« Abolir les entraves à la libre circulation dans l’espace CEDEAO », tel est le but d’une campagne de plaidoyer à l’endroit des décideurs, intitulée « semaine de mobilité régionale ». La campagne qui se déroulera simultanément en Côte d’Ivoire, au Mali, au Niger et au Sénégal, en ce qui concerne notre pays, a été lancée le 29 mai 2014, au cours d’une conférence de presse animée au siège de l’Association malienne des expulsés (AME).
Décidément, la CEDEAO des Etats peine à faire sa mue pour devenir une CEDEAO des peuples. Du coup, dans les Etats francophones membres de la CEDEAO des voient se lèvent pour dénoncer l’inefficacité de cette institution dédiée à l’intégration sous régionale. Dans les Etats anglophones membres, il n’est pas rare d’entendre : « ECOWAS doesn’t Work » ou la CEDEAO ne travaille pas. Il y a 35 ans les chefs d’Etat des pays membres de la CEDEAO ont paraphé à Dakar, un protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement. Entré en vigueur dès 1980, il a fait l’objet de plusieurs protocoles additionnels qui reconnaissent aux citoyens des pays signataires le droit d’entrée, de se déplacer, de séjourner et de s’établir dans un des pays membres quels que soient les motifs du déplacement. Aujourd’hui, à l’heure du bilan, l’on constate que la libre circulation des personnes et de leurs biens dans la sous région ouest africaine, est un vain mot. « Malgré qu’il met l’accent sur la libre circulation des personnes et des biens, nous constatons depuis 35 ans des lenteurs qui ne s’expliquent dans l’application du protocole et de ses actes additionnels », a indiqué Mamadou Konaté, conseiller juridique à l’AME. Avant d’énumérer la longue liste des difficultés, Mamadou Konaté dira au titre des acquis qu’il n’y a pas de visa entre les Etats membres de la CEDEAO. Il a aussi cité l’exemple du passeport CEDEAO et la reconnaissance formelle d’un droit d’entrée, d’un droit de séjour et d’un droit d’établissement. « A coté de ces acquis, il y a de nombreuses difficultés qui motivent notre campagne », a-t-il déclaré. Selon lui, les ressortissants des Etats membres de la CEDEAO se perdent dans la multitude des textes qui existent au niveau de cette institution. Il a aussi dénoncé la possibilité qui est offerte aux Etats membres de pouvoir expulser des ressortissants d’un autre Etat membre. Mamadou Konaté a constaté la non applicabilité des textes de l’institution. Selon lui, cela est caractérisé par les tracasseries aux frontières et sur les routes qui se matérialisent par des prélèvements illicites, sans qu’aucun n’Etat ne lève le petit doigt. Il a aussi dénoncé la lenteur dans la ratification de certains textes par les Etats membres et le nombre élevé des réserves émises par les Etats. Face à toutes ces difficultés, Mamadou Konaté, au nom de l’AME propose la révision du protocole de 1979 pour corriger les insuffisances. Il a aussi souhaité l’harmonisation des prix et des durées de vie des passeports CEDEAO. En plus de la réduction des barrières et des postes de contrôle sur les axes routiers, il a suggéré qu’après 35 ans la libre circulation des personnes et des biens devaient être une réalité en Afrique de l’ouest. Pour sa part M. Niambélé de l’Association des refoulés d’Afrique centrale au Mali (ARACEM), a proposé la pénalisation des prélèvements illicites. Quant à Lancine Coulibaly du ministère des maliens de l’extérieur et de l’intégration africaine, il a estimé que même s’il reste encore des défis à relever, qu’il faut admettre qu’un long chemin a déjà été parcouru sur la voie de l’intégration sous régionale. « Il ne faut pas perdre de vue le rêve des africains d’avoir un continent où il n’y a pas de frontières entre les pays », a-t-il déclaré. Organisée au Mali par Loujna Tounkaranké, composé de l’AME et de l’ARACEM, la campagne prévoit entre autres activités, la remise de documents de campagne et du film « passagers du désert » aux Présidents des institutions des droits humains et organisations communautaires et aux responsables des ministères techniques. Il est aussi prévu de rencontrer les parlementaires et d’organiser des débats publics et des activités de protestations contre les tracasseries routières sous la bannière de « halte aux rackets et tracasseries sur nos routes ».
Assane Koné