Suite à certains propos tenus par le président du RPM, Ibrahim Boubacar Keïta, lors de la conférence-débat du parti sur la vision du Président ivoirien, Laurent Koudou Gbagbo, des propos parus dans la presse malienne et soutenant que « Laurent Gbagbo n’a aucun sang malien sur les mains », la réaction des victimes et rapatriés de Côte d’Ivoire ne s’est pas fait attendre. En effet, à travers un point de presse organisé à cet effet le samedi 9 octobre 2010, ils ont décrié ce qu’ils ont qualifié de « complicité » entre Laurent Gbagbo et l’ancien Premier ministre, ancien président de l’Assemblée nationale, et « une insulte » de Laurent Gbagbo à la mémoire des Maliens qui ont perdu la vie ou jusque-là portés disparus, lors de des événements de la crise ivoirienne.
Ce point de presse était animé par Balla Magassa, président de l’Association des rapatriés de la Côte d’Ivoire, et Mme Oumou Coulibaly, présidente de la coordination des Associations de rapatriés de la Côte d’Ivoire. D’entrée de jeu, Balla Magassa a indiqué : «Nous avons été indignés par les propos d’Ibrahim Boubacar Keïta, et nous ne saurons nous taire sans le rétablissement de la vérité ».
En tant que témoin oculaire, il révèlera qu’en Côte d’Ivoire, des Maliens ont été victimes d’un charnier orchestré par les autorités ivoiriennes, avant de poursuivre que ces Maliens ont été tués car ils avaient été assimilés à des rebelles, tout simplement à cause des amulettes et d’autres gris-gris qu’ils portaient.« IBK est un élu de la Nation et est sensé défendre les intérêts de ses concitoyens, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. Mais lorsqu’il tient de tels propos, cela apparaît comme une insulte à l’endroit des Maliens de la Côte d’Ivoire et, à l’endroit de ceux qui ont perdu des proches. Ce qui constitue une seconde mort pour les victimes », a t-il laissé entendre.
Selon Balla Magassa, des preuves palpables existent sur ce charnier dont des Maliens de Côte d’Ivoire ont été victimes, puisque des photos avaient été prises avant que les corps des victimes ne soient enterrés ; et des recensements avaient été effectués dans les différentes villes de Côte d’Ivoire ayant fait état de plusieurs assassinats et disparitions. Mr. Magassa a soutenu que dans la seule ville de Daloa, il y a eu plus d’une centaine de tués, car les Maliens étaient devenus « persona non grata », pris comme cibles et soupçonnés d’être du côté des rebelles. En plus, Mr. Magassa ajoutera que ces maliens ont été victimes de plusieurs autres injustices, puisque certains d’entre eux, après avoir été chassés de leurs champs et dépouillés de leurs biens, ont été obligés de fuir en tout abandonnant tout derrière eux..
Quant à Mme Oumou Coulibaly, elle a indiqué que les Maliens rapatriés de Côte d’Ivoire ont été blessés par les propos tenus par IBK ; des propos qui ont sonné comme une seconde mort pour les victimes. Pour ses intérêts politiques, IBK vient ainsi de vendre les Maliens rapatriés à son ami Laurent Gbagbo, a-t-elle soutenu.
Pour sa part, le président du club de soutien des Maliens de l’extérieur, Zana Goïta, s’est dit très déçu par un tel comportement, surtout qu’il provient d’un élu de la nation. Selon lui, le monde entier a reconnu qu’il y a eu un charnier en Côte d’Ivoire ; et il est intolérable qu’un élu de la nation, de surcroît ancien Premier ministre, ancien président de l’Assemblée nationale et futur prétendant au fauteuil présidentiel, tienne de tels propos à l’encontre de ses concitoyens, rien que pour ses intérêts politiques personnels. Toute chose qui prouve qu’il ne fera pas l’affaire des Maliens s’il lui arrivait de se présenter aux élections présidentielles de 2012, a-t-il ajouté.
L’ancien membre du Conseil de la jeunesse malienne de Côte d’Ivoire, Modibo Camara, lui, ira plus loin. A ses dires, partout où il y avait des Maliens en Côte d’Ivoire, il y a eu des assassinats, contrairement à ce qui avait été rapporté par les autorités ivoiriennes. En se portant comme défenseur du Président Laurent Gbagbo contre ses concitoyens, Ibrahim Boubacar Keïta vient de démontrer qu’il est l’ennemi des Maliens de la Côte d’Ivoire et qu’il discrédite l’image du Mali et les actions que les Maliens de Côte d’Ivoire sont en train de mener pour l’indemnisation des victimes et l’éclatement total de la vérité, a souligné Modibo Camara, tout en rappelant d’ailleurs que le gouvernement ivoirien a toujours pointé un doigt accusateur sur le Mali et le Burkina Faso pour être à la base de la rébellion en Côte d’Ivoire.
Ce point de presse a été marqué par plusieurs témoignages oculaires sur des charniers dans différentes villes ivoiriennes où se trouvaient des Maliens, lors de la rébellion. Les Maliens rapatriés de la Côte d’Ivoire ont d’ores et déjà porté plainte au niveau de la Cour de justice de la CEDEAO, pour que les victimes soient indemnisés par la Côte d’Ivoire. Ils envisagent également de porter plainte contre IBK pour ses propos diffamatoires et organiser très prochainement une marche de protestation qui partira de l’Assemblée nationale jusqu’à l’ambassade de la Côte d’Ivoire au Mali, pour l’indemnisation des victimes et le rétablissement de la vérité.
Par Dieudonné Diama