Mendiants et talibés à Bamako : L’Etat et les maîtres coraniques interpellés

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Jadis, les mendiants se comptaient du bout des doigts. Mais aujourd’hui, ils se comptent par millier. Surtout à travers la capitale malienne où nous retrouvons deux sortes de solliciteurs d’aide. Il s’agit des mendiants et des talibés.

 Les mendiants sont des démunis qui n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins. Parmi eux, nous avons des enfants, des personnes âgées, des personnes en bonne santé ou des handicapés, des femmes ou hommes.  Cette couche fragile de la société demande de l’aide, de l’appui (à manger ou de l’argent) aux riches ou aux personnes qui ont plus de moyens.

Par contre, les talibés sont des élèves coraniques, et normalement parmi eux, nous ne comptons que des garçons, qui en vérité, ne mendient pas. Sauf au cas où le maître coranique a du mal à subvenir à sa ration alimentaire. Mais pour eux, il n’était pas question de demander de l’argent, mais à manger. Et aussi des restes de rations.

Les talibés, contrairement aux mendiants, ne sont pas toujours des personnes pauvres ou démunies. Car parmi eux, il y a des «fils à papa» c’est-à-dire des enfants de riches commerçants Sarakolé ou de grands marabouts. Qui par amour et par conviction religieuses envoient volontiers leurs enfants apprendre non seulement les versets coraniques, mais aussi et surtout pour leur enseigner  la dureté de la vie, leur enseigner à garder la tête froide, même dans les moments les plus difficiles, et enfin pour leur ouvrir les yeux sur la réalité de la vie.

 Seulement aujourd’hui, ces deux voies se confondent, car finalement on a de plus en plus du mal à distinguer les talibés des mendiants. Cela, pour la simple raison qu’il y a de nos jours des marabouts profiteurs qui ne cherchent qu’à s’enrichir sur le dos de ces talibés.

Ainsi, durant la journée, normalement ces enfants doivent s’acquitter des tâches ménagères, aller dans la brousse pour ramasser du bois qui leur permettra de se réchauffer et de s’éclairer lors des cours nocturnes, préparer le repas et soulager le maître coranique de ses tâches quotidiennes. Parce que pour la religion musulmane, un enfant doit chercher la bénédiction de ses parents et de son maître.    

Or, qui parle de brousse, parle de village et logiquement il ne s’agit donc pas de la capitale. Mais aujourd’hui, bon nombre de ces maîtres coraniques sont à Bamako. Donc, au lieu de leur demander d’aller dans la brousse, ils leur demandent d’aller mendier. Mais pire, il ne s’agit pas seulement pour ces enfants d’aller en ville pour mendier, mais en plus de cela, leurs maîtres leur fixe une somme qu’ils devront à tout prix ramener, faute de quoi, ils seront bien bastonnés.

Aujourd’hui au Mali, nous retrouvons dans la capitale, des enfants venant de nombreux pays de la sous-région, notamment du Burkina Faso et du Sénégal. On les retrouve dans les rues, aux bords des routes, devant des concessions, etc. Ces  enfants sont exposés, livré à eux-mêmes et deviennent souvent des voleurs, des drogués et des violeurs. Ce qui fait que les jeunes filles se retrouvent souvent prises au piège de la facilité, condamnées à se livrer à une vie de débauche. Sans amour et sans protection sociale, ces enfants vivent comme dans une jungle où la loi du plus fort est toujours la meilleure.

Cela dit, il y a des organisations humanitaires qui leur viennent en aide, qui les soignent de leurs blessures et qui parfois, les encadrent. Mais, le hic est qu’ils sont tellement nombreux qu’à elles seules, elles n’y arriveront pas. Il faut donc que l’Etat malien s’y implique en construisant des centres d’accueil et de réinsertion sociale, surtout pour alléger les souffrances de ces enfants qui n’ont pas leurs parents à Bamako. Il faut également engager une campagne de sensibilisation et d’information de ces maîtres coranique afin qu’ils changent leurs méthodologies de travail. Cela va de l’honneur de notre pays.

Fatoumata Labassou TOURE               

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