Dans la suite des évènements de Mars 1991, quand l’euphorie populaire battait son plein, une loi sur la décentralisation fut votée en … pour modifier un peu notre système administratif trop centralisé et qui faisait que des citoyens, notamment les ruraux, vivaient loin de leur administration.
Sans faire l’historique de cette réforme, on peut seulement noter qu’une Mission de la décentralisation fut mise en place avec un budget colossal et dont les ramifications à l’intérieur du pays permettaient d’aboutir à de très bons résultats. Après de sérieuses études, elle décida de la création de plus de 700 communes urbaines et rurales sur toute l’étendue du territoire national.
Les élections générales qui survinrent en 1997 placèrent à la tête de ces nouvelles structures des conseillers municipaux et communaux dont beaucoup étaient des novices dans la gouvernance administrative. On refusa à l’époque d’imaginer les dégâts qu’une telle situation comparable à celle du loup dans la bergerie pouvait engendrer en raison du fait que la démocratie était brutalement venue sans éducation politique des citoyens appelés à gérer la République. Des galériens recréés maîtres des terroirs villageois et urbains à un moment où la spéculation foncière était devenue une source de richesses incommensurables…
Passé le moment de l’enthousiasme populaire, on se rendit compte de la vanité de l’œuvre accomplie parce qu’il y avait plus de communes de passion que de communes de raison. Par communes de passion on entendait les communes qui ne respectaient pas les critères élaborés par la mission de décentralisation et par communes de raison celles qui les respectaient. Des hommes politiques, des opérateurs économiques et même des simples dignitaires étaient à la source de cette chienlit par les pressions multiples exercées sur les responsables locaux des nouveaux découpages.
Pour ne prendre que le seul exemple de la région de Koulikoro, dans le cercle de Kolokani, la Commune rurale de Djiwoyo fait l’objet de plusieurs contestations par des villages qui ne s’y reconnaissent pas et refusent de payer l’impôt et les autres taxes au bureau communal. La Commune rurale politique du Méguétan (il y a un Méguétan historique et un autre politique) dans le cercle de Koulikoro fait hurler de douleur et d’indignation les populations des deux rives du Niger. Cette commune abominablement mal découpée est traversée par le Niger et comporte 25 villages dont 11 sur la rive droite et 14 sur la rive gauche.
En toute logique, en raison de la loi du nombre, le chef-lieu de cette commune aurait dû se trouver sur la rive gauche, mais des magouilleurs de la commission régionale de décentralisation corrompus par des hommes d’affaires de la rive droite, l’ont balancé sur la rive droite. Ces exemples ne sont pas des cas isolés car pareille situation foisonne fréquemment du Mandé au Baninkô.
L’Etat, au lieu de diligenter un audit pour voir clair dans cette situation trouble et séparer la bonne graine de l’ivraie, se contente de laisser ses députés voter des textes de loi qui ne sont d’aucune utilité pour le peuple et cela pour de fortes sommes d’indemnité par session pour chacun des élus.
Mais chacun sait qu’aussi bien au niveau des communes rurales que des communes urbaines, la gageure reste la gestion foncière. Selon plusieurs conseillers communaux, les communes n’ont pas de fonds propres à elles et l’incivisme fait que les citoyens ne paient pas les impôts et autres taxes nécessaires à leur survie. La seule ressource vendable reste les terres des paysans et cette logique fait que les ¾ des maires des communes décentralisées sont devenus des spéculateurs fonciers et des coxers.
Les paysans sont ahuris de voir de pauvres hères qui hier quémandaient leur pitance aux voisins ériger des bâtiments à deux niveaux, des châteaux, d’employer de jeunes ruraux dans leurs concessions rurales comme travailleurs agricoles sans compter les 4/4 et autres V8 que le moindre conseiller communal de Tountouroubougou peut s’offrir en deux saisons de présence dans une mairie urbaine sous les yeux jaloux du directeur de recherche d’un important Institut de recherche en cardiologie qui, lui, roule en 2 chevaux.
Facoh Donki Diarra
(écrivain Konibabougou)