Lettre ouverte au Nouveau Ministre de l’Urbanisme de l’Habitat des Affaires Foncières de l’Equipement et de Transport

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Monsieur le Ministre

Avant que vous ne soyez Secrétaire général de ce département, plusieurs litiges fonciers sévissaient à Kayes. Depuis 1992, des contentieux provoqués par les services techniques (Domaine, urbanisme et IGM) de la ville.

En effet Monsieur le Ministre, je vais vous relater deux gros problèmes qui minent la vie des Kayes’ndisiens c’est-à-dire, le quartier de la rive droite de Kayes et certains habitants de la commune rurale de Khouloum dans le cercle de Kayes.

Le Dral de Kayesn’di, espace public ou place publique particulière, objet du contentieux foncier a été depuis la période coloniale, le lieu pour d’autres pratiques sociales et de prière lors des grandes fêtes de Ramadan ou de Tabaski pour les populations de ce quartier.

Il est situé à Kayesn’di, un quartier marginalisé, laissé pour propre compte, victime de stéréotypes et de stigmates a été jusqu’à nos jours écarté des politiques d’aménagement urbain de la ville de Kayes de l’indépendance à nos jours. Une inégalité spatiale que ses habitants ont du mal à digérer. Il y a une volonté politique exacerbée à ne pas aménager ce vieux quartier de Kayes : quasi inexistence de voie urbaine bitumée, ni de voirie et ses servitudes (Caniveau, collecteur, pas de dépôt de transit, ni de décharge finale). Ce qui induit forcément que le quartier croupit sous des tas d’ordures, de l’érosion, des voies urbains poussiéreuses et impraticables pendant l’hivernage.

Le Dral dont il est question et que les services techniques s’empressent de vendre aux opérateurs économiques fortunés de l’autre rive, est un espace public d’avenir pour notre quartier, qui manque des lieux de ce genre pour le rassemblement de ces habitants dans le cadre des manifestations de tout genre.

Notre quartier cherche à être une commune urbaine à part entière. Pour ce faire, il a besoin de cette place publique afin d’aménager, afin qu’il acquiert toutes les vocations, les fonctions et usages liés aux espaces publics.

Mr le Ministre, avec l’étalement urbain croisant et qu’on ne maîtrise pas, une démographie galopante, nos villes dans le cadre des politiques d’aménagement urbain ont besoin de tels espaces qui sont des lieux de socialisation d’interaction, de respiration, de mobilisation etc…

Le Dral de Kayesn’di est un substrat sociologique singulier, il a une dimension culturelle qui lie les habitants à cet espace. Par conséquent, il ne doit pas être profané et vendu pour des intérêts lucratifs et vous ne le saviez pas peut être, il a fait déjà l’objet de plusieurs altercations entre les habitants du quartier contre les services techniques et les opérateurs économiques qui veulent manu militari s’approprier de notre « âme ».

Mr le Ministre, dans la « Théorie de la Dynamique Culturelle » dont le Mali est objet actuellement avec les nombreuses réalisations dans la ville de Bamako qui sont pratiquées à travers divers usagers culturels et sociologiques (le Parc national, les espaces verts à travers la ville, les reproductions de notre art et culture au niveau des ronds points et carrefours les salles pour les théâtres et autres actions culturelles etc.), on conseille aux pouvoirs publics de ne rien entreprendre aux noms des populations en matière d’aménagement sans les consulter, sinon ces genres d’actions sont voués à l’échec. Le Dral de Kayesn’di est un patrimoine local de ce peuple et est soumis aux pratiques sociales et culturelles de ces mêmes habitants. Donc on ne peut pas venir d’ailleurs pour forcer ses occupants à déguerpir de ce lieu sans les consulter et qu’ils adhèrent.

A signaler aussi Monsieur le Ministre, qu’il existe à Kayesn’di une société civile très  dynamique qui s’est constituée pour défendre les intérêts du Dral mais, à qui, on a refusé de donner le récépissé de création de l’association.

Monsieur le Ministre, l’autre litige foncier dont il est question et qui dure moins longtemps que le problème du Dral est le domaine de l’OPAM dans la Commune Rurale de Klouloum.

De quoi s’agit-il ?

En effet Mr le Ministre, l’OPAM de Kayes dont le domaine actuel est l’objet de titre foncier depuis 1978, (un titre signé par le Général Moussa Traoré et son Ministre de l’Economie et de Finance de l’époque) est aujourd’hui occupé illégalement au vu et su de tout le monde par les opérateurs économiques véreux et cela, à travers des bails à la défaveur de ce service.

Par conséquent, pour récompenser ce service, les services techniques de Kayes ont décidé d’aller les trouver un domaine dans la commune rurale de Klouloum. Malheureusement pour l’OPAM encore, ce nouveau domaine foncier avait été vendu par la Mairie de Klouloum à des habitants et certains ont même obtenu leur titre provisoire au niveau de ces mêmes services techniques et de la Préfecture.

Mais, comme on était dans un pays dans lequel l’impunité allait grandissante et la loi du plus fort étant la meilleure et qui s’applique, les mêmes services techniques ont décidé d’attribuer à l’OPAM ce domaine déjà occupé avec titre foncier.

Mr le Ministre, aujourd’hui ce sont des nombreux habitants installés sur ce lieu et qui ont dépensé beaucoup d’argents afin d’obtenir leur titres provisoires qui attendent impatiemment (depuis six ans) le sort qui leur sera réservé.

Monsieur le Ministre, les services techniques relevant de votre département ont causé de nombreux torts à Kayes en usant de leurs prérogatives et des réseaux relationnels qu’ils ont tissés entre eux et les autres administrations concernées pour qu’ils ne soient pas interpellés un jour.

Pour terminer, Mr le Ministre je sais que votre gouvernement est un gouvernement de mission chargé spécialement de résoudre le problème du nord et d’organiser les élections mais, c’est aussi celui qui a l’opportunité de solutionner beaucoup de problèmes sociaux afin de soulager le braves populations qui ont beaucoup souffert des pratiques mal saines du régime défunt.

 

Abdramane Sadio Soumaré

Enseignant à la Faculté d’Histoire et de Géographie

De l’Université des Sciences sociales et de Gestion

De Bamako, chargé de cours d’aménagement urbain

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