Le trafic et le travail des enfants est un fléau qui a pris de l’ampleur dans notre pays. En dehors de quelques cas isolés, la lutte contre ce phénomène qui ronge notre société, reste surtout un vœu pieux dans l’esprit de ses initiateurs.
Il suffit d’arpenter les ruelles ou de faire un tour sur les différents chantiers en construction, par exemple dans l’ACI 2000 pour comprendre que le droit des enfants est toujours bafoué au Mali. Des progénitures en âge de mettre pied à l’école, se transforment en maçons, mécaniciens…
Les statistiques relatives à ce fléau ne permettent plus d’avoir ni une idée claire de l’ampleur du phénomène, ni des résultats obtenus quant à son éradication. Les experts en la matière ont préféré les bureaux. Le Département en charge des enfants n’a aucune ambition pour mener une bataille farouche contre le fléau. On attend toujours la célébration de la Journée internationale de l’enfant pour nous offrir des spectacles. Dans la réalité des choses, l’enfant est devenu un «objet d’art» qu’il faut exposer et caresser dans le sens du poil. Et comme notre pays est expert en matière de signature des Conventions sans avoir un large aperçu du rôle qu’il doit jouer pour l’épanouissement, les délinquants en profitent largement à travers nos frontières passoires.
Les grandes villes comme Bamako demeurent avant tout des milieux ouverts à la concentration d’enfants. Tout se passe comme si malgré tous les efforts déployés, on était revenu à la case départ, les trafiquants ayant acquis des ruses supplémentaires pour pouvoir se livrer impunément à leur passe-temps favori. Face à cet état des lieux, la lutte contre le phénomène ne doit-elle pas changer de forme et de visage. L’irresponsabilité de certains parents est aussi l’une des causes du drame que constitue le fléau. Sans moyens, doit-on mettre assez d’enfants au monde au bonheur des escrocs tous azimuts? On «produit» des enfants comme des truies. La mère qui n’a pas mis les pieds à l’école, traîne chaque jour sur le lit avec le mari, ne sachant pas que mettre un enfant au monde est synonyme de moyens aussi bien matériels que financiers. Il n’est pas rare de voir un père de famille ayant comme profession gardien avec un maigre salaire, traîner derrière lui une multitude d’enfants.
Ainsi, dans beaucoup de cas, ce sont les géniteurs eux-mêmes qui sont à l’origine du travail et du trafic de leurs enfants. La pauvreté des uns et des autres demeure donc le principal responsable de la persistance du phénomène. Et pour cette raison, il faut prévoir contre lui une approche qui tienne compte des spécificités des milieux où on doit le combattre. Là où l’enfant est perçu comme un outil économique et social, là, la répression et l’interdiction simple ne peuvent pas aboutir. C’est le cas le plus souvent dans les zones rurales et la seule persistance du phénomène indique que les méthodes actuelles de lutte ne sont pas appropriées.
Destin GNIMADI