Haut des 50 ans, Mariam a de la prestance. La présidente de Kolaminèton, une des associations féminines du village, espère être une source d’inspiration pour la postérité.
Quand on est leader, il faut avoir le sens de l’écoute. Tout le monde n’a pas la même façon de comprendre les choses. Mais il faut être souvent sévère quand il le faut”. Telle est le credo de Mariam Diakité, la présidente de Kolaminèton. Son ambition est de regrouper les femmes du village afin qu’elles jouent leur partition dans le développement local. Elle ne ménage aucun effort pour atteindre cet objectif.
Mère au foyer, génitrice de six garçons, Mme Dao, qui est née et a grandi dans un village perdu dans la brousse, a le regret de ne pas découvrir d’autres terres que celles de sa naissance et de son enfance. La plus grande ville qu’elle connaît est Bla, située à plus de 300 km de Bamako, la capitale malienne.
Dès son jeune âge, elle s’engage dans la vie associative grâce à l’organisation sociale du milieu “minianka”, une communauté malienne située au centre et réputée pour son purisme, qui classe les gens en classes d’âge. Dans le but de créer des activités génératrices de revenus pour les femmes de sa localité, elle préside un groupement qui, depuis quelques années, bénéficie de l’appui d’une ONG en aménageant un jardin de maraîcher.
À travers les revenus générés, elle à aider son tendre époux en prenant en charge certaines dépenses familiales. “Des fois, quand la situation devient difficile pour mon mari, je lui viens en aide. Dans notre société, l’époux et sa femme sont complémentaires”, explique-t-elle.
Avec ses collaboratrices, Mariam attire la remarque des partenaires locaux et nationaux. C’est dans le souci d’augmenter leur rentabilité et être à l’abri des bêtes, qu’un ressortissant, résidant à Bamako, a offert des grillages, permettant de clôturer le jardin.
Mariam aurait pu être une de ces femmes qui se pavanent dans les voitures luxueuses dans la ville bamakoise pas, sans doute, la sueur de leur front. Mais le destin en a décidé autrement, pas aussi dramatiquement. La battante est fière de ce qu’elle est et de ce qu’elle a. Elle doit transporter les produits de son dur labeur par charrette ou par moto-tricycle. Malgré ses multiples efforts, elle ne gagne qu’entre 100 à 150 000 F CFA par saison. Cela peut paraître peu pour un citadin. Pour sa famille, c’est un bon profit et une aubaine.
De jour en jour, Mariam gagne la confiance et le respect de ses proches. En 2019-2020, l’accompagnement de l’ONG Action Mopti évoluant dans la 5e région malienne, fut pour elle, une bouffée d’oxygène. Elle peut désormais, au compte de l’association, avoir des prêts bancaires.
Dans cette contrée de la région de Ségou, les femmes travaillent dans le même champ que les hommes. Contrairement au Mandé où les femmes travaillent à leur compte et ont la responsabilité de prendre en charge les frais de la popote. C’est vers les 15 h qu’elles sont libres de faire des travaux individuels, donc le moment de s’occuper de leur jardin. “Nous pouvons travailler parfois jusqu’après le crépuscule afin d’arroser les légumes”, explique la dame.L’air courtois, le sourire aux lèvres, ses yeux rougeâtres expriment certainement les soucis obscurs et les souffrances nocturnes que la culture du territoire exige discrétion, la présidente de Kolaminèton se montre comme sœur, mère et grand-mère de la communauté.
Depuis 30 ans, la principale préoccupation de Mariam est de responsabiliser ses camarades. “Elle est toujours disponible. Elle est le moteur de l’association”, témoigne une membre de son association. C’est conscient de ces efforts fournis qu’une télé de la capitale a réalisé une émission spéciale sur la brave dame dans le cadre du Bélénitougou, un festival local organisé chaque année dont la présent eu lieu du 22 au 25 de ce mois.
Bonne préparatrice du tô, le leader femme parle bamanankan et miniyakan, même si elle a appris cette dernière grâce à son mari. Son groupe est composé d’une trentaine de membres de 30 à 60 ans.
Chacune apporte sa contribution ayant en tête que la construction du village ne dépend pas que des hommes. De la santé, de la scolarité des enfants, et le bien-être de la famille, ces dames sont des incubatrices de leurs époux.
Férue de la musique de Mamadou Dembélé dit Dabara, un artiste malien de Fana, et promoteur du genre “balafofli” dans le cercle de Bla, Mariam nourrit de l’amour pour ses petits-enfants souhaitant assoupir les nostalgies de sa première et unique fille partie “dans la grande ville” pour ne plus retourner.
Chaka Kéïta, envoyé spécial