Les avocats de Paul I Boro et de Moussa Kimbiri exigent leur libération : «Nous nous réservons le droit de porter plainte contre les personnes qui sont responsables de ces actes d’enlèvement et de séquestration de nos clients»

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Les avocats de Paul Ismaël Boro et de Moussa Kimbiri étaient face à la presse le dimanche 02 septembre 2018 à la maison de la presse de Bamako pour inviter le procureur de la commune III du district de Bamako à ordonner la libération de leurs clients. Selon les avocats, l’arrestation de Paul le 26 août 2018 et de Kimbiri le 27 août 2018 pour « tentative de déstabilisation des institutions de la République » a été faite de manière illégale. « Leur présence dans les locaux du Services d’investigations judiciaires relève plus d’une séquestration que d’une détention légale, au sens juridique. Plus précisément, les avocats demandent la remise en liberté afin que cette affaire reçoive un traitement conforme au droit. Nous nous réservons le droit de porter plainte contre ceux qui se sont livrés à des violations des droits de l’homme », précisent les avocats des détenus. Par ailleurs, ils ont saisi et interpellé le ministère des droits de l’homme, la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH), la Division droit de l’homme et de la protection civile de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation du Mali (DDHP-Minusma) d’œuvrer pour le respect des droits de l’Homme au Mali.

Cette conférence de presse était animée par Me Hassane Barry, Me Abdrahamane Ben Mamata Touré, Me Mohamed A.M Diallo, Me Alifa Habib Koné et Me Ibrahim Marouf Sacko, tous avocats à la Cour et défenseurs de Paul I Boro et de Moussa Kimbiri. Dans le dossier de presse élaboré par le collectif des avocats de Paul et de Kimbiri, il ressort que les poursuites sont engagées par le parquet du tribunal de grande instance de la commune III, notamment pour tentative de déstabilisation des institutions de la république.

Selon le collectif des avocats, les arrestations ont été faites en dehors de tout circuit officiel de poursuites puisque non autorisées par un parquet, encore moins un juge d’instruction. « Un mode d’arrestation peu ordinaire pour une affaire que la simple unité d’enquête du quartier aurait pu traiter, une détention au secret pendant plus de 24 heures sous un régime juridiquement absent du droit au Mali, un traitement inhumain et dégradant pendant la détention au secret frisant la torture. Ces pratiques, nous pensions étaient d’un autre temps, nous pensions ces pratiques à jamais révolues au Mali, c’est pourquoi, nous n’acceptons pas que cela recommence, nous disons non à toute forme d’arbitraire », soulignent les avocats de Paul et de Kimbiri.

Aux dires des avocats, les délais de la garde à vue de leurs clients ont expirés depuis le vendredi 31 août 2018. « Ce faisant, leur présence dans les locaux du Services d’investigations judiciaires relève plus d’une séquestration que d’une détention légale, au sens juridique. Les avocats ne demandent que le rétablissement de l’équilibre et le droit à une justice équitable. Plus précisément, ils demandent la remise en liberté afin que cette affaire reçoive un traitement conforme au droit », précise le dossier de presse du collectif des avocats. Sur le dossier lui-même, les avocats ont signalé que toutes sortes de rumeurs ont couru, du financement de mercenaires Burkinabé à l’armement de manifestants lors d’une marche. Il n’en est rien, indique le collectif des avocats.

A les en croire, la seule arme retrouvée avec Paul est son arme personnelle qui fait l’objet de toutes les autorisations légales. « Si d’autres armes ont pu être prétendument retrouvées, il est loisible aux autorités de poursuivre alors leurs détenteurs qui jouissent certainement jusqu’ici de toute leur liberté puisque aucune autre arrestation en dehors de Paul et Moussa n’a été annoncée », déclarent les avocats. Selon eux, ces actes violent allègrement tous les accords auxquels le Mali a souscrit au niveau international, notamment le pacte international relatif aux droits civils et politiques, la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, la charte africaine des droits de L’Homme et des peuples, la résolution de l’Union Africaine sur le droit à un procès équitable et à l’assistance judiciaire.

Les mêmes actes, disent-ils, violent également toutes les lois du Mali, notamment la Constitution ainsi que le code de procédure pénal. « Les actes posés nuisent gravement à l’image de notre pays. La situation aurait pu dégénérer puisque tous les deux ont cru à une attaque de bandits au cours de leur enlèvement. Plus grave, ils ont tous passé tout le temps de leur séquestration dans les locaux de la sécurité d’Etat menottés et cagoulés. Moussa Kimbiri par exemple est resté les bras menottés dans le dos toute la durée de sa séquestration, l’empêchant de dormir. Ces pratiques sont à bannir et doivent être condamnés par toutes les organisations de défense des droits de l’Homme », dénoncent les avocats.

«Nous faisons face à un banditisme d’Etat »

Prenant la parole, Me Hassane Barry a fait savoir que le Mali s’achemine à un moment exceptionnellement difficile : des élections contestées à tous les niveaux et quasiment par tous les candidats s’en est suivi des intimidations pour empêcher toutes contestations. S’agissant de l’arrestation de Paul et de Kimbiri, il dira que l’affaire finira d’elle-même parce qu’il n’y a aucune possibilité d’aller loin. A l’en croire, jamais le Mali n’a connu de telle violation des droits de l’homme. A ses dires, Paul a été arrêté parce qu’il ya la panique du coté du pouvoir.

A cet effet, il a invité le procureur de la commune III à prendre ses responsabilités tout en ordonnant la libération de leurs clients. Il sera suivi par Alifa Habib Koné, président de l’association des jeunes avocats du Mali qui a fait savoir que le dossier est simple et vide. « Nous n’allons pas nous laisser faire et nous exigeons le respect de tous les droits de nos clients. Tant qu’il y aura une seule violation des droits de l’homme en République du Mali, ceux qui se rendent coupables de cette violation nous retrouverons devant eux», a averti le défenseur des droits de l’homme.

Pour sa part, Me Mohamed A.M Diallo, ce dossier est vide monté en épingle pour intimider Paul et Kimbiri. « Nos clients sont séquestrés au service d’investigation judiciaire. Nous nous réservons le droit de porter plainte contre les personnes qui sont responsables de ces actes d’enlèvement et de séquestration de nos clients, qu’ils sachent qu’ils ne sont pas au dessus de la loi et qu’ils peuvent être traduit devant la justice nationale mais aussi devant les juridictions communautaires, notamment la cour de justice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples », a-t-il dit.

Avant d’inviter la Minusma à œuvrer pour le respect des droits de l’homme. « Nous ne sommes plus en sécurité au Mali, en plus du djihadisme, nous faisons face à un banditisme d’Etat. Nous allons pourchasser les auteurs des violations des droits de l’homme », a évoqué Me Ibrahim Marouf Sacko. Quant à Me Abdrahamane Ben Mamata Touré, il a déploré le fait que la perquisition de la maison de Paul I Boro a été faite sans mandat. Selon lui, la dénonciation à elle seule ne suffit plus, il faut des actes. « Nous interpellons la DDHP de la Minusma pour le respect des droits de l’Homme. Nous demandons au procureur de la commune 3 de laisser Paul et Kimbiri de rentrer chez eux », a-t-il insisté.

Par ailleurs, il a informé l’opinion que la maison de Paul a fait l’objet de cambriolage le samedi 1er septembre dans la nuit dont les objets de valeur ont été emportés. Répondant aux questions des journalistes, les avocats ont signalé que Paul et Kimbiri continuent avec la grève de la faim. Ils ont invité les autorités maliennes à cesser les arrestations extrajudiciaires, car, disent-ils, le procureur de la Cour Pénale internationale (CPI) rappelait que les faits d’enlèvement de personne relèvent de la compétence de la CPI. Enfin, les conférenciers ont interpellé le ministère des droits de l’homme, la CNDH, la DDHP de la Minusma d’œuvrer pour le respect des droits humains.

Aguibou Sogodogo

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