Votre rubrique Icône-Femina ouvre ses colonnes à une grande dame du Mali qui vient d’être récompensée du Prix Africain de l’Alimentation décerné par la Banque Africaine de Développement (Bad) au mois de septembre dernier, après avoir reçu, en 2010, la distinction du magazine African Business, qui saluait ainsi son approche et sa stratégie novatrices en matière de développement agricole. Il s’agit de Maïmouna Sidibé Coulibaly, 47 ans, fondatrice et dirigeante de la prestigieuse entreprise Faso Kaba dont le siège est à Yirimadio sur la route de Ségou. A l’heure actuelle, la société Faso Kaba fait la fierté du Mali par sa renommée internationale en matière de production et de distribution de semences certifiées.
C’est une récompense qui me motive pour aller de l’avant”, disait Mme Coulibaly Maïmouna Sidibé en recevant le Prix Africain de l’Alimentation décerné par la Banque Africaine de Développement (Bad). En effet, ce prix est une très belle reconnaissance de sa contribution au développement du continent africain qui recèle d’immenses potentialités agricoles à mettre en valeur.
Le Prix africain de l’alimentation a été décerné mercredi 6 septembre 2017, en marge du Forum pour la révolution verte africaine (Agrf), qui a ouvert ses portes lundi 4 septembre 2017 à Abidjan. Et ce prix est revenu à deux lauréates, la Kenyane Ruth Khasaya Oniang’o et la Malienne Maimouna Sidibé, qui se le sont vu remettre des mains du chef de l’État de Côte d’Ivoire, Alassane Ouattara.
D’un montant de 100 000 dollars EU, ce Prix est la reconnaissance de l’action de ces deux femmes, qui se sont distinguées par leurs initiatives audacieuses, leurs innovations techniques ainsi que leurs efforts pour changer la réalité de l’agriculture en Afrique.
“Ce prix à une signification particulière Nous identifions les hommes, les femmes et les groupes d’individus qui méritent que leur contribution à la sécurité alimentaire en Afrique soit célébrée. Nous leur démontrons notre gratitude et l’émulation de nos expressions. Nous voulons braquer les projecteurs sur ces personnes, pour qu’elles soient sources d’inspiration pour nous”, a indiqué en conférence de presse l’ancien président du Nigeria, Olusegun Obasanjo, qui préside le Comité du Prix de l’alimentation en Afrique.
Depuis la création de Faso Kaba à Bamako sous forme de Société à responsabilité limitée enregistrée au Registre du Commerce le 08 août 2007, cela fait dix bonnes années que Mme Coulibaly Maïmouna Sidibé consacre à travailler sur les semences, la production, la distribution et l’amélioration des cultures pour permettre aux agriculteurs du Mali et d’autres pays d’Afrique d’accroître leur production.
Comme le précise la dénomination de sa société Faso Kaba (pays du maïs) elle a donc commencé par la production de semences améliorées de maïs, avant d’étendre ses activités à la production de semences améliorées de mil, sorgho, niébé, arachide, mais aussi oignons, tomates, choux, pastèques et gombos. Pour un pays doté d’immenses opportunités agricoles, l’activité de Faso Kaba est bienvenue voire même très salutaire.
D’une seule tonne en 2005, la production de Faso Kaba dépasse présentement 1000 tonnes car la renommée de la qualité de ses produits ayant dépassé les frontières maliennes, des agriculteurs du Burkina Faso, du Bénin, de la Guinée et du Togo s’approvisionnent et aussi demandent conseils à Faso Kaba. Une fierté pour le Mali !
Mais comment Mme Coulibaly est-elle arrivée dans cette activité ? Chaque fois que cette question lui est posée, elle ne tarit de remerciements envers son mari car non seulement il lui a donné l’opportunité de découvrir les semences améliorées, mais ne cesse de l’y encourager. En effet, selon les témoignages de Mme Coulibaly : “C’est grâce à lui que j’ai pu monter mon projet et il continue de m’encourager tous les jours” martèle-t-elle.
C’est parce que l’idée de produire et de fournir de meilleures semences pour aider à prévenir la malnutrition dans son pays, en offrant des rendements plus élevés, est venue après que Maïmouna a vécu aux Etats-Unis, aux côtés de son époux agronome en train d’y parfaire sa formation et à qui elle dit devoir sa réussite : “Je voyais ma famille (au Mali) faire très peu de récoltes à l’hectare. Mais quand je suis partie aux Etats Unis avec lui, j’ai vu qu’il y avait plus de récoltes et je me suis renseignée sur les techniques agricoles qui le permettent. Et je me suis dit qu’à mon retour au Mali, j’allais faire la même chose avec les semences améliorées pour offrir plus de récoltes à ma famille”, a-t-elle témoigné.
Elle se souvient de cette année 1985 au pays de l’Oncle Sam lorsqu’elle venait de découvrir ces semences qui permettent d’améliorer les rendements des agriculteurs : “Dès les premiers jours, je me suis dit que c’était quelque chose à développer au Mali”. La promesse sera tenue car revenue au Mali trois ans plus tard, elle commence, lentement mais surement, à murir son projet non sans difficultés de convaincre autour d’elle de l’intérêt d’investir dans ce domaine. “Pourtant, mon mari étant dans la recherche, les agriculteurs venaient le voir pour lui demander des semences de meilleure qualité”, rappelle-telle, comme pour préciser que le besoin de semences améliorées était bien réel.
En plus, “quand on parlait agriculture, on s’inquiétait de la pluviométrie, on mettait l’accent sur les engrais, mais pas assez sur la qualité des semences. Lorsque j’ai entendu un agriculteur dire qu’il était prêt à acheter des semences améliorées, même si elles étaient plus chères, je me suis dit qu’il fallait tenter cette expérience” se rappelle-t-elle. Et cette motivation rencontrera l’assentiment de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (Agra) qui a eu confiance en elle pour mettre à sa disposition les premiers fonds pouvant aider à la réalisation de son projet, avec aussi un partenariat scellé avec l’Institut d’économie rurale du Mali lui ayant permis d’obtenir des semences développées par des chercheurs maliens et adaptées au climat sahélien pour produire un rendement deux à quatre fois supérieur aux grains de base.
L’on comprend maintenant pourquoi, ses premiers mots de remerciements en recevant le Prix Africain de l’Alimentation, Mme Maïmouna Sy Coulibaly les avait réservés, outre son mari, pour l’Agra qui l’a encore appuyée, en fin 2011, notamment pour la caution lui ayant permis l’achat d’une chaîne de conditionnement.
Au vu du parcours impressionnant de Mme Maïmouna Sy Coulibaly, on ne peut s’empêcher d’en conclure que c’est une battante. Pourtant, elle a encore une multitude de projets, notamment pour développer le conditionnement, le design et aussi pour mettre en place une stratégie marketing en mesure de faire accéder ses produits dans les marchés de plusieurs pays africains où le besoin de semences améliorées est une réalité. C’est pourquoi, nous profitons de nos colonnes pour lancer un appel aux investisseurs afin qu’ils s’intéressent aux activités de Mme Maïmouna Sy Coulibaly pour lui apporter du soutien.
Rappelons que le prestigieux Prix africain de l’alimentation décerné à Mme Coulibaly a distingué de nombreuses personnalités sur le continent. Parmi les anciens lauréats, figure d’ailleurs l’actuel président de la Banque africaine de développement (Bad), Akinwumi Adesina, ancien ministre de l’Agriculture du Nigeria.
A.B. NIANG