De nos jours, le chômage est un phénomène de plus en plus inquiétant. Les jeunes plus durement frappés par cette crise sont le plus souvent condamnés à faire du thé dans les “grins”. C’est dans ce contexte que nous avons rencontré un groupe de jeunes chômeurs dans leur fief à Banankabougou. Trois d’entre eux exposent leurs préoccupations. Et conseillent ceux d’entre eux qui se sont engagés dans des activités antisociales.
La question du chômage est au centre de bon nombre de préoccupations. Ainsi, Moussa Abdoulaye Touré surnommé ” le Grand S” pour “le grand séducteur”, Mahamadou Coulibaly alias Barack Obama et Ousmane Sagara dit “Sagaraflow” nous parlent de leur vie de chômeurs.
“Le Grand S”, diplômé de lettres modernes à la Flash université de Bamako, souhaite devenir professeur de lettres. Entre souci et colère, il se confie à nous : “A mon âge, je suis toujours à la charge de mon oncle sur toute la ligne : nourriture, vêtement, argent de poche et j’en passe. Depuis ma sortie en 2009, je n’ai pas pu décrocher un job. J’ai cherché en vain un travail même à bas salaire pour ne serait-ce que pour être un peu autonome, il n’y a rien à faire. Le marché du travail est bel est bien fermé ou du moins à ceux qui n’ont pas les ‘bras longs’. Je me sens très souvent en colère contre la magouille et l’injustice sociale dans ce pays”.
C’est sur le même registre que Barack Obama affirme être lui aussi à la charge de ses parents, toutes taxes comprises (TTC). Ce jeune chômeur devrait être, depuis quatre ans déjà, magistrat ou à défaut avocat. Il expose sa mésaventure en ces termes : “Vous savez, je suis fréquemment en colère contre le régime malien parce que je trouve que beaucoup de choses ne sont pas normales. Surtout les concours et recrutements. J’ai passé toutes ces années à chercher un job dans un cabinet d’avocat sans succès. Je n’ai pas réussi à avoir un simple stage. Vous n’allez pas me croire si je vous dis que j’ai fait deux fois le concours d’entrée de la magistrature, une fois celui de l’ENA, une autre fois celui de commissaire de police et enfin celui de l’Emia. Mais à chaque fois j’ai mordu la poussière. Il ne nous reste qu’à flemmarder et faire et refaire le thé en longueur de journée”.
Notre dernier interlocuteur “Sagaraflow”, qui a plus blanchi que ses camarades sous le harnais du sans-emploi, dépend financièrement de son grand frère. Il a étudié l’anglais et se tourne les pouces depuis deux ans. Il souhaiterait devenir interprète ou coordonnateur de projet. De nature pas très bavard, ce jeune homme nous dit pourtant ceci : “Quant à moi je suis en colère contre l’Etat, parce qu’il y a pas d’opportunité de travail et c’est très agaçant de finir ses études et ne rien trouver à faire”.
On le voit, ces jeunes font face à des problèmes économiques majeurs. Ainsi, le Grand S, Barack et Sagaraflow sont unanimes sur ce point : ils veulent être indépendants, libres et fonder un foyer. Pour les uns, cela se traduit par un besoin de se responsabiliser et de servir son pays. Pour les autres, c’est tout simplement avoir la foi pour ne pas tomber dans la délinquance.
Ces jeunes diplômés sans emploi comme on les appelle ici gardent la tête sur les épaules. Le Grand S : “Les jeunes chômeurs qui tombent dans des activités antisociales doivent être optimistes et espérer au changement avec les nouvelles autorités compétentes… du pays”. Pour Barack Obama, “les jeunes doivent être forts et s’assumer. Croire à l’avenir et se battre jusqu’au dernier bout”. Pour Sagaraflow, “ils doivent s’investir dans la création de micros entreprises et doivent être aidés dans ce sens-là”.
Kadidiatou Djiré (stagiaire)