Le vendredi 5 avril dernier, plus de 10 000 Maliens sont descendus dans les rues de Bamako à l’appel des leaders religieux, pour montrer leur mécontentement contre les violences dans le Centre du pays.
Enseignants grévistes, cheminots, opposants et autres réfracteurs au pouvoir s’étaient tous mobilisés pour répondre à l’appel du président du Haut Conseil Islamique et du Chérif de Nioro.
La marée humaine est partie de la Bourse du travail juste après la prière de vendredi. Sous un soleil de Plon, des milliers de jeunes, de femmes et de vieux se sont rués vers le Monument de l’indépendance. En l’espace de deux heures, ils ont réussi à occuper le Boulevard de l’indépendance à la place du Cinquantenaire jusqu’au niveau de la Cité administrative.
Pancartes et banderoles exhibées main, ils scandaient des vois hostiles au régime sous l’œil vigilant des forces de maintien d’ordre positionnés sur les artères débouchant à la place de l’indépendance.
Les manifestants ont surtout réclamé la démission du gouvernement ainsi que le départ des forces militaires internationales (MINUSMA, Barkhane, G5 Sahel) présentes dans le pays.
Pour rappel le massacre d’Ogossagou où au moins 157 villageois ont été assassinés le 23 mars est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. D’où l’appel des deux associations communautaires qui s’accusent mutuellement dans ce drame de mobiliser leurs militants à participer à la marche.
Jets de pierre, pneus brûlés et gaz lacrymogènes ont été lancés à proximité du domicile du Premier ministre qui a été la cible de certains manifestants de retour de la marche.
Mais déjà depuis plusieurs mois, l’imam Dicko et son chef de Nioro multiplient les attaques contre le gouvernement. Une attitude que certains interprètent comme une volonté de s’imposer sur l’échiquier politique. « Mahmoud Dicko mène un combat personnel », a déclaré Mahamadou Camara, membre de la majorité sur les antennes de RFI . « S’il veut faire de la politique, qu’il descende dans l’arène », conclut-il.
Pour l’opposant MountagaTall, cette mobilisation pour Ogossagou était une nécessité. « Partout dans le monde, il y a eu des manifestations. Il serait honteux que rien ne se passe à Bamako », explique-t-il. Sur les intentions politiques de Mahmoud Dicko, MountagaTall reste prudent: « je ne peux pas sonder son âme, mais en politique il faut abandonner le turban. »
En tout cas si Mahmoud Dicko n’a pour l’heure pas fait part de ses intentions, une certitude, il doit quitter son siège de président du Haut conseil islamique dans quelques mois. Son deuxième mandat arrivant à échéance.
Pour rappel cette offensive des leaders religieux contre le régime a commencé d’abord en décembre contre un programme d’éducation sexuelle qui a fait rétropédaler le gouvernement. Elle a repris, en mi-février, avec le rassemblement du stade du 26 mars à Bamako.
Leaders religieux annoncent que si leurs revendications ne sont satisfaites, ils appelleront à une nouvelle manifestation vendredi prochain.
Mohamed Naman Keita