Les paysans maliens face à l’accaparement des terres

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accaparement de terres
Les cas d’accaparement de terres sont nombreux au Mali et les violences qui en résultent sont parfois meurtrières. Getty Images

Au Mali s’est tenu fin mars dans la ville de Ségou le « Village des sans terre » une initiative de dialogue avec les autorités, lancée par des organisations paysannes pour dénoncer l’accaparement croissant des terres. Les communautés villageoises dénoncent l’action de grands groupes nationaux et étrangers qui achètent des terres au mépris des droits des communautés villageoise. Mais le Mali a récemment fait évoluer la loi, et les organisations paysannes espèrent que la situation va changer.

Chaque année depuis 2015 à l’initiative de la Convergence malienne contre les accaparements de terre, les organisations paysannes organisent « le village des sans terre ». Trois journées de débats et de rencontres entre agriculteurs et autorités durant lesquelles on se dit les choses franchement.

Massa Koné le porte-parole de la convergence n’a pas la langue dans la poche. «L’administration a la force brutale avec elle. Elle a la force militaire et la gendarmerie. Ils viennent sur des terres et trouvent toujours des arguments pour dire que ces terres appartiennent à l’Etat. Ils ont toujours cette idée que la terre appartient à l’Etat », déplore-t-il.

Dialoguer avec les agriculteurs

Les cas d’accaparement sont nombreux au Mali et les violences qui en résultent sont parfois meurtrières comme en décembre 2017 quand deux agriculteurs de la sous-préfecture de San ont trouvé la mort dans des heurts avec la gendarmerie. Pourtant le dialogue existe et il porte ses fruits.

Ainsi le conseil des ministres a fini par adopter fin mars les décrets d’application de la loi d’avril 2017 qui reconnait les droits fonciers des communautés rurales. Pour Chantal Jacovetti, chargée de mission à la CNOP (Coordination nationale des organisations paysannes), « le problème, c’est que l’état n’avait jamais mis en place un mécanisme pour faire reconnaitre les droits coutumiers », explique-t-elle. « Cela été la raison de cette loi sur le foncier agricole qui met explicitement tout un système en place, un mécanisme qui met au coeur les villages à travers des commissions foncières villageoises, qui vont pour la première fois elle-même délimiter leur terroir. »

Sentiment d’injustice

Mais cette loi ne va pas régler tous les problèmes. Et notamment ceux de l’accaparement des terres ancestrales au sein de l’Office du Niger qui possède plus deux millions d’hectares. « Il y a des espaces qui posent problèmes, ce sont toutes les terres immatriculées au nom de l’Etat comme l’Office du Niger. Là on est en train de travailler pour que lui-même, en s’appuyant sur la loi sur le foncier agricole, puisse protéger les villages ancestraux inclus dans ses terres », détaille Chantal Jacovetti. Mais elle prévient : « L’accaparement de terres dans l’Office du Niger lui-même risque de continuer. Alors que la première chose c’est que toutes ces terres qui sont irriguables, il y en 148 000 hectares devriaent d’abord aller aux 60 000 exploitations agricoles familiales. »

Les organisations paysannes tirent la sonnette d’alarme sur la situation dans le centre du pays. L’accaparement des terres et le sentiment d’injustice qui en découle contribuent à renforcer la défiance des populations. Et ce dans des régions déjà fragilisé par les discours radicaux.

Par rfi.fr

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