Le village de Kabalabougou, dans la commune rurale de Mandé, est devenu un nid de litiges foncier. E

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Le village de Kabalabougou, dans la commune rurale de Mandé, est devenu un nid de litiges foncier. En effet, plus de 400 déguerpis se retrouvent, aujourd’hui, sans parcelles à cause des travaux de réhabilitation et de lotissement du village, entamés par les autorités locales. Cette gestion des parcelles qui ne tient aucunement compte des droits des populations à un logement, a crée des tensions entre les habitants spoliés et les nouveaux propriétaires terriens venus d’ailleurs. C’est l’éternelle question de mauvaise gestion du foncier dont les responsables politiques et administratifs se rendent coupables. Notre enquête.

Au village de Kalabambougou, il n’y a plus de place publique. Dans ce vieux village qui veut devenir un nouveau quartier moderne dans le cercle de Kati. Les zones réservées au marché, au terrain de football et mêmes les lieux de cultes, ont disparu sous les nouveaux tracés. C’est le fait d’une mauvaise gestion dont la responsabilité est à rechercher entre la mairie de la Commune rurale du Mandé, la préfecture et le gouvernorat de Koulikoro.  Dans une complicité souvent silencieuse, certains se sont transformés en « bouchers » du foncier, pour morceler et réattribuer des parcelles à de nouveaux acquéreurs. Des habitants déguerpis ont vu leurs espaces morcelés, purement et simplement réoccupés par d’autres. La situation conflictuelle créée gagne chaque jour en ampleur et la situation représente un vrai braisier, une bombe foncière prête à exploser.

Au cours de notre enquête, nous avons rencontré les populations, la mairie le préfet de Kati. Des habitants interrogés se plaignent de la commission chargée des travaux de réhabilitation, n’a pas correctement fait son travail. Conséquence, « plus de 400 personnes déguerpis se retrouvent aujourd’hui sans parcelles. A leur place des personnes venues d’ailleurs ! Le village n’a plus de places publiques et son développement est  devenu un parcours de combattant », soutient un interlocuteur. Alors que l’espoir a été donné au tout début par les géomètres de la commission, qu’il y aura de la place pour tout le monde.

Face à ce constat amer et malgré les différentes démarches entreprises par les représentants de la population de Kabalabougou, auprès des autorités compétentes, la situation ne bouge pas d’un iota et le mécontentement se généralise dans ce nouveau quartier.

Tout remonte en 2008, lorsque les habitants et la mairie ont mis en place une commission d’enquêtes de recensement et de population, après avoir adressé une demande, approuvée par l’arrêté N° 09-76/ GRKK-CAB du gouverneur de la région de Koulikoro, ayant permis la création d’une autre commission d’enquête foncière à travers la décision N°78/CKTI.DOM du préfet en son temps. Cette décision du préfet a occasionnée la signature d’un protocole d’accord entre la préfecture et la municipalité actuelle du fait qu’elle a été écartée du processus. Cependant, plus d’une centaine de personnes ont introduit une requête au niveau du tribunal administratif  aux fins d’annulation dudit protocole. Une requête validée par le jugement N°41 du 09 février 2012. Pour la simple raison qu’il ne prend pas en compte le droit communal. Par ailleurs, ce jugement du tribunal administratif annule aussi l’arrêté N° 09-76/ GRKK portant approbation à titre de réhabilitation, des lotissements de Kabalabougou et de Mamaribouougou, soit plus de 390 hectares.

Deux ans après la décision du tribunal administratif, la situation reste toujours stagnante, à en croire le conseiller du village de Kabalabougou, Moctar Diarra qui affirme d’une part que plus de 400 déguerpis n’ont pas de parcelles et  qu’il existe des cas de litiges fonciers. D’autres part, que la création des titres fonciers sans  le consentement du chef de village est continuelle. Ainsi, au regard de ces difficultés, les habitants du village ont récemment convoqué une assemblée générale sous la présidence du chef de village, à l’issue de laquelle, ils ont pris des mesures urgentes pour préserver les intérêts du village, disent-ils. Notamment, l’installation des déguerpis, l’interdiction des installations anarchiques de la préfecture ainsi que la mise en place d’une commission de surveillance pour la mise en œuvre des décisions  prises lors de la rencontre. « Nous voulons cohabiter dans la paix, nous ne sommes pas contre nos autorités, au contraire nous sollicitons leur soutien. Parce que, notre action s’inscrit dans le cadre du développement du village », a précisé Mouctar Diarra, conseiller de village et porte parole de la commission.

Actuellement, la situation du village de Kabalabougou connait un nouvel épisode, car la cours suprême à statuée la dessus, en validant la décision du gouverneur de Koulikoro.  Le Républicain a rencontré le préfet du cercle de Kati, Sadio Keita, qui vient à peine  de prendre fonctions. Il a expliqué que l’Etat étant une continuité, il est tenu de se conformer et de prendre connaissance de la situation qui a prévalu avant lui. Il a trouvé un processus déjà  engagé. Cependant, il lui reste une marge de manœuvre. « Ce sont les populations qui ont fait la demande des lotissements, avant de se rétracter », a-t-il constaté. Pour lui, la version selon laquelle des parcelles ont attribuées au profit d’autres personnes est fausse. C’est un démenti en bonne et due forme du préfet de Kati. Il nous a révélé avoir reçu, récemment, un arrêt  de la cours suprême confirmant l’arrêté du gouverneur de Koulikoro, concernant la réhabilitation, des lotissements de Kabalabagou et de Mamaribougou. Ainsi, au dire du préfet, après avoir reçu l’arrêt de la Cour suprême, il a sollicité la présence des acteurs concernés afin de leur notifier la décision de justice. Ainsi, il a déclaré qu’il compte rencontrer les intéressés. Ce n’est qu’en ce moment qu’il verra, s’il y a des cas d’abus pour les corriger.

Il est clair, que les terres appartiennent à l’Etat, qu’il est aussi, une continuité et que les textes doivent être appliqués, mais les autorités doivent-elles garder de vue, l’intérêt général des populations, face à toute procédure de réhabilitation. Une bonne gestion foncière, prenant en compte cette dimension humaine, est comme prévenir qui vaut toujours mieux que guérir.

Ousmane Baba Dramé

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La réaction des protagonistes

Face à cette procédure de réhabilitation qui a engendré des problèmes et une confusion totale entre les autorités et les habitants du village de Kabalabougou, nous avons donné la parole aux différents protagonistes sur la question. 

Elhadj Issiaka Traoré, Chef du village de Kabalabougou

«Je souhaite que les habitants spoliés par cette réhabilitation soient remis dans leurs droits »

Je ne vois pas d’inconvénient aux travaux de réhabilitation. Mais, je souhaite que les habitants qui ont subi des désagréments à travers cette réhabilitation soient remis dans leurs droits. Des personnes sont venues acheter des parcelles avec leurs propriétaires. Et quand les lotissements ont commencé, nous avons posé la question suivante aux géomètres : est ce que les 2.550 familles auront des parcelles après les travaux ? Ils ont répondu par l’affirmative. Ensuite, j’ai demandé aussi à ce que les parcelles soient des 15 sur 20. J’ai rassuré la population par rapport à ces situations, en disant que tout le monde aura sa part et qu’il n’y aura pas de difficultés. Au finish, nous avons constaté que les travaux de réhabilitation ne se sont pas déroulés à hauteur de souhait. Le travail a été fait dans le désordre. Ceux qui n’ont pas pu aménager leurs parcelles n’ont  pas reçu de numéro d’attribution. Cela n’a pas été se notre goût, parce que parmi ces personnes, il y a des lépreux, des aveugles et des perclus. Donc, ces personnes cherchent leurs gagne-pains dans la difficulté. Ils ont acheté des parcelles avec de l’argent difficilement acquis. Et ces personnes sont venues  habiter à Kabalagougou  pour vivre paisiblement et dignement. Dans ce contexte, nous souhaitons que tous ceux qui ont acheté des parcelles puissent avoir leurs lots. Ils nous ont fait savoir que toute personne qui n’a pas aménagé sa parcelle n’aura de numéro d’attribution. Nous n’avons pas apprécié cette décision. Après, le maire est venu me voir pour m’expliquer que cette décision fait partie de la loi du lotissement. J’ai dis que ce n’est pas notre souhait. Notre souhait est que tous ceux qui ont acheté des parcelles ici puissent avoir des lots, ensuite, ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent avec le reste des parcelles. Aujourd’hui, je suis confronté à ces difficultés dans le village. Nous voulons vraiment recaser ces personnes léser dans leurs droits.

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Fatoumata Djiré, Présidente des femmes du Village de Kabalabougou

«Nous souhaitons une issue heureuse afin que tous ceux qui sont confrontés à ce problème puissent avoir leurs parcelles »

Depuis que le lotissement du village a commencé, nous avons  eu vraiment  des difficultés. Par exemple, il y a des veuves qui n’ont pas eu de parcelles jusqu’à présent. Notre souhait est que ces personnes puissent avoir des parcelles  ainsi que l’ensemble des déguerpis. Moi personnellement, j’ai des difficultés à obtenir ma parcelle. Nous souhaitons une issue heureuse afin que tous ceux qui sont confrontés à ce problème puissent avoir leurs parcelles.

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Mamadou Traoré, Président de la jeunesse du Village de Kabalabougou

« Nous souhaitons que les personnes qui occupent les places publiques soient recasées au niveau des parcelles non occupées »

La procédure du lotissement du village n’a pas permis de mettre tout le monde dans ses droits. Ce qui a causé des désagréments, car des gens se sont retrouvés sans parcelles. Les travaux ont été mal effectués. De même, les places publiques auxquelles la population à droit n’ont pas été délimitées. Et jusqu’à présent nous ne savons pas où se situent ces places pour la simple raison qu’elles sont occupées par d’autres. Nous sollicitons l’aide des autorités pour trouver une solution idoine. Nous avons rencontré le maire par rapport à la situation ; même  le terrain de sport du village était occupé et il a fallu une procédure judicaire pour que la jeunesse soit remise dans ses droits. Nous souhaitons que les personnes qui occupent les places publiques soient recasées au niveau des parcelles non occupées. C’est ce que nous faisons actuellement comme travail dans le village.

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Mamourou Keita, Maire de la commune rurale de Mandé

« Le Conseil Communal qui est ma force a commencé à s’effriter autour de cette affaire… »

Les populations de Kalabambougou ont récemment tenu une assemblée générale pour dégager des mesures à prendre en vue d’une réhabilitation qui préserve les intérêts des populations. Le maire de la commune rurale de Mandé Mamourou Keita, réagit à cet effet.

 

Les habitants n’ont pas de mesures à prendre dans ce sens là, parce qu’ils ne sont pas une autorité compétente en la matière. Dans la commune, nous sommes venus aux affaires le 5 juin 2009. Et  on a trouvé que le plan de réhabilitation avait été ficelé par l’ancienne équipe avec le préfet et les villageois. C’est en août que l’arrêté du gouverneur  a été pris par rapport à l’application de la reforme de ces deux villages : Kabalabougou et Mamaribougou. Mais, dans l’application, la mairie s’est vue exclue du processus. A l’époque, j’ai approché le préfet et le gouverneur. Le premier n’a pas voulu se plier aux injonctions du second, donc le conseil communal a porté plainte automatiquement au niveau du tribunal administratif aux fins d’annulation de l’arrêté du gouverneur.

Parce que dans notre compréhension, il y avait des parcelles divisées en deux, donc les gens étaient spoliés de leurs propriétés. Et les parcelles n’étaient pas réglementaires sur le plan dimensionnel. On a eu gain de cause et l’arrêté du gouverneur a été annulé. Ce qui annulait du coût l’application du plan de réhabilitation.

Le contentieux du gouvernement a introduit un recours au niveau de la cour suprême pour annuler la décision du tribunal. Le conseil communal, qui est ma force,  a commencé à s’effriter autour de cette affaire. Je me suis retrouvé un jour avec 19 pétitionnaires sur 23 conseillers pour dire qu’il faut que la mairie sorte de cette affaire. Donc, sur les 19 conseillers qui constituent  plus de la majorité et moi-même, je me suis ajouté aux pétitionnaires pour nous retirer.

On a essayé de voir le préfet, pour trouver un protocole d’accord entre nous. C’est ce qui n’était pas du goût d’un certain nombre de gens. Ils n’ont pas compris le rôle du maire. Ils ont attaqué le protocole d’accord qui était entre la mairie et la préfecture, et obtenu son annulation. L’appel étant suspensif, du coup le processus devait continuer. Maintenant, ils se sont plaints et 121 personnes ont amené la grosse au niveau du procureur de Kati qui a instruit au préfet de leur mettre dans leurs  droits et c’est ce qui a été fait. Parce que les 119 et autres ont demandé des parcelles que le préfet a concédées. Les décharges sont au niveau de Kati. Pourquoi l’annulation? Parce qu’ils n’ont pas eu de parcelles, d’autant plus qu’ils ont eu leur compensation. Maintenant quel est le problème qui se pose? Au niveau du contentieux du gouvernement, quand le protocole a été fait entre les deux, le contentieux en son temps n’a pas pris le soin de vider le dossier au niveau de la cour suprême. Mais c’est ce qui est fait maintenant, ils ont vidé le dossier et l’annulation a été faite.

Le dossier a été repris en faveur de la suspension, quand Bathily est venu, puis l’annulation a été automatiquement suspendue par l’appel. Ils ont pris l’annulation et la suspension pour dire que c’est eux qui doivent faire le travail. Ils ne peuvent pas. Maintenant, le processus doit continuer normalement. Il y a les carrés, les voies et les équipements utilisés par certaines personnes, qui doivent être recasées ailleurs. Raison pour laquelle, on choisit toujours une zone de recasement après une réhabilitation. Donc, ce n’est pas un lotissement classique où on prend un espace comme ça pour  le morcellement, la viabilisation.

La viabilisation, c’est tracer le cadre de vie des gens qui habitent déjà sur les lieux. Les gens qui occupent ces sites doivent être recasés ailleurs. C’est ce qui pose problème aujourd’hui. C’est la commission d’enquête foncière qui doit normalement  vérifier les titres qui sont dans la zone (définitifs et précaires) et  le préfet prend le soin de retirer ces titres précaires en les purgeant. Les restants doivent venir maintenant en compensation des gens qui ont été touchés par les voies tracées, des équipements. C’est ça, le rôle de la commission d’enquête foncière. Cette commission est naturellement pilotée par le préfet, parce que  toutes les terres appartiennent à l’Etat et c’est le préfet qui est le dernier maillon de l’Etat. Il y a une autre commission d’enquête de recensement et de la population et cette commission doit être  présidée naturellement par le maire. Parce que c’est le maire qui est à la tête de la population et c’est lui qui connait sa population. Mais, dans le cas de Kati, les deux commissions ont été jumelées en une seule présidée par le sous-préfet. Du coup, l’attribution de l’habitation au niveau de Kabalabougou et Mamaribougou, et même au niveau des autres villages, c’est le préfet qui attribue. Comme la loi dit que c’est le maire seul qui est habilité à signer les concessions rurales et les celles à usage d’habitation, d’où la signature du maire et le reste va au niveau de la commission. Le maire signe le formulaire en blanc, en mettant le numéro des parcelles. Mais, l’identification des personnes occupantes de la zone est faite au niveau  de la commission d’enquête foncière de ménage et de recensement.

Réalisé par Ousmane Baba Dramé

 

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