Les ménages au bord du gouffre

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« Aujourd’hui, bien que sous pression du fait de la cherté des denrées alimentaires, je ne peux me permettre d’arrêter cette activité de restauratrice, source de revenus pour moi. En 20 ans d’exercice, je n’ai jamais vu la flambée actuelle des prix atteindre ce niveau grande stresse.  Jamais.  L’oignon, la tomate, le fonio, le riz, le haricot, l’arachide… le prix de chacune de ces denrées alimentaires a monté vertigineusement. Le sucre, n’en parlons pas. Ajouter à cette gestion, le problème d’une année scolaire plus que neige et pendant laquelle nos enfants n’ont pas étudié. Alors pas du tout. Je me demande où on va dans ce pays et comment on va faire ? ».

Voilà ! « Où on va dans ce pays et comment on va faire ? » Cette question doublement anodine de la restauratrice résume en elle seule, la période de panique généralisée que traversent les ménages dans la capitale. D’un marché à l’autre, varie les prix.

Pour le riz, denrée alimentaire de première nécessité (surtout urbaine), le sac de 100 kilo est cédé entre 40000 et 42500 Fcfa selon que l’on choisisse la production nationale ou étrangère au marché de Ngolonina,. Idem pour les marchés de Médina Coura, Oulofobougou, Lafiabougou, Kalaban Coura, Dibida et Kati. A la même période, l’année dernière le prix du kilo de riz a oscillé entre 300 et 350 Fcfa.

Pour l’oignon, le kilo est vendu entre 600 et 700 Fcfa selon les marchés cités (contre 200 à 325 Fcfa l’année dernière à la même période). La tomate, de la taille d’un citron est vendue à 100 Fcfa. Le petit tas de 5 tomates, 500 Fcfa ! Le panier de tomate est à 25000 Fcfa.

Pour la pomme de terre, les prix ont grimpé. De 300 Fcfa, l’année dernière, l’on se retrouve entre 450 et 600 Fcfa selon les marchés et la provenance.

Quant au sucre, il constitue le produit qui grimpe plus que les autres. Il est déjà entre 600 et 700 Fcfa le kilo dans les « Koroborobutiki ». A ce rythme, il sera sûrement céder par les commerçants qui disposent d’un boulevard de libéralisation « intouchable » devant eux, à 800 voire 900 Fcfa à Ramadan.

Pour la question de la provenance, nos différents interlocuteurs dans les différents marchés visités nous ont laissé entre que certains produits venaient de l’Asie (riz thaï, pakistanais), du Sénégal (oignon). Certains sont produits localement. On peut citer le riz Gambiaka provenant des champs de l’Office du Niger.

Le sucre consommé actuellement dans la majorité des ménages provient des pays de l’Asie. La production locale serait-elle épuisée ?

Et d’où nous vient cette hausse brusque des prix des denrées alimentaires ?

Pour certains commerçants, l’explication résiderait dans les effets secondaires la crise alimentaire de 2007-2008. Pour d’autres, l’approche du Mois Béni de Ramadan est mise à profite par les opérateurs économiques de gros calibre, pour faire disparaître les produits, les stocker et les revendre avec des revenus plus que substantiels. Une méthode chevaleresque qui va en porte-à-faux avec les orientations et dispositions arrêtées sur instruction des plus hautes autorités de l’Etat en début d’année.

Assisterait-on à une baisse des prix avant le ramadan ? « Cela dépend. On verra bien » dit mon interlocuteur, grossiste céréalier à Niaréla. De qui ou de quoi cela dépend-il ? Il est resté muet sur la question.

 

Quel dispositif sécuritaire des ménages l’Etat a-t-il prix dans le domaine de la stabilisation des prix ? Va-t-il jouer réellement son rôle ou continuer à gérer les risques de tensions sociales prévisibles sans « toucher aux prix » ? L’intervention de l’Etat dans la stabilisation des prix est plus qu’urgente au regard des secousses de la crise alimentaire de 2007-2008. Une récidive des jacqueries surtout urbaines est prévisible surtout que la famine installée depuis mars dans certaines localités du pays, a accentué l’état de grande précarité des ménages.

 

OPTION N°9 – 29 juin 2010

 

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