Le ministre Kassogué sur l’esclavage par ascendance : « Nous avons instruit à tous les procureurs de sévir… »

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Interrogé sur la question de l’esclave par ascendance au Mali sur Mikado, le ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, Mahamadou Kassogué, promet que des textes seront prêts pour réprimer sévèrement le phénomène dans toute sa dimension. Toutefois, il a « instruit à tous les procureurs de sévir sur la base des dispositions actuelles du Code pénal ».

Les personnes nées en esclavage travaillent sans être payées et privées de leurs droits fondamentaux et de leur dignité. Ceux qui rejettent la désignation d’esclave et tentent de défendre leurs droits sont régulièrement violentés par les chefs traditionnels ou religieux et leurs alliés.

Des experts des droits de l’homme indépendants de l’ONU ont appelé le Mali à prévenir les attaques contre les soi-disant esclaves, affirmant que ces incidents sont en augmentation, avec deux fois plus de personnes blessées cette année qu’en 2020. « Les attaques constantes et systématiques contre les personnes considérées comme « esclaves » sont inacceptables et doivent cesser immédiatement », a déclaré Alioune Tine, l’expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Mali. « De telles attaques vicieuses sont incompatibles avec une société inclusive et nous les condamnons dans les termes les plus forts », a, pour sa part, déclaré Tomoya Obokata, le Rapporteur spécial des Nations Unies sur les formes contemporaines d’esclavage.

Pour rappel, le Mali a interdit l’esclavage en 1905, mais un système d’esclavage d’ascendance persiste, en vertu duquel le statut d’esclave est attribué à certaines personnes parce que leurs ancêtres auraient été réduits en esclavage par des familles des soi-disant « maitres ». Sur la question, le ministre de la justice et garde des sceaux est revenu sur la question car ce phénomène prend de plus en plus de l’ampleur. « Nous avons instruit à tous les procureurs de sévir sur la base des dispositions actuelles du Code pénal », selon le ministre de la justice Mahamadou Kassogué qui évoque aussi l’élaboration d’une loi spécifique pour “réprimer le phénomène dans toute sa dimension”.

Toutefois, Mahamadou Kassogué reconnait qu’il y a des dispositions du code pénal qui permettent de prendre certains aspects donc notamment de coups et blessures, le cas de meurtre, le cas de séquestration, le cas d’enlèvement de personnes et autres qui peuvent être pris en charge. Mais il avouera que : « la dimension psychologique qui est liée à la question l’esclavage notamment les mesures de nature esclavagiste, la discrimination basée sur le statut d’esclave et l’apologie de l’esclavage sont des infractions qui ne pourront pas être réprimées en tant que telles tant qu’on n’a pas une loi spécifique en la matière ». Se basant sur cette théorie du ministre de la justice, l’interrogation qui demeure est de savoir si les esclavagistes du Mali continueront d’agir en toute impunité ? Dès lors où le ministre en charge de la question avoue qu’aucune loi ne réprimande cette pratique barbare et obsolète.

Par ailleurs, le ministre Kassogué reconnaît que le Mali dispose des textes qui ont été élaborés et qui sont en train de suivre leur parcours dans le circuit d’adoption. « S’il plaît à Dieu, nous ferons en sorte que ces textes soient adoptés et que nous puissions avoir un document vraiment très précis qui va réprimer exactement le phénomène dans toute sa dimension » assure le ministre de la justice. Mais en attendant cela, il affirme qu’il a été instruit à tous les procureurs du pays de prendre les dispositions pour sévir sur la base des dispositions actuelles »

Il est plus que temps pour les autorités maliennes de trouver une solution définitive à ce phénomène qui terni l’image de la société malienne car depuis 2018, la zone de Kayes fait face à une montée de la violence liée à la problématique de l’esclavage par ascendance. Cette pratique, qui persiste à Kayes et dans d’autres régions du pays, mène à de fortes discriminations. A titre d’exemples, des « esclaves » ont été empêchés d’accéder à leurs champs par des « nobles », ont rapporté des experts des Nations unies.

En résumé, une révolution idéologique est peut-être en cours. Les réseaux sociaux et les médias donnent de l’ampleur à toutes les informations. Les esclaves sont de plus en plus entendus et soutenus, et semblent en passe de gagner la bataille. Mais face à eux, les « nobles » s’accrochent à leur petit morceau de pouvoir parce que c’est tout ce qui leur reste.

Ahmadou Sékou Kanta

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4 COMMENTAIRES

  1. Aziza de Niamkoko 9 Nov 2021 at 16:51 ;

    C’est juste ce que tu dis, Aziza… Mais dans cette histoire d’esclavagistes, il n’y a pas que les Soninké. Chez nous les Khassonké, c’est pareil. Les mentalités n’ont pas évolué.
    Mon Frère KInguiranke est allé dans ma COMMUNE de TOMORA dans l’Arrondissement de Oussoubidiangna. Je ne sais pas s’il y a fait attention. Mais encore aujourd’hui, les CITOYENS y sont catégorisés en ” Djons, en horon et en Niamakala”.
    Quel honte… !

  2. Quels “esclaves” et quels “nobles” dès lors que la colonisation est venue rabattre les caquets à tout le monde ? C’est simplement une honte pour le Mali dans son ensemble.
    Cependant, les dessous de la résurgence du phénomène sont tus car il ne s’agit ni plus ni moins que de technicisme. La plupart de ceux qu’on séquestre sous-prétexte qu’ils sont esclaves sont descendants des Bambaras, oui, il faut le dire, raflés par les djihadistes du 19e siècle et en partance pour les pays arabes via la Mauritanie, dont certains ont échoué en pays Soninké.
    Avec le retour du phénomène djihadiste et aussi l’émergence de nouveaux riches chez les Soninkés, ces derniers qui ont le sentiment d’être exclus de l’histoire “griotique” du Mali, tentent de prendre leur revanche. Si l’Etat ne circonscrit pas très vite ce phénomène, il pourrait très rapidement déboucher sur un conflit entre Bambara et Soninké, ce qu’on jamais vu dans l’histoire du Mali.
    A bon entendeur, salut !

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