Le pouvoir : Sens des responsabilités et le goût de la justice

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Le chef de l’État doit respecter ses déclarations à la télévision et au peuple. Le mensonge et le parjure sont le pire des péchés pour un chef. Un chef prend en compte son serment qui non respecté sera un serpent sous ses pieds. Le serpent est à terre, le pied aussi. Fais tout pour qu’ils ne se rencontrent pas.

En Afrique, le pouvoir a ceci de curieux: elle ne réussit que s’il y a l’équilibre entre deux logiques fondamentales: celle de la critique permanente de l’opposition en vue de l’alternance au pouvoir, et celle du maintien de l’ordre prôné par la majorité au pouvoir. Il s’agit pour l’opposition de ne pas trop fragiliser l’État par les désordres de rue et pour le gouvernement, au nom d’empêcher l’anarchie, d’instituer un régime policier.

Vaste défi pour l’Afrique où nous assistons partout à un duel sans merci dans un pré carré, d’oppositions jalouses et pressées de prendre le pouvoir parce que démunies et de majorités arrogantes, méprisantes et intolérantes parce que disposant du trésor. Au- delà des changements politiques, des oppositions de partis ou de programmes, le choix du représentant de l’État doit dépasser les considérations partisanes des partis, mais être fonction de la seule compétence. C’est à cette seule condition que ce représentant pourra être compris par ces administrés qui verront en lui l’homme d’aucun parti, d’aucune coterie politique majoritaire ou minoritaire et sans aucune considération électorale.

D’après Solon, philosophe et homme d’État grec, il faut parler aux chefs le moins mais le mieux possible. Ce qui veut dire dans un langage de vérité. Au moment où les griots chantaient que la puissance de Dah Monzon de Ségou allait de Tombouctou (Mali) à Kouroussa (Guinée Conakry) ce roi, un matin, fit venir son favori et célèbre griot Tientiguiba Danté et lui posa cette question: Badjéli (père griot) qu’est-ce que c’est le pouvoir ? Tientiguiba pointa le roi du doigt, lui répondit «mon maître, le pouvoir n’est rien d’autre que de faire proprement ce qui a été convenu par l’ensemble de la population». Une belle leçon de sagesse pour les dirigeants africains.

Dah Monzon Diarra, sur son lit de mort, répondit à son frère et successeur Tiéfolo Diarra qui lui demandait comment diriger Ségou, en ces termes: «Il n’y a pas deux (02) façons d’assumer le pouvoir. Si tu veux, sois plus méchant et plus brûlant que les flammes de l’enfer sur le dos de ton peuple; si tu veux sois plus doux et frais que l’eau du fleuve dans la gorge d’un assoiffé. Mais dans l’un ou l’autre cas, sois juste, il le faut». Ces deux anecdotes tirées du terroir de Ségou, définissent mieux que toute la conception bamanan du pouvoir et de la démocratie. Celle-ci n’est pas un fait nouveau chez nous: vérité et justice, ce sont là les deux mamelles de la démocratie. Or, vérité et justice sont plus les attributs de Dieu que ceux de l’homme.

En effet, qui peut dire la vérité sur les autres peut des fois, ne pas la supporter si elle le défavorise. Qui prône la justice, peut l’oublier si elle contrarie ses intérêts. Dans cette période de transition démocratique au Mali, la vérité doit être la pratique quotidienne et responsable par tous et toutes dans le respect des règles établies. Le salut auquel nous aspirons tous, ne nous viendra que dans l’application correcte par les gouvernants et gouvernés des principes, lois, décrets, etc., bref tout ce qui définit, soutient et pérennise l’État.

Aujourd’hui, ces transformations politiques, sociales économiques qui sont devenues une grande ambition nationale, une volonté collective certaine, ne conduiront au bien-être général que dans le respect des lois et de la justice. Il n’y aura de réussite qu’à partir de la vérité et de la justice. Ces deux (02) éléments conditionnent la paix sociale. Sans la paix sociale, il n’y aura pas de démocratie et pire le Mali perdra sa force et son unité.

Comme l’a dit Cicéron, philosophe et homme d’État Romain: «Il n’y aura de salut pour un peuple que dans le respect des lois et l’amour de la justice».

Pour la bonne marche de nos institutions et la paix sociale, il faut:

– Que les dirigeants actuels africains cessent de croire que la vérité est dans leurs mains et d’eux seuls.

– Qu’ils cessent de prendre comme l’a dit Rabemanajara, pour critère de vérité, la logique de leurs préjugés ou de leurs passions politiciennes, dans la mesure où l’on peut parler de logique dans un préjugé ou une passion.

– Qu’il est temps en Afrique pour les politiques de préférer la conscience à la consigne des partis. Ce qui pose le problème de courage en politique. Courage qui manque bien souvent dans nos pays.

– Que les dirigeants des partis majoritaires abandonnent cette pratique qui consiste à réserver à leurs militants, les projets, les marchés publics et l’avancement dans la carrière administrative; enfin, comme l’a dit le prince Michel Poniatowski, ami et ancien ministre de l’Intérieur français, évitons que nos pays ne deviennent: «la République des copains et des coquins».

À bon entendeur salut.

Fanta CISSÉ

 

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