« Mali : le défi du terrorisme en Afrique » : Cacophonie au sommet de l’Etat autour d’un livre

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«Mali : le défi du terrorisme en Afrique» est le livre que vient de publier Colonel Alpha Yaya Sangaré, Officier des Forces Armées maliennes. La dédicace de l’ouvrage a eu lieu le samedi 24 février 2024 sous la présidence du ministre d’Etat, porte-parole du gouvernement, Colonel Abdoulaye Maïga. Et voici que quelques jours plus tard, son contenu est désavoué par le MDAC pour non-respect de certaines «procédures».

«Mali : le défi du terrorisme en Afrique », est un ouvrage de 400 pages accueilli avec plein  d’éloges le jour de sa dédicace et son auteur à coup de félicitations. Il brosse la réalité du terrorisme sur le continent africain, avec le cas du Mali pouvant servir de leçon au continent. Soulignant le terrorisme comme une menace réelle sur la sécurité des populations, la stabilité des institutions, l’officier propose des pistes. L’ouvrage  prône de nouvelles approches politiques, des réformes institutionnelles courageuses, une réorganisation stratégique et agissante.

Puis, coup de théâtre au JT du vendredi 1er mars ! Un communiqué du ministre de la Défense et des Anciens combattants par intérim, Général de Brigade Daoud Aly Mohammedine, déplore que «certains paragraphes de ce livre portent de prétendues incriminations graves de violation des droits de l’homme par les FAMa avec la complicité de la hiérarchie militaire et des sabordages à l’égard de l’Etat du Mali.» Des faits que le MDAC dénonce tout en se désolidarisant des «fausses» accusations à l’encontre des FAMa. Il constate, en outre, avec «regret», que «la procédure et le processus de validation de publication de l’ouvrage n’ont pas été respectés». Dans cette affaire, il y a manifestement une histoire de lâchage en plein vol. Reste à savoir qui, entre l’Etat et son officier, a lâché qui en plein vol?

Facilité vs Sensibilité

Comment un ministre a pu présider une cérémonie de dédicace d’un livre, dont il ignore le contenu, dont son entourage n’a pas la maîtrise ? Comment le contenu du bouquin portant sur une question de sensibilité nationale a-t-il pu échapper aux services de renseignements ?

De deux choses l’une : soit l’auteur a choisi d’ignorer les procédures recommandées par la hiérarchie, soit celle-ci est tombée dans une facilité «certaine»  qui prend à contre-pied la rigueur requise par ‘’Mali Koura’’. En effet, elle aurait dû se procurer le livre avant la dédicace, au lieu de le soutenir à travers le cachet «officiel» par la présence des ministres pour ensuite constater une semaine plus tard, qu’on s’est mépris et décider de se «désolidariser» à travers un simple communiqué. Le coup est déjà  parti. Mais il peut être ‘’rattrapé’’ car l’auteur, qui a loué les efforts continus des FAMas sur le terrain, ne semble pas être de mauvaise foi. Même entre les mains de porteurs d’uniformes, la plume et le micro peuvent s’avérer des armes sur des sujets sensibles.  Cependant, il ne faudrait pas que l’ouvrage qui peut être une opportunité à exploiter dans la lutte contre le terrorisme, soit le déclencheur d’un foyer incandescent.

Ousmane Tangara

 

Qui est AYS ? : Un colonel connu !

Polyglotte, expert en sécurité, renseignement militaire, défense et criminologie, Colonel Alpha Yaya Sangaré a obtenu un doctorat en Sciences Politiques en 2018 à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar avec la ‘’Mention Très Honorable’’. Il a fait ses débuts de carrière au Prytanée Militaire de Kati (PMK). Après son baccalauréat obtenu avec brio, il est admis sur concours à l’Emia. Avide de savoir, il a poursuivi avec les études sanctionnées par une Maîtrise à la Faculté des Sciences Juridiques et Économiques du Mali (FSJE) et un Master à l’Université Wilmington, dans le Delaware (États-Unis), avec comme spécialité : «Sécurité Intérieure et Criminologie».

 

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2 COMMENTAIRES

  1. Puis, coup de théâtre au JT du vendredi 1er mars !

    Le JT de la caisse de résonance de Bozola est un théâtre permanent et ses animateurs sont les meilleurs comédiens de la planète… Cela dit, si le sérieux était de rigueur comme cela est prôné urbi et orbi par ces temps de refondation qui courent, alors les hauts représentants de l’État présents à la cérémonie doivent être virés (comme il se doit en politique sans autre forme de procès) pour avoir donné le cachet officiel de l’État à ce qui sera ensuite dénoncé par le même État.

    Pensées rebelles.

  2. Cet cadre militaire, colonel et brillant esprit a été arrêté dans l’indifférence générale pour avoir dénoncer les dérives de son corps d’attache.
    L’information est cachée ou ignorée exprès.
    C’est le signe que ce qu’il a écrit est fondé. La vérité blesse. Elle est cependant nécessaire quand on ne veut pas se mentir et mentir aux Maliens.
    Monsieur Sangaré peut dormir en prison la conscience tranquille. Il a eu le courage de dire la vérité.
    Il aurait pu être lâche, se taire et parader en tenue militaire la conscience torturée par l’indignité d’un silence coupable. Il a accepté de faire honneur à son corps en refusant d’être un lâche et pris le risque de perdre une situation confortable.
    Dans son esprit, ce diagnostic sans concession devrait permettre de faire évoluer l’armée en mettant le doigt sur ce qui ne va pas. La suite lui rendra raison et ce jour, tous ceux qui ont gardé le silence sur son arrestation baisserons la tête. Cette arrestation est aussi le signe que la liberté d’expression et la liberté tout court n’est plus assurée au Mali. Personne ne se plaint pour le moment. Pourquoi ? Parce que tout le monde se dit ” je ne suis pas touché “. Comme disent les Burkinabés: Allons seulement, ça va te toucher. Mais ce sera déjà trot tard.

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