le Mali dans sa diversité, comme l’ont fait les régions de Ségou en 2005, Kayes en 2008 et Sikasso et 2010.

Décidemment, la crise au Nord n’a épargné aucun secteur socio-économique.

Issa Fakaba Sissoko

Envoyé spécial

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