Monde islamique : Problématique de l’unité syndicale

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Le colloque international des 13 et 14 octobre dernier, tenu à Istanbul aura vraisemblablement marqué les esprits. Dans son discours d’ouverture des travaux, le secrétaire général de la Confédération Syndicale des Fonctionnaires de Turquie, M. Ali Yalcin, a en effet, peint la situation des Travailleuses et Travailleurs dans le monde entier. Intitulé ”Syndicalisme dans le monde islamique”, son discours a précisément fait cas des questions relatives à la vie nationale en Turquie (son pays) et au plan international. Des actes terroristes aux conséquences du putsch avorté, rien n’a été occulté. Du climat de guerre, de famine, la pauvreté, les migrations à la rapacité des puissants du monde sur les ressources des pays pauvres, Ali Yalcin estime qu’il est grand temps de réagir.

Première et grande victime de tous ces maux, le monde du travail dans les pays islamiques. D’où son appel à l’émergence de nouvelles stratégies syndicales pour trouver la réponse appropriée. Et c’est pourquoi il a invité les participants au colloque à analyser sans complaisance le mouvement syndical dans les pays islamiques à la lumière des textes et résolutions produits au plan mondial, d’identifier les insuffisances, les incohérences par rapport aux prescriptions du Saint-Coran, d’une part, d’esquisser les perspectives d’une véritable solidarité, d’une collaboration tous azimuts entre travailleuses et travailleurs de la Ummah à travers leurs syndicats, d’autre part.

Toutes choses qui ont amené Ali Yalcin à poser ainsi ces questions : ”les organisations syndicales des pays islamiques et/ou leurs responsables ont quel niveau de représentation dans les structures des Nations Unies dédiées aux syndicats ? Les problèmes les concernant sont-ils traités de façon sensible ? Face à la situation, les 58 pays membres de l’Organisation de la Conférence islamique ont-ils une plateforme, un mécanisme où ils partagent les problèmes de travail ? Pourquoi n’en font-ils pas ?

En bon syndicaliste, humaniste et conscient des réalités du monde actuel, Ali Yalcin évoqua, entre autres, la situation des réfugiés, les migrants mourant dans les eaux profondes, la mort des innocents, des femmes, des hommes et des enfants dans de nombreux pays de l’Islam, les nombreuses personnes emprisonnées, les massacres des frères contre des frères, etc. Une situation des plus tristes, selon lui, qui interpelle la conscience de l’humanité. Avant d’ajouter que le silence au nom des différences de races, de couleurs, de régions, de racismes ethniques, de confessions religieuses n’était pas tolérable. Car, toujours pour lui,  ”les musulmans qui sont tous membres d’une communauté fraternelle, formée par la paix prônée par le Saint Prophète (PSL), sous le message sacré du Saint Coran, sont obligés de faire de nouveau revivre le climat fraternel en se débarrassant des désaccords entre eux, des problèmes et des distinctions artificielles”.

Reconnaissant que le mouvement syndical dans le monde et les organisations internationales vivaient une crise de confiance, Ali Yalcin estime qu’il faudrait ”constituer une nouvelle voie dans la recherche du droit du travail et la lutte syndicale … Ne pas limiter la recherche de droits pour un salaire digne de l’honneur humain avec un travail correct … Uniquement à nos propres pays”. Sinon, il sera impossible de ”résister face au capital mondial”. A ses camarades, il dira ; ”Il faut augmenter la solidarité internationale” au lieu de lutter chacun de son côté, dans une période où des employés et le capital sont réunis.

Face donc à la mondialisation, le Secrétaire général de MENUR-SEN pense que l’objectif du syndicalisme devrait être un monde où tous les êtres humains auraient de la valeur en tant que tels, ayant des conditions humaines de vie et de travail. D’où pour lui la nécessité de prendre des responsabilités pour un monde où la justice est assurée à travers la distribution des revenus de façon équitable, humaine, sereine et pacifique. Et aussi, d’unir les forces pour que les êtres humains ne s’inquiètent plus pour le lendemain et envisagent avec confiance leur futur, garantir par tous le droit d’expression, d’opinion sur l’organisation du travail, sur l’exercice des droits et libertés syndicales au lieu d’être interdits, limités, exploités.

 

QUELLE PERSPECTIVE ALORS POUR LES SYNDICATS DES PAYS ISLAMIQUES ?

Pour Ali Yalcin, les responsables syndicaux de ces pays n’ont plus d’interprètes pour ”parler les uns aux autres” car tous parlent déjà la langue du cœur” en tant que personnes” se tournant vers le même point de référence. Aussi, à le croire, il serait aisé de former un mécanisme de lutte efficace contre tous les problèmes de l’humanité, à commencer par les problèmes mondiaux du monde du travail. La donnée fondamentale est, selon lui, l’émergence d’un syndicalisme dans les pays islamiques basé sur les croyances musulmanes : ”Allah, propriétaire de la puissance religieuse, nous demandera des comptes. Nous ne rendrons pas compte seulement de ce que nous avons fait, mais également de ce que nous n’aurions pas fait alors que nous aurions pu le faire”. Avant de conclure, Ali Yalcin dira : ”Si nous restons silencieux face aux oppressions effectuées contre les musulmans dans le monde, le fait que nous soyons sunnites ou chiites, noirs ou blancs, turcs ou arabes, africains ou asiatiques, ne va pas changer la réalité que nous allons devoir rendre des comptes… la quête d’une existence de travail, d’une vie digne de l’honneur humain, d’un monde équitable pour tous, commande de s’unir, de se rassembler pour trouver des réponses convenables aux interrogations suivantes : Pourquoi est-ce que ce sont des pays musulmans qui composent la majorité de la liste des salaires les plus bas dans le monde ? Pourquoi est ce qu’il y a de nombreux pays de l’Islam dans la liste des pays qui violent le plus les standards de travail de l’Organisation Internationale du Travail ?

Appel a été ainsi fait aux participants de formuler une recommandation concrète sur la nécessité de fonder un Ordre équitable mondial. Autrement dit, créer un mécanisme dans le domaine du travail qui regrouperait les syndicats des pays islamiques et qui serait une structure accolée à l’Organisation de la conférence islamique (OCI). Toute chose qui renforcerait la solidarité, la fraternité, l’union. Car, il s’agira là d’un syndicalisme qui incarnera des valeurs universelles compatibles avec les prescriptions du Coran : Démocratie, libertés, droits de l’Homme, … Les participants apprécieront !

 

B.KONÉ

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