En cette période de pénurie de gaz butane, le charbon et le bois sont devenus des alliés de taille des ménagères. Une aubaine pour les vendeurs de ses produits qui se frottent bien les mains.
Les bonbonnes de gaz sont devenues un luxe à Bamako. En cette période où le besoin se fait sentir, il est très difficile de s’approvisionner à cause de la grève des opérateurs gaziers.
Une situation qui profite bien aux vendeurs de charbon et de bois de chauffe dont la consommation constitue un danger pour les massifs forestiers, car ceux-ci voient la demande augmenter de jour en jour.
“On dit que le malheur des uns fait le bonheur des autres. Tel est notre situation en cette période. Avant, les gens étaient beaucoup plus tournés vers le gaz butane à cause de la rapidité et surtout ceux qui sont allergiques aux fumées. Depuis ce manque, j’avoue que mes charbons marchent beaucoup plus. Avant, par jour je ne vendais que trois sacs de charbon par semaine, mais aujourd’hui, j’arrive à vendre cinq sacs par jour à raison de 5000 F CFA par sac et d’autres 4 500 F CFA. Je peux me retrouver avec 25 000 F CFA ou plus”, se réjouit Aïchata Kéita, vendeuse de charbon et de bois à Hamdallaye. Elle précise : “pour les bois, les gens sont un peu réticents. Le bois ne marche mais pas autant que le charbon. Seuls les grands ménages ont encore recours au bois”.
Aïchatou Konaré
BLAISE DIARRA, RESTAURATEUR: “Nous subissons”
Jérémy Blaise Diarra, restaurateur, tenancier d’une gargote, affirme qu’ils sont les premières victimes de la crise de gaz.
“Nous n’avons pas le choix. Nous sommes obligés de supporter cette flambée des prix du gaz car la bonne marche de notre activité en dépend”, affirme, déçu et fataliste, Blaise, propriétaire d’un petit resto en plein air situé au bord de la route menant vers le pont des Martyrs.
En effet, depuis quelques semaines, ce quadragénaire employant quatre personnes dont une femme, assiste, impuissant, au doublement du prix du gaz. Alors qu’il déboursait 3 500 F CFA pour la bonbonne de six kilos, actuellement il paye 7 000 F CFA ou plus pour la même bonbonne. Une dépense supplémentaire non négligeable. “Actuellement ce n’est pas du tout évident. Car nous utilisons au total quatre bonbonnes de gaz pour assurer pleinement notre cuisson. Ce qui peut nous faire en moyenne plus de 25 000 F CFA de dépense supplémentaire”, précise non sans peine notre interlocuteur, assis en face du goudron avec sa chasuble bleue de serveur sur les épaules.
Face à cette situation, utiliser le fourneau et le charbon n’est-il pas une solution palliative ? Non, répond Blaise. “Faire cela bousculerait totalement notre habitude de préparation culinaire. On n’y est pas habitué. De plus cela va nous être préjudiciable. Le fourneau est très lent or on ne peut pas faire attendre trop longtemps les clients”, renchérit-il, avant de nous confier devoir à certains de ses employés du fait de l’augmentation du prix du gaz qui, à ses dires, absorbe une importante partie des bénéfices réalisés. “L’argent qu’elle aurait dû percevoir a été utilisé pour acheter le gaz”, révèle Blaise, qui en plus de deux épouses, doit joindre les deux bouts pour nourrir ses sept enfants.
“Déjà nous avons moins de clients. Si en plus, le prix des choses commencent à augmenter, cela devient préoccupant. Que les protagonistes notamment le gouvernement joue son rôle pour trouver une issue favorable et atténuer notre souffrance”, formule avec ardeur et espérance le propriétaire du restaurant.
Mamadou Oury Diallo
(stagiaire)
GAZ ET MENAGES A BAMAKO
Le paradis perdu ?
Avec le niveau de développement actuel de Bamako, l’utilisation du gaz s’impose comme la seule alternative de satisfaction des besoins de ménage. Il est jugé propre, rapide, peu encombrant et contribue fortement à l’amélioration des conditions de vie des populations. Cette source d’énergie moderne, pour les Bamakois, occupe une place centrale dans les ménages et constitue également une alternative de premier choix pour la lutte contre la déforestation.
Selon Souleymane Kanouté, conseiller à l’orientation au Cap de Lafiabougou, le gaz occupe une grande place à Bamako parce que, dit-il, le charbon et le bois de chauffe coûtent très cher et on n’en trouve pratiquement pas.
A l’en croire, une bouteille de gaz peut faire plus de temps que le charbon ou le bois. Pour M. Kanouté, le gaz n’est pas seulement d’ordre économique, il est un accès facile et rapide pour les besoins les plus urgents. Le matin pour se laver ou manger dans un temps donné, le gaz est le mieux indiqué.
Le panier du ménage est très faible à Bamako. Mais avec le gaz, il y aura plus d’économie par rapport au charbon. De plus, la production et la consommation du gaz butane sont encouragées par l’Etat du fait qu’il contribue à la préservation de l’environnement.
Pour sa part, Mme Traoré Aminata Doumbia, agent de la mairie à la retraite, explique que le gaz a une très grande place dans les ménages car il est rapide, fiable et propre. Elle affirme qu’une seule bonbonne de gaz peut faire le travail de deux sacs de charbon tout en étant plus pratique. “Le matin, quand je me lève, j’utilise uniquement le gaz pour gagner du temps et venir à l’heure au travail”, explique-t-elle.
Maïmouna Kéita, ménagère, a en sa possession, un sac de charbon et une bonbonne de gaz comme secours. Elle utilise fréquemment le charbon et le gaz pour les cas les plus urgents.
Ibrahima Ndiaye
PENURIE DE GAZ AU MALI
Le calvaire des ménagères
Le gaz est devenu un élément important dans le quotidien des Maliens surtout en cette période de fraîcheur.
Le prix du gaz monte en flèche. Les femmes souffrent le plus. Tout a commencé avec l’arrêt des chargements de gaz. Et les distributeurs se font rares. Quant aux revendeurs, le marché est de nouveau relancé. Le prix est monté vertigineusement. Tout Bamako se plaint de cette hausse des prix.
Avant, la bouteille de gaz de 6 kg était chargée à 3 500 F CFA et maintenant le prix varie entre 10 000 F CFA et 8 000 F CFA. Avoir une bouteille de gaz chargée est devenu un vrai luxe. Et le charbon n’en est pas moins, vu son prix actuel. Alors qu’il est indispensable en cette période de froid, car allumer le feu de charbon est devenu un souci.
“Avant cette montée des prix, je faisais presque tous mes travaux avec le gaz. Mais avec cette crise, les travaux ménagers me prennent plus de temps qu’avant. Mon mari ne veut pas aussi augmenter le prix des condiments. J’essaye de me débrouiller avec le peu qu’il me donne et tout le monde sait que le charbon aussi a connu une récente augmentation”, explique Mme Konaté Aminata Sylla, une femme au foyer qui vit un calvaire avec ce manque de gaz.
Mme Diarra Djénéba Keïta appelle les hautes autorités à trouver une solution à ce problème. Elle explique : “le travail avec le charbon n’est pas facile surtout pour nous qui commençons nos travaux depuis 5h du matin. J’appelle l’Etat à vite prendre des précautions pour mettre un terme à cette crise”.
Cette crise ne se fait pas ressentir uniquement par les femmes aux foyers, même les vendeurs de nourriture, les propriétaires de restaurant souffrent aussi de la situation. Moctar Guindo, vendeur de nourriture à Niamakoro affirme que cette crise se fait ressentir sur les revenus de son entreprise. Il explique : “avant, j’utilisais deux bonbonnes de gaz en une semaine, mais maintenant je recharge juste une bouteille de gaz et je suis obligé d’acheter du charbon de bois, qui aussi est devenu un peu cher. Je perds même de la clientèle parce qu’il y en a qui trouvent que le service est lent”.
Sira Diarra
MICRO-TROTTOIR
Les Bamakois exigent un consensus entre l’Etat et les opérateurs gaziers
Le manque de gaz butane sur le marché impacte négativement sur le train de vie des ménages. Selon certains habitants de la capitale, il est important que l’Etat et les opérateurs gaziers trouvent rapidement une solution à la crise.
Habibatou Oueloguem (étudiante à la Faculté de médecine) :
“Il faut une solution au plus vite. Dans notre quartier à Point G, il fait très froid. Je ne peux pas allumer du charbon ou du bois, puisque je vis au campus. Je vis mal cette pénurie. Je suis allée en cours sans avoir pris un bain le jour même de la rentrée. Je ne pouvais pas prendre mon bain avec de l’eau froide. Avec la fraicheur du point G, je ne prends pas de risque”.
Ali Coulibaly (vendeur d’omelette) :
“Cette pénurie me coûte ma clientèle. Avec le gaz je pouvais servir plusieurs clients en un temps record, mais avec le charbon c’est différent. J’aurai préféré la hausse de prix plutôt que ce manque, qui n’est pas bon pour mon commerce”.
Mme Sylla Aminata Diarra (ménagère) :
“Cette situation me met hors de moi. Je prépare le repas avant d’aller à mon travail. Avec ce manque de gaz, je suis obligée de me tourner vers le charbon. Les vendeurs de charbon se frottent les mains maintenant. Le prix d’un sac a pris l’ascenseur. Un sac de charbon est maintenant à 6 000 F CFA. C’est de mal en pire. Le frais de condiments n’est pas suffisant. Je suis contrainte de faire preuve d’économie avec le peu de gaz qui me reste”.
Moulaye Koné (chef de famille) :
“La hausse du prix fait mal au moment de recharger. J’ai rechargé les deux bonbonnes de gaz de ma famille et ça m’a coûté 20 000 F CFA, soit 10 000 F CFA par bouteille. Il est temps que l’Etat revoit ce problème. S’il faut que la population soit confrontée à des crises de ce genre, ce n’est pas chose aisée. Tantôt c’est la grève des sociétés de gaz, tantôt la hausse de prix et le manque. Quand est-ce que nous aurons notre propre usine de gaz butane ? Il faut une solution durable”.
Alimata Coulibaly (ménagère) :
“J’ai toujours fait ma cuisine avec le charbon, donc la hausse du prix de gaz ne me pose pas de problème vu que je ne l’utilise pas. Contrairement à ceux du charbon qui est devenu cher suite à la rareté du gaz”.
Propos recueillis par
Oumou Fofana