Dans de nombreux pays d’Afrique noire aujourd’hui, une partie de la population continue d’affirmer que l’homosexualité vient de l’Occident et la situation des homosexuels ne cesse de se dégrader. Selon " The Daily Observer " de Banjul, lors d’un discours tenu le 18 mai dernier, le président gambien Yahya Jammeh a donné " vingt-quatre heures " aux homosexuels pour quitter le pays. "Tout hôtel qui héberge ce type d’individus sera fermé, car leur comportement est illégal. Nous sommes un pays musulman, et je n’accepterai jamais de tels individus dans ce pays " a-t-il lancé.
Il y a quelques mois, c’est au Sénégal qu’une dizaine de personnes avait été arrêtée et placée en garde à vue à la Division des investigations criminelles de Dakar. Des arrestations qui faisaient suite à la publication dans un mensuel, d’un dossier consacré à l’homosexualité, et dans lequel apparaissaient les photos de personnes qui auraient célébré un mariage homosexuel. Et il y a presque deux ans, au Cameroun, des scandales politico-médiatiques autour de " la question homosexuelle " avaient soulevé une vague homophobe sans précédent.
Finalement, dans ces trois pays, comme dans bien d’autres d’Afrique subsaharienne, le sentiment homophobe est aujourd’hui très largement répandu. Les homosexuels sont ainsi devenus les boucs émissaires de sociétés où les valeurs morales sont en perte de vitesse, où les égoïsmes prennent le pas sur les solidarités ancestrales, où l’argent est roi, quelle que soit la manière dont il est gagné, où la majorité de la population est en proie à d’incommensurables difficultés économiques et sociales.
rnDésormais, l’homophobie s’affiche au grand jour dans toutes les couches sociales. Pis, les amalgames entre homosexualité, pédophilie, pédérastie, franc-maçonnerie, Rose-Croix, prostitution, tourisme sexuel et pratiques perverses de toutes sortes se multiplient.
L’immense majorité est violemment homophobe
rnDans cette cacophonie, le débat est souvent difficile, voire impossible. Les positions sont manichéennes. Il faut être pour ou contre. Et pour l’immense majorité des populations qui est bien entendu violemment homophobe, l’homosexualité est une inclination contraire aux " traditions africaines ". D’où la résurgence du vieux mythe selon lequel, l’homosexualité aurait été introduite en Afrique par les Occidentaux.Or ce qui est vrai, c’est qu’à leur arrivée sur le continent, les premiers explorateurs et les missionnaires considéraient les pratiques sexuelles africaines comme le comble de la dépravation. Et sans avoir réalisé la moindre étude sur le sujet, ils affirmèrent que l’homosexualité n’existait pas en Afrique. Malheureusement, aujourd’hui encore, beaucoup continue de croire que l’homosexualité n’a jamais existé avant l’arrivée des Européens.
Ainsi, ces affirmations sinon mensongères, du moins hâtives, associées aux deux grands monothéismes dont l’Afrique noire a hérité, l’Islam et le Christianisme, déterminent en grande partie la perception que les populations ont actuellement de l’homosexualité. Mieux, dans la quasi-totalité des pays francophones, nous avons aussi en héritage, le code napoléonien qui a interdit l’homosexualité dès l’origine. Et lorsqu’on sait qu’en Afrique noire, l’univers de la sexualité est entouré de tabous, alors on comprend les controverses que peuvent susciter ces questions. L’on oublie trop souvent que pour tous les êtres humains, la construction de l’identité sexuelle est un processus complexe, qui intègre des facteurs psychologiques, sociologiques et culturels.
De plus, des études récentes, réalisées notamment au Cameroun, montrent que l’homosexualité est et a toujours été de toutes les cultures. Seule sa perception sociale, sa désignation, son interprétation… bref sa conceptualisation changent, en fonction des univers sociaux. Et l’histoire de l’homosexualité en Afrique noire démontre non seulement son existence, mais aussi son enracinement à travers quatre grands piliers de certaines traditions africaines. Le premier pilier concerne l’homosexualité liée aux classes d’âge et aux jeux érotiques.
Il existait par exemple chez les Bafia du Sud du Cameroun, où l’on considérait autrefois, que les garçons devaient franchir trois étapes différentes, pour bénéficier d’une bonne croissance. Au cours de la première étape, tous les garçons âgés de six à quinze ans vivaient entre eux, à l’écart des jeunes filles. D’où une très grande promiscuité, qui amenait nombre d’adolescents à avoir parfois des relations sexuelles avec les plus jeunes d’entre eux.
Le deuxième pilier concerne les rites initiatiques qui comportaient parfois des pratiques homosexuelles. Ces rites servaient soit à souder les liens au sein du groupe, soit à initier les hommes à l’art de la guerre, ou encore à permettre le passage de l’adolescence à l’âge adulte. Dans le Sud et le centre du Cameroun, deux rites ancestraux, le "Mevungu" chez les Beti et le Ko’o – l’escargot – chez les Bassa, sont des cérémonies initiatiques qui comprenaient notamment des attouchements à caractère homosexuel entre femmes.
Le Mevungu par exemple est un rite exclusivement féminin, dans lequel les initiées ménopausées jouent le rôle masculin. Ce rite n’était pratiqué que lorsque le gibier était rare en forêt ou encore en cas de mauvaises récoltes. En revanche, chez les Fang duGabon, du Cameroun et de Guinée-Equatoriale, les relations homosexuelles étaient considérées comme le meilleur moyen pour devenir riche.
Le troisième pilier concerne les pratiques homosexuelles en l’absence d’hommes ou de femmes. Chez les Azande du Sud-Ouest du Soudan, au sein des foyers polygames, les relations homosexuelles entre femmes n’étaient pas rares. Tout comme en République Démocratique du Congo, où dans les foyers polygames des femmes nkundo, les pratiques homosexuelles existaient parfois entre co-épouses, qui disaient ne pas être satisfaites par leurs maris. En Afrique australe, lorsqu’elles étaient mariées, les jeunes femmes Herero expliquaient également leurs pratiques homosexuelles désignées par le terme epang, par l’insatisfaction à laquelle elles étaient confrontées dans leurs foyers.
rnObligés de mener deux vies parallèles
Enfin, le dernier pilier, qui ne doit pas être confondu avec les trois autres, concerne l’homosexualité identitaire. Il s’agit exclusivement d’hommes ou de femmes, qui préfèrent avoir des relations avec des personnes du même sexe. Dans le Sud de l’actuelle Zambie par exemple, ces personnes étaient appelées mwaami dans la langue Ila. Et, si certaines langues africaines offrent un vide conceptuel et linguistique au sujet de l’homosexualité, d’autres permettent en revanche d’appréhender cette notion de façon très précise. On peut donc affirmer, sans risque de se tromper, que l’homosexualité, tout comme les pratiques homosexuelles existent en Afrique depuis la nuit des temps.
Malheureusement, beaucoup continuent de nier cette " évidence ", obligeant ainsi la quasi-totalité des homosexuels à vivre cachés et dans des milieux fermés. Afin de ne pas éveiller les soupçons, ils mènent bien souvent une double vie : femme et enfants à la maison en guise de couverture – au Cameroun, on appelle ça le Nfinga -, puis des relations homosexuelles en cachette. Si l’on ajoute à tout ceci les dispositions du code pénal qui criminalisent l’homosexualité dans de nombreux pays (Cameroun,Sénégal…) alors on comprend pourquoi la majorité d’entre eux ne rêve que d’exil. D’ailleurs, le véritable mythe, c’est de croire que les dispositions légales qui interdisent l’homosexualité sont une résultante des traditions africaines. Il ne s’agit là que d’un banal héritage colonial.
rn Christian Eboulé *
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rnL’information diffusée par Radionederland indispose les musulmans du monde entier
rnUn imam sud-africain affirme que l’homosexualité n’est pas un péché
rnMuhsin Hendricks, un homme sud-africain de 43 ans, est imam et homosexuel. Son association ‘the Inner Circle’ aide les musulmans en difficulté avec leur propre sexualité. Le message : "Vous avez le droit d’être homo !". Tout le monde n’était pas d’accord et Hendricks a perdu son statut officiel d’imam.
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L’imam Muhsin Hendricks a les traits tirés. Il est invité par l’organisation néerlandaise défendant les droits des homosexuels d’Amsterdam, la COC. L’emploi du temps de l’imam est chargé. Ici, beaucoup de monde s’intéresse à cet "imam rose", ainsi qu’on le nomme parfois.
rnPar enchantement
Quand il s’agit pour Hendricks de parler de sa foi et sa nature, sa fatigue disparait comme par enchantement. "C’est une forte identité que d’être musulman. Il en va de même pour le fait d’être homo. Ces identités sont les miennes et j’ai pu les réconcilier".
rnTout n’a pas été si facile pour Muhsin Hendricks. Il vient d’une famille orthodoxe d’Afrique du Sud. Son grand-père était imam dans une grande mosquée du Cap. Muhsin se rend rapidement compte de sa différence. Dans son enfance, il préfère les poupées aux voitures. On le traite d’efféminé et on le harcèle.
Ce n’est que plus tard qu’il se rend compte que l’homosexualité existe.
rnHendrik trouve refuge dans sa foi, qui selon de nombreux musulmans ne reconnaît pas les sentiments homosexuels. L’amour d’un homme pour un homme est interdit. C’est l’un des plus grands péchés, condamnés dans certains pays musulmans à la punition extrême : la peine de mort.
rnSexualité non choisie
C’est alors que Muhsin Hendricks se décide à découvrir ce qui est écrit sur l’homosexualité dans le Coran.
Il suit des études sur l’islam au Pakistan. Hendricks : "Je ne pouvais pas comprendre qu’un Dieu aimant et indulgent puisse me juger, pour quelque chose que je n’ai pas choisi"
rnMuhsin tire une conclusion intéressante de son étude. Nulle part dans le Coran on ne peut lire que l’homosexualité est interdite. Même pas dans l’histoire de Sodome et Gomorrhe. Des villes dévastées par Dieu car les hommes avaient des relations sexuelles entre eux. Selon Hendricks, les habitants n’ont pas été punis pour leur préférence sexuelle, mais pour les viols qu’ils avaient commis.
rnOn peu trouver des textes dans le Coran dans lesquels Allan reconnaît même l’existence d’homosexuels, dit Hendricks. "Comme dans la sourate 24 verset 31. Il est écrit que les femmes doivent se couvrir davantage pour les hommes. Mais pas pour les hommes qui ne se sentent pas attirés par elles. Il doit s’agir des homosexuels," conclut Hendricks.
De là à reconnaître qu’il a des sentiments homosexuels et les assumer, il y a encore un pas de trop pour Hendricks, qui se marie et a trois enfants. Son épouse sait qu’il est homosexuel, mais décide quand même de vivre avec lui.
Evanouissement
Sa mère s’évanouit quand elle apprend que son fils Muhsi est homosexuel. La compréhension parmi ses proches ne vient que lentement. Une partie de sa famille refuse de le voir.
rnL’imam Hendricks a rencontré par la suite l’amour de sa vie. Son partenaire a une autre foi – il est hindou – et n’est pas encore accepté par tous ses proches.
Il est obligé de cesser d’exercer ses fonctions d’iman à la mosquée. L’explication qu’il donne sur son homosexualité et sa foi en l’islam ne convainc pas la doctrine officielle.
Pas leur ennemi
rn"Les imams me voient comme une menace pour leur conception de l’Islam. Mais je ne suis pas leur ennemi. Je les invite seulement à considérer cette autre vision des choses.
Mon interprétation donne aux musulmans la chance de pratiquer leur religion tout en acceptant leurs sentiments." Muhsin Hendricks se considère encore comme un imam. Avec son association the Inner Circle, il essaie d’aider les musulmans à s’assumer. Hendricks anime des stages de responsabilisation afin d’aider les plus jeunes à se sentir plus sûrs d’eux-mêmes. Il donne également ces cours aux Pays-Bas. On compte déjà plus de 60 inscriptions à ce jour.
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Par Klaas den Tek
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