Les Maliennes et Maliens de demain seront les piliers du nouveau Mali, enfin sorti de la servitude économique.

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Le Tiers Monde, les pays sous-développés, les pays en voie de développement, les pays en développement, le Sud, les pays les plus pauvres du monde, autant d’expressions auxquelles nous nous sommes habitués, et que nous, populations occidentales et africaines, utilisons sans nous rendre compte qu’ainsi, nous participons au maintien du système qui permet à l’occident, depuis le début des colonisations, d’exploiter l’Afrique, continent riche de 40% des ressources naturelles du monde.

La traite esclavagiste prenant fin, la révolution industrielle du 19ème siècle sur le continent européen devint un des moteurs supplémentaires de cette expansion coloniale, en Afrique, comme ailleurs. La conférence de Berlin de 1885, qui a établi les règles du partage de l’Afrique, a permis à chaque puissance occidentale d’être indépendante pour commencer le pillage systématique de ce dont elle avait besoin pour transformer son enrichissement purement commercial en enrichissement industriel. Les peuples africains sont devenus des «indigènes» qui, malgré les résistances, n’ont eu d’autres devoirs que d’obtempérer afin de servir de main d’œuvre à très bas prix pour un développement spectaculaire des divers pays colonisateurs, qui savaient, comme l’a dit Jules Ferry, dans un discours en juillet 1885, que le continent était un «placement de capitaux des plus avantageux». Le pillage des ressources naturelles et humaines du continent a permis le développement de l’occident, malgré les différentes crises économiques traversées, au détriment de celui des populations locales. La poursuite de cette exploitation, soigneusement orchestrée lors des indépendances malgré le combat de tous ceux qui rêvaient d’une autre Afrique, a fait passer les populations des mains du colon à celles de ses complices. C’est pourquoi les détenteurs du capital international continuent de s’enrichir, et que, nous, occidentaux, vivons dans les pays les plus développés, alors que ceux qui vivent sur le continent le plus riche du monde demeurent les plus pauvres, et ce, malgré «l’aide au développement» apportée depuis des décennies. Il y a de quoi se poser des questions sur l’orientation et l’utilisation de cette aide, qui, à coup de subventions, prêts, fonds de garantie, contrats de désendettement, finance des projets et des programmes, mobilise tant de capitaux et de bonne volonté, et crée désillusions et fatalisme chez les populations qui ne se sortent pas de la pauvreté, de la faim et de l’analphabétisme. Donner à manger à un homme ne lui sert qu’à se nourrir un jour, le former à l’autonomie lui permettrait d’alimenter la nation. Combien de fois avons-nous entendons que des forages sont creusés dans les villages, financés par tel pays ou telle ONG, mais que, faute d’entretien, quelque temps plus tard, les puits sont inutilisables ? Il n’y a qu’un pas à franchir pour en déduire que les Africains sont des incapables. On semble oublier qu’à chaque matériel correspondent toujours une maintenance mécanique spécifique et des pièces de rechange. L’entretien des machines de plus en plus sophistiquées ne peut plus être assuré par l’artisanat informel. Il faut que, comme en Occident, des formations pratiques professionnelles aux technicités modernes existent, car fournir un tracteur à des paysans ne leur sert qu’un temps, puisque le moteur ne survit pas aux difficultés du terrain et du climat. C’est grâce à un entretien professionnel ciblé, spécialisé et régulier, que ce tracteur durera. Pour en être capables, tout comme leurs confrères occidentaux, les paysans maliens devront se former, année après année, dans des centres où ils apprendront de façon pratique sur du matériel similaire. Des ateliers-chantiers ont été créés dans certaines régions, mais faute de moyens humains et financiers, ils sont en déliquescence aujourd’hui. La création de centres de formation permanente est indispensable, quelque soit le métier et le domaine. Ils devront être une priorité, car la formation et le développement de chaque individu, dans chaque village, entraîneront le véritable développement du pays. Les Maliennes et les Maliens ne doivent plus tolérer d’être à 70% analphabètes. Les chiffres prouvent que les pays les plus développés ont le niveau d’éducation le plus élevé. La formation des têtes vaut mieux que la construction de murs, à condition que nul n’en soit écarté. Il faut que la formation de toutes les filles et de tous les garçons, dès l’école fondamentale, du plus jeune âge jusqu’au supérieur, devienne l’objectif numéro un de l’investissement financier, donc culturel, du pays. Cela assurera le développement de la nation. Un large éventail de formations devra être offert afin que chacune et chacun trouvent ce qui les attire le plus, et qu’ensuite, les compétences, et elles seules, soient le critère d’embauche. Alors que l’espérance de vie moyenne en Occident est environ 82 ans,  celle au Mali, n’avoisine que 50 ans. Cette triste comparaison suffit pour comprendre que l’autre meilleur investissement pour le développement total du pays, est l’offre et la qualité des services publics de santé et de leur matériel. L’aide au développement de la coopération internationale n’aura plus de raison d’être lorsqu’une génération entière, au corps sain et à l’esprit formé, aura acquis toutes les compétences pour assurer, à elle seule, l’économie et la gestion du pays. C’est la solution pour que le Mali, pour ne parler que de lui, gagne son autonomie, et sorte de la dépendance de cette aide qui, malgré plus de cinquante ans d’existence, n’a jamais permis d’assurer le réel développement du pays. Les Maliennes et Maliens de demain seront alors  les piliers du Mali,  enfin sorti de la servitude économique.

Françoise WASSEEERVOGEL

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